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La montée en puissance des réductions de coûts intelligentes

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La montée en puissance des réductions de coûts intelligentes
© kantver - Fotolia

Selon l'étude annuelle de AgileBuyer sur les priorités 2019 des directions achats, 75% des personnes interrogées déclarent que la réduction des coûts restera leur premier objectif, mais en privilégiant des stratégies intelligentes telles l'ajustement des spécifications techniques...

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C'est l'un des enseignements intéressants de l'édition 2019 l'étude AgileBuyer sur les "Tendances et priorités des départements achats en 2019", réalisée avec le CNA: si la négociation reste la méthode la plus utilisée pour réduire les coûts (par 58% des répondants), cette dernière est rejointe par l'ajustement des spécifications techniques (58%, en hausse de 11 points par rapport à l'année dernière). D'autres méthodes bien connues des acheteurs pour réduire les coûts enregistrent des scores relativement importants, telles que la mutualisation et la globalisation des achats (46%), ou encore le changement de fournisseur (39%).

"Ces résultats particulièrement marquants montrent qu'il est de plus en plus demandé aux acheteurs d'intervenir en amont du processus d'achats, lors de l'élaboration du cahier des charges avec les prescripteurs internes, au-delà de la simple négociation des prix où leur valeur ajoutée est moindre. C'est aussi le signe d'une plus grande professionnalisation de la fonction achats au sein des organisations", souligne Olivier Wajnsztok, directeur associé de AgileBuyer et grand chef d'orchestre de cette étude. Certains parlent ainsi de réductions des coûts "intelligentes", d'autres de réductions des coûts "à valeur ajoutée augmentée". Dans des environnements désormais complexes où les entreprises se doivent être de plus en plus attractives vis-à-vis de leurs fournisseurs, les acheteurs sont davantage impliqués dans le business. Derrière l'ajustement des spécifications techniques se pose alors la question du juste besoin par rapport à l'offre du marché que les acheteurs connaissent bien mieux que les opérationnels. "Et pour cause, cela doit être leur valeur ajoutée", commente Olivier Wajnsztok.

"L'intervention de plus en plus en amont des acheteurs sur le processus d'achats, telle que démontrée par ce score de 58%, au même niveau que la négociation afin de jouer sur les ajustements des spécifications techniques, en fait un facteur d'attractivité pour le métier car l'acheteur ou l'acheteuse se doit de travailler en mode collaboratif avec le fournisseur et les partenaires internes pour pouvoir jouer sur ces leviers", commente Karine Alquier-Caro, directrice des achats chez Legrand. "L'acheteur seul négociateur tend à disparaître..."

"Il est satisfaisant de voir s'éloigner l'image de "cost-killer" de l'acheteur, souligne Sylvie Robin-Romet, directeur des achats Groupe chez Crédit Agricole SA. "Si les métiers ne comprennent pas toujours l'intérêt d'intégrer l'acheteur en amont du process, la co-construction des cahiers des charges avec les fournisseurs nous permet d'améliorer cette maturité "interne" et de mettre en avant la valeur ajoutée de nos acheteurs. Seul bémol : les acheteurs deviennent dans ce cas responsable du "service après-vente" "...

Pour Jean-Luc Baras, directeur des achats chez Eiffage, "Challenger les solutions prescrites, ajuster les spécifications techniques et fonctionnelles sont des leviers de performance majeurs pour les acheteurs projets. Ils ont besoin pour cela de l'appui et de l'expertise des catégories managers. Cela demande une collaboration renforcée avec les bureaux d'études ou les chefs de projet, et même une capacité à présenter et à argumenter pour convaincre les clients."

Jean-Louis Collange, directeur des achats chez Servier, souligne quant à lui que "L'intégration de l'acheteur en amont des projets est une source majeure de savings et d'optimisation de l'innovation fournisseurs. Des approches comme le cahier des charges fonctionnel, la co-innovation, le make or buy ou le re-design to cost favorisent à la fois la maîtrise des coûts et la focalisation de l'entreprise sur son coeur de métier."

Lire la suite en page 2: L'objectif de réduction des coûts repart très légèrement à la hausse

L'objectif de réduction des coûts repart très légèrement à la hausse

En 2019, 75% des personnes interrogées déclarent que la réduction des coûts restera le premier objectif des directions des achats. Ce résultat demeure historiquement bas en regard des années précédentes. En revanche, il augmente de 3 points par rapport à l'étude 2018 qui marquait un tournant dans les relations entre donneurs d'ordres et fournisseurs vers des relations plus apaisées.

"Cette augmentation, qui ne montre pas non plus un changement de cap radical, traduit tout de même une inquiétude des directions des achats pour 2019, dans un contexte politique et économique, aussi bien au niveau international que national, plus tendu qu'en 2018. Un certain nombre d'organisations ont d'ores et déjà anticipé un ralentissement économique et donc des réductions de coûts à venir. Dans l'absolu, ce pourcentage de 75% est important mais reste logique. En effet, pour la plupart des directions générales, le rôle de la fonction achats est prioritairement d'optimiser les coûts, à l'heure où la notion de performance économique est plus que jamais de mise. A court terme, face à des relations qui se sont tendues avec des fournisseurs de premier rang, certaines directions des achats vont reporter leurs objectifs d'économies sur d'autres familles d'achats alors que ces dernières n'étaient pas considérées comme prioritaires les années passées."

" L'optimisation des coûts reste un invariant de la fonction achats, en particulier chez des ensembliers comme nous où 80% des coûts sont des coûts d'achats", commente Frédéric Thielen, directeur des achats du Groupe Brandt. "Pour autant, il s'agit de mettre en place les prérequis pour qu'elle soit vécue comme une opportunité de collaboration plutôt que comme une contrainte sans finalité particulière."

Réduction des coûts : le secteur public rattrape (un peu) son retard

Comme chaque année, la réduction des coûts est un objectif prioritaire pour une plus grande proportion de répondants issus du secteur privé que du secteur public : 76% contre 65%, soit une différence somme toute importante de 11 points. Cela dit, cette proportion progresse de manière substantielle dans le secteur public, avec une hausse de 7 points par rapport à l'an dernier, ce qui n'est pas neutre. Entre les réformes souhaitées par le gouvernement et les conséquences de l'action des "gilets jaunes" qui commençaient à se faire sentir au moment de l'étude, l'optimisation des achats publics va sans doute se révéler un levier essentiel pour l'équilibre des finances publiques, aussi bien pour les organisations relevant de l'Etat que pour les collectivités territoriales. "Les achats restent un des premiers leviers de l'équilibre des finances publiques", souligne Marc Sauvage, président du Conseil national des achats et directeur général adjoint de la région Ile-de-France en charge des achats, de la performance, de la commande publique et du juridique.

"La réduction des coûts est cruciale pour le ministère des Armées", témoigne Jean Bouverot, alors responsable ministériel des achats au ministère des Armées. "Mais n'oublions pas que le ministère consomme de l'argent public. Il se doit donc d'observer également d'autres paramètres que ceux qui conduisent les entreprises à l'accroissement de leur marge opérationnelle. Le ministère est fier d'intégrer dans ses objectifs de performance des clauses sociales et environnementales, des actions à destination des PME et de l'achat local favorisant le renfort du lien entre l'armée et la nation. Par exemple, pour des sujets d'apparence commune comme les fournitures de bureau, le ministère s'approvisionne localement auprès d'un groupement constitué de 18 PME autour d'un même catalogue."

Lire la suite en page 3: Les entreprises industrielles, davantage portées sur la réduction des coûts que des services


Les entreprises industrielles, davantage portées sur la réduction des coûts que des services

Si la réduction des coûts est un objectif prioritaire dans la plupart des organisations, une différence persiste entre l'industrie et les services. En effet, les entreprises industrielles sont davantage portées sur cet objectif que les entreprises de services. Ce résultat, qui se retrouve d'année en année, s'explique par le fait que les achats directs et/ou de production représentent un pourcentage du chiffre d'affaires plus important dans l'industrie. D'où une tension sur les prix qui reste, malgré tout, très présente dans un contexte de plus en plus internationalisé. C'est le cas, par exemple, de l'automobile où 86% des répondants appartenant à cette branche affirment que la réduction des coûts sera l'objectif prioritaire de leur direction des achats en 2019. Pour rappel, il est communément admis que les achats représentent l'équivalent de 75 à 95% du chiffre d'affaires dans les entreprises industrielles, et "seulement" 35 à 65% dans les entreprises de services.

Certaines branches de services contredisent cet état de fait, à l'image des entreprises évoluant dans l'univers de la communication et des médias (86% des répondants de ces sociétés considèrent la réduction des coûts comme l'objectif prioritaire). Mais sans doute davantage que pour d'autres secteurs, ces entreprises font face à une crise sans précédent et à une remise en cause de leur modèle économique, d'où la nécessité absolue de réduire leurs coûts. Une telle proportion de réponses ne se retrouve pas dans la banque, la finance et les assurances (58%), la mode et le luxe (45%), le conseil ou encore la formation (44%) par exemple.

Performance achats : la recherche d'économies comme principal indicateur

La réduction des coûts étant un objectif prioritaire pour trois-quarts des personnes interrogées, fort logiquement, la performance achats des organisations est évaluée principalement en fonction des économies réalisées pour 60% des répondants, un chiffre en hausse de 4 points par rapport à l'année dernière. La réactivité (10%) et la contribution au chiffre d'affaires (10%) complètent le podium, avec toutefois un score très faible. L'évaluation de la performance en termes d'innovation (3%), de RSE (2%) et de maîtrise des risques réputationnels (1%) apparaît totalement marginale.

"Nous mesurons le taux d'emprise des solutions référencées par catégorie, qui est un gage de qualité pour nos établissements", explique Arnaud Choulet, directeur des achats Groupe chez Korian."En parallèle, la rapidité et le niveau d'adhésion d'un réseau aux solutions référencées permettent aussi de mesurer l'adéquation entre les solutions négociées par les acheteurs et les besoins/attentes des établissements."

Résultat intéressant : il n'existe pas une différence substantielle entre les secteurs privé et public (respectivement 61% et 57%, soit 4 points d'écart). "Autrement dit", souligne Olivier Wajnsztok,"la fonction achats est bien perçue dans la sphère publique comme un contributeur aux objectifs d'économies et plus uniquement comme un service de commandes publiques chargé avant tout de faire respecter les règles des marchés publics."

Des acheteurs, très peu rétribués sur les économies d'achat

Le cost-killing pur et dur est révolu depuis longtemps : seules 5% des personnes interrogées déclarent bénéficier d'un bonus uniquement calculé sur les gains achats réalisés. Si 63% des acheteurs interrogés bénéficient d'un bonus (+4 points par rapport à 2018), ils sont 43% à déclarer percevoir des primes calculées à la fois sur des gains achats et sur d'autres critères non financiers. Rapportée à l'ensemble du panel, il s'agit donc d'une proportion importante et qui tend à prouver que les acheteurs ne sont pas uniquement motivés sur les gains achats au sein de leur organisation.

Bonus : une différence notable entre le secteur privé et le secteur public

"Comme chaque année, on note une différence notable entre le secteur privé et le secteur public, une immense majorité des acheteurs publics n'ayant pas de bonus (67%)", relève Olivier Wajnsztok. "Cela dit, ce chiffre enregistre une baisse significative (-7 points par rapport à 2018), ce qui va de pair avec une certaine maturation de la fonction au sein de la sphère publique. Désormais, 22% des acheteurs publics bénéficient d'un bonus calculé à la fois sur les gains achats et sur des critères non financiers, une proportion en hausse de plus de 9 points par rapport à l'an dernier."


 
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