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Achats à l'international : quelles différences entre PME et grandes entreprises ?

Publié par Emmanuelle Serrano le | Mis à jour le
Achats à l'international : quelles différences entre PME et grandes entreprises ?

Le 6 juin dernier, Fabienne Fel, directeur scientifique du Mastère spécialisé en management stratégique des achats et de la supply chain à l'ESCP Europe, organisait un colloque sur le thème "PME ou multinationale : comment réussir ses achats depuis les pays émergents ?"

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Fabienne Fel est professeur associé et directeur scientifique du Mastère spécialisé en management stratégique des achats et de la supply chain à l'ESCP. Pour aborder la thématique "PME ou multinationale : comment réussir ses achats depuis les pays émergents ?", à ses côtés, trois intervenants : Marc Sauvage, directeur achats du groupe Bouygues Telecom, Patrick Léon, directeur du business development chez China Bridge (cabinet spécialisé en sourcing, logistique et qualité en Chine) et Pierre Jarniat, ancien directeur achats du groupe Salomon (spécialisé dans la fabrication de matériel pour le ski et les sports de neige).

Le colloque s'est ouvert avec la présentation de l'étude réalisée par Fabienne Fel sur les achats à l'international, intitulée "Quelles différences entre PME et grandes entreprises ?" L’étude a été réalisée durant l’été 2011 auprès d’un millier de directeurs achats ainsi que d’acheteurs. Plus de 220 réponses ont été reçues en retour, dont 158 se sont révélées complètes et exploitables. L'échantillon est composé de 158 entreprises françaises de tous secteurs d’activités. Les répondants au questionnaire appartiennent à plus de 70 % au domaine des achats (responsables achats ou acheteurs). Les 30 % de répondants occupant d’autres fonctions sont pour la plupart des directeurs généraux - en particulier de petites entreprises -, ou des personnes appartenant à la fonction supply chain. Les 158 entreprises sondées sont de tailles variées et comportent une part importante de TPE (16 %) et de PME (24 %). Dans la mesure où l'étude permettait plus particulièrement d'étudier l’incidence de la taille des sociétés sur leurs processus de délocalisation, trois classes ont été constituées en prenant pour base les effectifs retenus par la typologie établie dans le cadre de la loi de modernisation de l’État, à savoir :
- les petites et moyennes entreprises (PME) de moins de 250 salariés, en incluant les micro-entreprises de moins de 10 personnes ;
- les entreprises de taille intermédiaire (ETI), employant de 250 à 5 000 personnes ;
- les grandes entreprises (GE), de plus de 5 000 salariés.

« On constate un effet d'imitation, déclare Fabienne Fel. Les PME souhaitent abaisser leurs coûts, à la fois comme leurs clients donneurs d'ordres, qui, eux aussi, le leur demandent et pour ne pas rester en reste par rapport à leurs concurrents directs », ajoute-t-elle. Par ailleurs, plus l'entreprise est grande, plus le sourcing est diversifié. Leurs zones d'approvisionnement privilégiées ? Pas de surprises : la Chine arrive en tête (70,9 %), suivie de l'Europe occidentale hors France (64,3 %), puis de l'Europe centrale et de l'Est (46,2 %) et l'Inde (41,8 %). La Chine est le pays le plus cité spontanément par toutes les entreprises, indépendamment de leur taille (31 % des PME, 25 % des ETI et 34 % des GE). Mais c'est aussi la Chine qui déçoit le plus (40 %), suivie de l'Inde (15 %). Les principaux reproches adressés aux fournisseurs indiens par les entreprises concernent la qualité (95 % des répondants), les problèmes de communication et de suivi (80 %) ainsi que de longs délais de production impactant la réactivité et des surcoûts imprévus (70 %). Il est vrai que la notion du temps en Inde n'a rien à voir avec la conception occidentale. Faut-il y voir une explication ? C'est probable, mais pas suffisant....

Les processus décisionnels des entreprises divergent suivant leur taille : les GE se reposent sur les salons à l'étranger et en France, sur Internet et les relations professionnelles, auxquelles on peut ajouter les conseils reçus des fournisseurs, des autres acteurs du marché et des maisons mères également pour les filiales. Les PME recourent en dehors des salons, quand elles ont les moyens d'y aller, à Internet et à leur réseau professionnel et personnel.

Les différences majeures entre PME et GE tiennent plus au périmètre d'approvisionnement qu'au volume d'achat. Les PME ont moins de bureaux de sourcing à l'étranger et font moins d'achats directs à l'étranger que les GE. L'accès aux informations est plus restreint pour les PME. Pour les retours d'expériences et le degré de (in)satisfaction, la taille de l'entreprise importe peu.

Pierre Jarniat a expliqué la stratégie adoptée par le groupe Salomon en matière de sourcing international, pour concilier réseaux économiques et protection de ses innovations produits et process. Salomon fait partie du groupe Amer Sports, numéro un mondial de l’équipement du sport (CA : 1,9 milliard d'€, 7 100 employés à travers le monde) dont le siège social est basé à Helsinki, en Finlande. Salomon est une entreprise historiquement exportatrice (+ 90 % depuis plus de 35 ans). L’innovation y est à la fois un moteur de croissance et une condition de survie. L’externalisation industrielle est forte : de 50 % en 1990, elle est passée à 98 % en 2010. Conséquence logique : les achats sont de plus en plus internationaux. Les phases essentielles du processus (spécifier, construire et produire) ont évolué : la part interne de la production et de la construction a fortement régressé, tandis que la part de la spécification s’est maintenue. Maîtrise et délégation ont pris une part grandissante dans la production et la construction. Les ressources humaines sont désormais concentrées sur des tâches stratégiques orchestrées au sein du design center, qui réunit en un seul endroit toutes les équipes du marketing, design, bureau d’études, évaluation des achats, industrialisation, ateliers pilotes des activités Salomon et Mavic (marque du groupe), soit plus de 750 personnes. Le design center est chargé d’articuler expertise métiers et transversalité. Tous les métiers du développement produits (marketing, design, BE, évaluation de la qualité) sont ainsi recentrés sur une seule unité pour toutes les activités (synergie, cross fertilisation, etc.). Le travail en groupe projets (BE, industrie, achats) favorise l’analyse de la valeur en conception. L’engineering se fait de façon simultanée (produits, process). Au sein des plateaux projets, les matériaux et les process sont mis au point en même temps que les produits. Ces derniers sont validés industriellement avant transfert dans les réseaux de production grâce à l’atelier pilote.

Des unités intégrées (4 % de l’activité industrielle) sont installées en France et en Italie, où Salomon maîtrise l’ensemble du processus (du développement à la livraison). Les lieux des process innovants sont associés à des activités nouvelles. Autre scénario : des relations de sous-traitance ont été instaurées en Europe (42 % de l’activité industrielle) où Salomon garde la maîtrise du développement produits et de la mise au point des matériaux et procédés. Les matières sont fournies aux sous-traitants qui travaillent majoritairement sur des moyens mis à disposition par Salomon. Ces filières économiques permettent de protéger les savoir-faire produits et process. Le sourcing (54 % de l’activité industrielle) se fait surtout en Asie et en Europe. Salomon garde la maîtrise du design, la définition du cahier des charges et la qualification des produits. Le développement produit est soit conservé à 100 %, soit assuré en codéveloppement soit délégué. Le partenaire qui possède un savoir-faire dans le domaine assure l’industrialisation des produits, l’achat des matières et composants et fabrique sur ses propres moyens de production. Le groupe obtient ainsi les meilleurs ratios de rentabilité pour les capitaux engagés dans le cadre de réseaux ouverts très "accessibles".

 
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