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Contrôle par le juge du prix convenu dans les contrats commerciaux: le point avec un avocat

Publié par Aude Guesnon le - mis à jour à
Contrôle par le juge du prix convenu dans les contrats commerciaux: le point avec un avocat
© ©Krasimira Nevenova - stock.adobe.com

La décision prise par le Conseil constitutionnel, qui a validé qui validé le contrôle par le juge du prix convenu par les parties dans les contrats commerciaux impactera les relations fournisseurs/distributeur. Le point avec Hugues Villey-Desmeserets, expert en distribution et concurrence.

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Fin novembre, le Conseil Constitutionnel a publié une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC), qui valide le contrôle par le juge du prix convenu par les parties dans les contrats commerciaux. Cette décision impactera durablement les relations fournisseurs/distributeurs. En effet, le juge a désormais la possibilité de demander des éclaircissements et des modifications en cas de désaccord sur la justesse des prix, ainsi que sur le partage de la valeur entre les parties prenantes (fournisseur et distributeur).

La décision résulte d'un litige entre Carrefour et l'un de ses fournisseurs : un juge avait été sollicité faisant suite au constat d'un déséquilibre de certaines clauses du contrat-cadre de l'enseigne Carrefour. En conséquence, le droit de regard du juge aura un impact sur le cadre des négociations commerciales en 2019 ainsi que sur le rapport de force entre distributeurs et fournisseurs.

Quels sont les enjeux de cette QPC, quels sont les aspects de négociation commerciale concernés?

Le point avec Hugues Villey-Desmeserets, avocat associé du cabinet BCTG Avocats, expert en distribution et concurrence.

Quels sont les enjeux liés à cette Question Prioritaire de Constitutionnalité pour les négociations commerciales 2018-2019 ?

L'enjeu de cette QPC est essentiel pour les partenaires commerciaux car le prix convenu par les parties à l'issue de la négociation sera susceptible d'être contrôlé par le juge dans le cadre de l'analyse du déséquilibre significatif. Selon le Conseil constitutionnel, cette contrôlabilité du prix s'inscrit dans un objectif d'intérêt général lié au maintien de l'équilibre des rapports entre les partenaires commerciaux.

Dans quelle mesure le pouvoir judiciaire pourra-t-il s'immiscer dans les contrats commerciaux négociés librement entre les distributeurs et les fournisseurs ?

Le juge pourra, en effet, s'immiscer dans les contrats commerciaux dès qu'il sera saisi d'une demande de contrôle du prix convenu pour le bien ou le service vendu. Ce contrôle permettra le cas échéant de sanctionner un prix ne résultant pas d'une libre négociation tarifaire. Dans un tel cas, les modalités de la fixation du prix révèlent un abus d'un des cocontractants et caractérisant ainsi un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Pour se prémunir d'une telle situation, les parties devront s'assurer que les conditions de la détermination du prix respectent les principes de bonne foi et de loyauté qui gouvernent les relations contractuelles. Elles doivent s'assurer qu'elles peuvent prouver cet état de fait.

Quels sont les aspects de la négociation commerciale concernés ? Pourquoi la notion de "déséquilibre significatif" est-elle clef dans ce dossier ?

En 2008, la loi de modernisation de l'économie a instauré une nouvelle pratique commerciale restrictive de concurrence : la soumission ou la tentative de soumission à un "déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties" sanctionné par l'article L.442-6, I, 2° du code de commerce.

La notion de déséquilibre significatif reposait alors sur l'examen de clauses extérieures au prix convenu telles que par exemple les clauses sur les délais de paiement, le maintien de commandes aux conditions antérieures ou la déduction d'office de pénalités du montant de la facture pour en diminuer le prix.

Désormais, l'ensemble des aspects de la négociation commerciale sont concernés ; outre les clauses et pratiques initialement visées, cette QPC consacre l'élargissement de la notion de déséquilibre significatif en permettant au Juge d'examiner a posteriori le prix convenu à l'issue des négociations.

Les relations commerciales entre distributeur et fournisseur vont-elles évoluer ?

Cette décision s'inscrit dans une évolution plus globale des relations commerciales entre distributeur et fournisseur tendant à un meilleur partage de la valeur en encadrant les conditions de la fixation du prix convenu. En effet, la décision doit être analysée au regard de la récente promulgation de la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole (Egalim) et en particulier de l'ordonnance relative au relèvement du seuil de revente à perte et à l'encadrement des promotions.

Ces deux actualités démontrent la volonté tant du législateur que du juge de veiller à la justesse du prix1 en amont, par la transparence des négociations annuelles et (ii) en aval, au titre des pratiques restrictives de concurrence et notamment du déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties résultant de l'inadéquation du prix convenu.

 
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