Les plus belles négociations au cinéma
Olivier Wajnsztok (AgileBuyer) s'est plongé dans les archives du cinéma pour illustrer différentes techniques de négociation avec des extraits de films qui, assurément, vous parleront. Sourire assuré !
Je m'abonneEn plus de nous divertir, le cinéma nous offre des scènes de négociation mythiques où actions et émotions vont de pair...
Les négociations sont cruciales dans le processus achats car permettent d'impacter à la baisse les prix mais aussi de sécuriser l'acte d'achat en lui-même par la formalisation d'un contrat où les parties sont tenues à la bonne exécution des obligations. Le cinéma scénarise certaines situations qui mettent en oeuvre des négociations. Plusieurs techniques sont utilisées pour arriver au résultat escompté. Tous les moyens sont bons.
Décryptons quelques scènes de négociation :
L'art d'orienter le choix de son interlocuteur:
Extrait de Pirates des Caraïbes 3 : cliquer ici
La scène en question démarre avec un fond musical digne d'un western américain où deux cow-boys s'affrontent du regard pendant de longs instants avant de dégainer leur arme pour commettre l'irréparable, mais non ! Nous sommes en compagnie de pirates sur une île paradisiaque où honneur, vengeance et rivalité restent malgré tout d'actualité.
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S'opposent d'un côté William Turner, Davy Jones et Cutler Becket puis de l'autre Hector Barbossa, Elizabeth Swann et le fameux Jack Sparrow. Ce dernier serait redevable auprès de Davy Jones d'une dette d'un siècle d'esclavage à bord du Hollandais Volant - dette qui n'aurait pas été honorée car Jack Sparrow se serait évadé.
Analysant la situation et écoutant les dires de part et d'autre, Elizabeth en tant que roi du tribunal de la confrérie, propose spontanément un marché qui permettra à court terme d'apaiser le créancier. En effet, elle suggère qu'ils procèdent à un échange : William Turner contre Jack Sparrow. L'échange se fait sans encombre et la scène se termine sur une promesse de vengeance et de mort. Le clan d'Elizabeth quitte l'île.
L'art de demander des contreparties (ou de les imposer):
Extrait de La vérité si je mens 2 : cliquer ici
La scène qui nous intéresse ici concerne les négociations liées au référencement d'une société par son client de la grande distribution et qui donne, pour changer, une mauvaise image de l'acheteur sans scrupules prêt à tout.
Le représentant de la grande distribution introduit son propos en disant que la quantité initialement commandée n'était pas suffisante au regard du succès rencontré en magasins soulignant qu'il s'agissait d'une "grosse erreur". Ce qui tend à mettre le fournisseur dans de bonnes dispositions, l'atmosphère devient plus détendue car le client envisage d'acheter 8 références qui seront distribuées dans l'ensemble des hypermarchés mais cela ne sera pas sans contreparties de la part du fournisseur qui ne le sait pas encore...
L'utilisation de la flatterie pour instaurer un climat détendu est plus que pratiqué par le client envers le fournisseur : "si vous finissez par devenir un fournisseur important" par exemple. Pour convaincre davantage le fournisseur, le client évoque le fait que la publicité sur lieu de vente puisse accroître la visibilité du fournisseur et de ses produits grâce à la pose par la force de vente du client. Le client exige même que le fournisseur rémunère sa force de vente pour le temps passé sur ses produits.
Le client joue la carte de la fusion avec un autre distributeur afin que le fournisseur consente à une remise de fin d'année de 5% sur son chiffre d'affaires annuel compte tenu de l'accroissement des volumes vendus. Mais le distributeur est dans une incroyable position de force. Ce qui s'appelle la situation de "beat me" dans la matrice de Wajnsztok (Lire, sur ce sujet: Fournisseurs/acheteurs: quels rapports de force? ).
L'art de bien réussir (ou de rater) une négociation:
Extrait de Les Bronzés : cliquer ici
Chacun expérimente dans son quotidien des négociations sans pour autant être acheteur. Nous avons ici la belle démonstration de Christian Clavier qui propose très gentiment de "marchander" le masque que Gérard Jugnot souhaite acheter. Sauf que le vendeur sait que Gérard Jugnot veut l'acheter ce qui met l'acheteur en position de faiblesse pour sa négociation. Ce qui s'appelle la situation de "kiss me" dans la matrice de Wajnsztok (voir autre article déjà publié dans Décision Achats sur le sujet: Fournisseurs/acheteurs: quels rapports de force?)
Christian Clavier entame sa négociation en redemandant le prix du masque alors même que le vendeur vient de l'annoncer. Christian Clavier rétorque que celui-ci vaut en réalité 15 000 francs, le vendeur lui répond non que c'est bel et bien 30 000 francs.
On s'aperçoit ici que Christian Clavier fait grimper les enchères lui-même sans même que le vendeur n'ait à intervenir. De 15 000 francs, on passe soudainement à 20 000 puis 25 000 puis 27 000 (avec l'ajout d'un tam-tam). Voyant finalement que le vendeur reste sur ses positions, Christian Clavier glisse discrètement à son ami : "bon allez laisse tomber, file-lui ses 30 000". La négociation est clairement un échec pour l'acheteur mais profite assurément au vendeur qui est resté tout du long en position de force.
L'art de retourner les arguments de son interlocuteur à son propre avantage:
Extrait de Batman Darknight : cliquer ici
Mr Rease et Lucious Fox s'entretiennent suite à la demande d'audit adressée par Lucious Fox des accords passés entre Wayne Enterprises et la Holding LSI. Mr Rease explique qu'il a constaté quelques irrégularités dans les chiffres publiés par le département des sciences appliquées de Wayne Enterprises, et dirigées par Lucious Fox, qui démontrent clairement le soutien de l'entreprise au justicier masqué tant recherché par la ville de Gotham. En raison de ces découvertes qui pourraient faire scandale, Mr Rease tente de négocier (pour ne pas dire soutirer) pas moins de 10m$ par an contre son silence, et ce, jusqu'à la fin de ses jours. Cette attitude s'apparente davantage à du chantage à de la négociation en tant que telle.
Ce qui est intéressant est de voir le retournement de situation qui s'opère et qui rend la situation presque loufoque quand Mr Rease renonce à ses projets. En effet, Lucious Fox reformule très précisément ("si j'ai bien compris") les intentions de Mr Rease en prenant soin de lui rappeler, amusé, qu'il souhaite faire chanter un homme qui n'a aucun scrupule à "massacrer à mains nues de pauvres criminels".
Les négociations n'aboutissent pas toujours à un consensus :
Extrait de Intolérable cruauté : cliquer ici
La scène ici concerne le divorce d'un couple qui se fait représenter par son avocat respectif. L'objet de la réunion est de parvenir à un accord à l'amiable. Avant d'entrer dans le vif du sujet, l'avocat du mari (George Clooney) tente de déstabiliser l'avocat de la femme en faisant référence à une affaire que celui-ci a géré dernièrement. L'objectif de cette manoeuvre est de mettre en doute les capacités de son avocat à défendre les intérêts de sa cliente.
L'avocat de la femme bien conscient des manoeuvres orchestrées par George Clooney recentre le débat en demandant à la partie adverse si elle a d'ores et déjà des propositions à faire. George Clooney propose : la réconciliation (formellement refusée par l'épouse) puis la dissolution du mariage sans aucun préjudice avec un délai de réflexion d'un mois (formellement refusée cette fois-ci par l'avocat).
Vient alors le moment pour George Clooney d'écouter les attentes de l'autre partie. L'épouse consent à divorcer en ayant 50% des biens de la communauté. C'est au tour de George Clooney d'être déstabilisé se croyant en plein rêve au regard des demandes formulées.
George Clooney demande à son adversaire son meilleur prix. Ce dernier lui répond que sa cliente souhaiterait garder la résidence principale et avoir 30% des biens ; ce à quoi George Clooney répond qu'il est "taré". Inutile de préciser qu'ils se retrouveront au tribunal pour régler le problème...
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Par Olivier Wajnsztok, directeur associé du cabinet AgileBuyer spécialisé dans les équipiers achats (acheteurs professionnels qui traitent des projets achats chez les clients), le conseil et le coaching d'acheteurs.