[Immersion] Journée d'ouverture de l'Université des achats 2024
Le 18 juin a eu lieu la 9e édition des Universités des Achats sous le thème : "Innovation et souveraineté : la responsabilité des Achats". Au programme : tables rondes sur les évolutions du métier et sur la relation CEO/CPO, prise de parole de jeunes acheteurs et coups de gueule. Que faut-il en retenir ? La rédaction vous en a extrait la substantifique moelle. Digest.
Je m'abonneCEO & CPO : Le nouveau duo gagnant ?
Intervenants :
- Benoît Coquart, chief executive officer chez Legrand
- Benoît de Ruffray, Président-directeur général chez Eiffage
- Olivier Nicollin, Président-directeur général chez Nicomatic SA
Lire aussi : Directions achats - Où en êtes-vous sur les sujets de la RSE et de la création de valeur ?
- Natacha Tréhan, Maître de Conférences en Management des Achats Responsables / Directrice Master DESMA de Grenoble IAE-INP / Chercheur au CERAG à l'Université Grenoble Alpes
Quels faits saillants ?
Les intervenants s'accordent sur le fait que la fonction achat a pris une nouvelle dimension stratégique, essentielle à la transformation des entreprises. Les acheteurs doivent désormais comprendre la vision et les enjeux de l'entreprise pour être pertinents et contribuer à la résilience et à la compétitivité. L'inclusion est un enjeu majeur, avec, par exemple, des entreprises qui emploient des personnes en situation de handicap. Les acheteurs jouent un rôle crucial en favorisant les entreprises inclusives et en intégrant ces dimensions dans leurs pratiques.
La discussion se termine par une réflexion sur la terminologie. Si le terme "acheteur" peut sembler réducteur, l'importance est mise sur la prise de conscience de leur rôle stratégique élargi. Des termes comme "super-acheteur" ou "manager des ressources externes" pourraient mieux refléter leurs responsabilités actuelles.
Citation à retenir :
"Un sujet déterminant est le living wage. J'ai échangé avec le gérant d'une entreprise du CAC 40 qui souhaite implémenter le living wage auprès de ses plus grands fournisseurs. Celui-ci en a discuté avec son PDG qui était en accord avec l'idée mais a décidé de vérifier si, au niveau mondial, ils payaient leurs propres salariés au living wage. Cela signifie payer un salaire décent qui permet au travailleur et à sa famille de vivre, de se nourrir, se loger et mettre un peu d'argent de côté. Depuis 2024, la CSRD impose des critères d'achats en externe mais également en interne. Si une entreprise déclare qu'aujourd'hui tous ses employés sont payés au living wage et qu'en 2030, idéalement, tous ses fournisseurs directs le sont également, les acheteurs accompagnent donc les fournisseurs et travaillent dans une logique de coalition à plusieurs par secteur afin de faire évoluer les choses. Au-delà de la volonté d'innovation ou de décarbonation, la fonction achats va contribuer à réduire la pauvreté dans le monde."
Natacha Tréhan, Maître de Conférences en Management des Achats Responsables / Directrice Master DESMA de Grenoble IAE-INP / Chercheur au CERAG à l'Université Grenoble Alpes
Pour aller plus loin: Que pensent les CEO de la fonction achat ?
Moi, acheteur...
Intervenants :
- Vittorio Carosso, étudiant en master in management à ESCP Business School
- Louise Goldblatt, étudiante en master management des achats internationaux & innovation (MAI) à KEDGE Business School Étudiante
- Timothé Ba, étudiant en master 2 managements stratégiques des achats - DESMA de Grenoble IAE-INP à l'Université Grenoble Alpes IAE
Quels faits saillants ?
Trois jeunes acheteurs se sont succédé sur scène pour évoquer le futur de la fonction achats. Les trois appréhendent le monde des achats sur une tonalité prospectiviste avec beaucoup d'espoir de projets. Ceux-ci apportent leur vision du métier, marquée par les défis contemporains tels que la durabilité, l'innovation et la transformation numérique.
Pour Vittorio Carosso, le métier d'acheteur doit évoluer pour devenir un pilier de la durabilité et de la stabilité économique. Celui-ci souligne les défis mondiaux, comme l'urgence climatique et les crises géopolitiques, et insiste sur l'importance de créer des relations durables et éthiques avec les fournisseurs. Il conclut en citant Fiodor Dostoïevski : "La beauté sauvera le monde", afin d'illustrer l'importance des relations humaines dans la fonction achat.
Louise Goldblatt met l'accent sur la durabilité et le leadership. Louise cite Antonio Guterres pour rappeler que la durabilité est une nécessité. Celle-ci explique que 80% de l'empreinte carbone d'une entreprise provient de sa chaîne d'approvisionnement, plaçant ainsi les acheteurs en première ligne pour réduire ces émissions. Elle appelle à une collaboration étroite avec les fournisseurs pour atteindre des objectifs communs de durabilité et de transformation.
Timothée Ba, exprime sa vision pragmatique de la fonction achat. Il insiste sur le rôle stratégique des acheteurs dans la gestion des risques et la création de valeur. Timothée appelle à une approche proactive et stratégique, soulignant que la fonction achat doit évoluer constamment pour répondre aux défis économiques, environnementaux et réglementaires.
La Citation à retenir :
"Un bon acheteur n'achète pas uniquement pour son entreprise mais également pour ses fournisseurs."
Vittorio Carosso, étudiant master in management à ESCP Business School.
Le coup de gueule: "Faisons de la vraie collaboration!"
Intervenants :
- Stéphane de Saint Jean, senior vice president global purchasing chez Biomerieux
Quels faits saillants ?
Nouveauté des UDA, un acheteur s'est jeté avec brio dans l'exercice du billet d'humeur en live. Stéphane De Saint Jean a ainsi exprimé sa frustration face aux crises de services et d'approvisionnement, malgré de bons indicateurs de performance. Celui-ci souligne que les relations avec les fournisseurs manquent souvent de respect et de collaboration authentique. Selon ses dires, la performance achats ne doit pas se limiter aux métriques traditionnelles mais inclure la performance financière globale et l'impact client.
Le vice-président a insisté sur l'importance d'une vraie collaboration avec les fournisseurs et de revoir les mesures de performance pour qu'elles reflètent la réalité des interactions et leur impact sur l'entreprise. Celui-ci a également critiqué la superficialité des déclarations de collaboration qui ne se traduisent pas en actions concrètes sur le terrain.
Citation à retenir :
"Nous devons accompagner les équipes. Certaines sont présentes depuis très longtemps et sont talentueuses tout en faisant très bien leur travail. Cependant, la collaboration ne s'apprend pas avec des diaporamas. C'est une compétence qui a besoin d'être pratiquée. Il est nécessaire de bâtir des plans de progrès ainsi que des collaborations de crise. Faisons de la vraie collaboration." Stéphane De Saint Jean, senior vice president global purchasing chez Biomerieux
La fonction Achats est-elle pertinente et efficace ?
- Coline Pont, group chief procurement officer chez Axa
- Jean Bouverot, chef du service de l'achat, de l'innovation et de la logistique du ministère de l'intérieur au Ministère de l'Intérieur
- Thierry Sauvage, directeur du GIP CEI, Professeur HDR à L'ESLI, PhD Chercheur associé au LIRSA, CNAM Paris
- Sophie Macquet, directrice des achats groupe chez SPIE Operations
Quels faits saillants ?
Malgré le fait que les achats ne soient pas au centre de l'entreprise, ceux-ci jouent un rôle crucial dans la décarbonation. Les achats doivent fournir des produits au bon prix, au bon moment et au bon endroit, tout en intégrant des objectifs de durabilité. Cette double mission nécessite une vision stratégique et une adaptabilité aux nouvelles exigences écologiques.
La décarbonation est devenue une priorité dans de nombreuses entreprises, bien que le niveau de maturité varie. Les entreprises doivent constamment rappeler l'importance de la décarbonation pour rester stratégiques et pertinentes. Cela implique de former les équipes, d'attirer des talents et d'adopter des pratiques exemplaires. En plus de cela, les entreprises investissent dans la formation continue, en collaboration avec des écoles et des universités, pour attirer des talents bien formés et motivés. Les compétences recherchées incluent la maîtrise des fondamentaux techniques et des compétences relationnelles, telles que l'empathie et la capacité à collaborer avec les fournisseurs. L'achat public joue également un rôle important dans la décarbonation et l'inclusivité. Bien que soumis à des réglementations strictes, les acheteurs publics disposent de marges de manoeuvre pour orienter leurs achats vers des solutions durables et innovantes.
Citation à retenir :
"Le savoir-faire et la diversité des profils des acheteurs sont primordiaux. Nous avons toute une base de savoir-faire avec les écoles qui apprennent très bien toute la partie technique à nos jeunes acheteurs. Je dis à mes acheteurs et à ma fonction de sortir de leurs bureaux et d'aller voir les fournisseurs. La relation, c'est comprendre le business model de l'autre, ses objectifs, comment co-construire de la valeur. La transformation s'impose dans toutes les entreprises et il est nécessaire d'avoir une appétence au changement. Cela s'applique à toutes les fonctions et il est essentiel qu'une portion de la fonction n'ait pas peur de changer."
Sophie Macquet, directrice des achats groupe chez SPIE Operations
Pour aller plus loin: Quelle(s) évolution(s) pour la fonction achat ?