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Les nouveaux habits de la fonction achats

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Les nouveaux habits de la fonction achats

Tandis que les chasseurs de coûts perdent du terrain, le directeur des achats devient un partenaire de confiance capable de générer de la valeur ajoutée et de prendre part à la stratégie globale de l'entreprise.

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"Le rôle du directeur des achats est déterminant et a une véritable incidence sur la performance ­globale de l'entreprise, déclarait Annette Clayton, directrice générale des opérations industrielles de Schneider Electric, en commentant la récente ­nomination de D.K. Singh comme directeur des achats du groupe. Nous nous réjouissons des perspectives qui s'ouvrent à nous et qui vont permettre de renforcer notre position concurrentielle sur les ­marchés que nous ­desservons. Nous allons continuer de nous appuyer sur les fondations déjà en place, afin d'adapter notre chaîne ­d'approvisionnement aux besoins de nos clients et de ­renforcer notre stratégie d'achat. Nous allons également nous appuyer sur notre écosystème des fournisseurs, puisque ces derniers nous aident à valoriser notre engagement vis-à-vis de nos clients." Une ­déclaration qui illustre à quel point la fonction achats a évolué au cours des ­dernières années, ainsi que la reconnaissance qu'elle a acquise.

Cap sur la compétitivité

La gestion des achats résulte d'un processus qui englobe, entre autres, l'écoute des besoins des clients internes, l'analyse des offres des fournisseurs, la ­négociation ou encore la gestion des risques. Désormais, les acheteurs ne veulent plus être assimilés à des chasseurs de coûts, mais entendent jouer un rôle-clé dans la ­compétitivité de l'entreprise. Un vrai virage ­stratégique.

Plusieurs enquêtes et rapports confirment cette tendance. La 4e édition de l'étude annuelle mondiale, publiée par Deloitte en avril 2015(1), révèle ainsi que près de 50% des directeurs des achats sont ­parties prenantes à la croissance de leur entreprise, en ­participant notamment à des ­opérations de ­fusions-acqui­sitions et en recherchant des innovations auprès des fournisseurs, afin de développer de nouveaux produits.

Les conclusions du rapport "Futurebuy: The Future of Procurement 25 in 25"(2) vont dans le même sens. KPMG International a interrogé 25 dirigeants et cadres supérieurs en leur posant trois questions: à quoi ressemblera la fonction achat en 2025 ? Comment cette évolution va-t-elle s'opérer ? Quels sont les facteurs de succès essentiels nécessaires à la réalisation de cette mutation ? S'il ­ressort que les achats resteront assimilés aux politiques de réduction des coûts, cette mission-là doit également permettre d'apporter de la valeur et pas ­seulement de tailler dans les dépenses dans une optique comptable.

(1) L'enquête de Deloitte, effectuée auprès d'un panel de 239 directeurs des achats et directeurs généraux de 25 pays, met en lumière les priorités de la profession pour les mois à venir.

(2) Les secteurs représentés dans cette étude recouvrent les produits de consommation (Nike, Ralph Lauren), ainsi que les services inhérents à la finance (American Express, Barclays, etc.), à la santé (Merck, Novartis, etc.), à l'industriel (Caterpillar, Dupont, etc.), à l'énergie (BP, Shell, etc.) et aux nouvelles technologies (Lenovo, Nokia, etc.).

>> Lire la suite en page 2.

Des compétences élargies

Cette évolution de la fonction, identifiée par KPMG International, nécessitera des adaptations et des investissements afin d'identifier de nouvelles compétences. Dans son étude, Deloitte ne dit pas autre chose: 57% des directeurs des achats estiment que leur périmètre doit être élargi et renforcé, notamment au niveau des "soft skills" - autrement dit les qualités humaines et relationnelles - que sont le leadership, l'aptitude à influencer, la communication ou encore la capacité de construire un réseau de relations.

Ils ­souhaitent ­également muscler leurs compétences, au niveau du sourcing de l'innovation. "L'acheteur doit travailler dans un esprit de start-up et d'entrepreneur, explique Magali Testard, associée conseil responsable achats et supply chain chez Deloitte. Il doit être capable de fédérer, afin de devenir un partenaire privilégié des autres directions."

À cet égard, l'un des axes mentionnés dans le rapport de KPMG est la prise en charge par l'acheteur de l'analyse financière. Considéré comme celui qui conduit et applique la politique de réduction des coûts, il va devoir dépasser ce rôle et collaborer plus directement avec le Daf. Grâce à des données fiables, il peut en effet analyser des approches alternatives et jouer sur des effets de leviers, tels que les événements survenus sur le marché des capitaux ou le coût total de possession. Disposant de plusieurs cordes à son arc, l'acheteur voit donc son domaine d'intervention s'élargir. Exit le cost killer, place au business partner. Grâce à sa vision transversale de l'entreprise et de ses ­problématiques opérationnelles, il peut faire bénéficier d'autres départements de sa connaissance du marché.

Exit le cost killer, place au business partner.

Selon Deloitte, "la contribution des directeurs des achats à la stratégie progresse d'année en année, ils interviennent dorénavant à de multiples niveaux de la chaîne de valeur". D'ailleurs, leur collaboration avec d'autres services tend à s'intensifier, puisque 97% des sondés déclarent travailler activement avec le directeur financier, 92 % avec le directeur général et 73 % avec les directeurs de l'information et d'exploitation.

En outre, l'open innovation offre à l'acheteur un nouveau "terrain de jeu". Il pilote ses activités via un réseau mondialisé d'experts capables de "sourcer" les chaînes d'approvisionnement (tendances du marché, écosystème réglementaire, solvabilité des fournisseurs, prévisions de prix de base, etc.) et de puiser dans les opportunités proposées par le crowdsourcing. Pas moins de 65% des directeurs des achats interrogés par Deloitte déclarent investir dans des solutions de plus en plus collaboratives, en interne et en externe, avec les fournisseurs. Mais s'ils sont près des deux tiers à utiliser des portails dédiés aux fournisseurs, ­seulement 17% travaillent avec des partenaires pour les mettre en oeuvre. Quant aux réseaux sociaux, ­seulement 6% des directions des achats disent s'y intéresser.

Pour Deloitte, une nouvelle approche de l'acquisition des technologies est nécessaire afin d'augmenter la valeur des prestations d'achat, tandis que le rapport proposé par KPMG prévoit, quant à lui, l'amélioration des données prédictives et la montée en puissance de la business intelligence au sein des achats.

Secteur public: une fonction qui se professionnalise

Selon une enquête menée par l'Ugap, en partenariat avec Décision Achats, au 3e trimestre 2015, la professionnalisation des achats dans le secteur public est une réalité partagée par 65% des personnes interrogées. En outre, 34 % affirment travailler au sein de directions des achats identifiées comme telles. Par contre, si le service achats a bien été créé, il semble qu'il ait encore du mal à s'inscrire dans une stratégie bien définie.

Enfin, les entreprises du secteur public auraient tendance à externaliser une partie de leurs achats. Sébastien Taupiac, directeur délégué à l'innovation à l'Ugap, constate à ce propos qu'en France, "la tendance est à la mutualisation, via des structures dédiées qui sont plus nombreuses sur le marché, notamment avec la création de centrales régionales d'achats".

>> Lire la suite en page 3.

Un écosystème en mutation

La perception du risque est en forte hausse. Environ 25% des directeurs interrogés par Deloitte se sentent concernés par les risques géopolitiques, alors qu'ils étaient seulement 7 % en 2013. Une situation qui ne devrait pas s'améliorer après l'état d'urgence décrété en France à la suite des attentats du 13 novembre et à un contexte international plus que tendu de ce point de vue.

Concernant la gestion des risques, la première inquiétude des acheteurs se situe au niveau des ­approvisionnements en matières premières et de la dépendance économique. La reconfiguration des ­relations avec les fournisseurs semble s'imposer et se traduit notamment par l'apparition de dispositifs ­innovants, qui vont au-delà de la simple collaboration commerciale. "Si la réduction des coûts reste stratégique, elle n'est plus l'unique objectif des acheteurs. La ­participation à la croissance de l'entreprise, la gestion de la conformité, le recrutement de nouveaux talents, ­l'instauration d'un cadre relationnel innovant avec les ­fournisseurs et la gestion des risques constituent des enjeux tout aussi essentiels", synthétise Magali Testard.

Tout un écosystème est en train de se mettre en place et doit conduire les directeurs des achats à prendre part à la stratégie globale de leur entreprise. Mais cette immixtion sur de nouveaux territoires n'est pas sans impact sur l'organisation de leur service. Les achats risquent fort de devoir modifier leur façon d'opérer, en différenciant notamment leurs ­activités (stratégiques, transactionnelles, etc.). Une des solutions consiste à externaliser une partie des tâches, telles que la gestion des commandes fournisseurs (purchase to pay) ou de certaines catégories d'achats généraux.

50%

C'est le pourcentage de directeurs achats qui déclarent participer à la croissance de leur entreprise, en intervenant notamment sur des opérations de fusions-acquisitions et en recherchant des innovations auprès des fournisseurs.

>> Pour aller plus loin, découvrez l'analyse de Gordon Crichton, patron du MAI (Master Achats Internationaux et Innovation), sur l'évolution du métier d'acheteur.

 
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