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[Tribune] Comment les directions achat se positionneront au coeur de l'activité

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[Tribune] Comment les directions achat se positionneront au coeur de l'activité

La conformité, le big data, la relation fournisseur sont les moyens techniques du moment qui permettent aux achats de grandir. Pour réussir, ils pourront être mobilisés lorsque la culture managériale de l'entreprise sera mature et prête à accepter de placer les achats au coeur de son activité.

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Suite à une tribune intitulée - "Pourquoi les directions achat ne sont-elles pas encore au coeur de l'activité ?", publiée sur le site de Décision Achats par Luc Agopian (Cap Gemini Consulting), Philippe Demangeot, directeur des achats de TNT France, a souhaité apporté son point de vue:

Lire la tribune "Pourquoi Pourquoi les directions achat ne sont-elles pas encore au coeur de l'activité ? Cliquer ici

Voici un article très intéressant qui mérite de s'y arrêter. A cela plusieurs raisons. D'abord bien sûr une prise de parole de Cap Gémini sur les achats a de l'importance, la société de conseil bénéficiant d'une vraie compétence sur le sujet. On se rappellera entre autre l'étude particulièrement pertinente publiée en 2012 sur le parcours professionnel des directeurs des achats, voir le site Web du cabinet. Ensuite les trois arguments développés pour répondre à cette question fondamentale pour tout professionnel des achats un tant soit peu impliqué dans l'évolution de notre métier méritent de s'y arrêter, afin de s'interroger sur deux aspects, sont-ils corrects pour répondre à la question posée par Luc Agopian, mais surtout sont-ils... suffisants ?

De la justesse des trois enjeux proposés

La gestion de la conformité (la "compliance" chère à mes amis directeurs des achats de groupes internationaux) est aujourd'hui sur les devants de la scène. SOX, IFRS, Bâle 3, Solvabilité 2, tests du Contrôle Interne etc... parleront ainsi à beaucoup. Certes, il s'agit de leviers utiles aux achats pour gagner en légitimité mais qui tendent davantage à développer une fonction achats régalienne dont la limite bureaucratique commence à être franchie. C'est donc un levier parfois utile dans des environnements achats complètement immatures ou fortement réglementés mais pas au coeur du business.

Le big data est le sujet du moment. Lisez la presse achats ou ce qui circule sur les réseaux sociaux, mais quel impact sur les achats ? Qui se souvient qu'il y a 20 ans, dans un groupe leader du CAC 40 comme ailleurs, les acheteurs de différentes filiales en France échangeaient, lorsqu'ils le voulaient bien, des informations en s'envoyant par recommandé des disquettes avec des fichiers illisibles par les destinataires (Lotus 123, Excel, Framework, etc...) ou par fax ? Vous imaginez le résultat ? Aujourd'hui, la gouvernance achats est clarifiée, les systèmes d'information achats sont là et seuls ceux qui ne veulent pas n'ont pas déjà monté des organisations globales de category management. L'information n'est plus un frein à la montée en puissance des achats si le management le veut et consacre 5 minutes au business case proposé par le directeur des achats. Dans de nombreuses organisations achats, le big data aux achats est déjà consommé.

La relation fournisseurs est enfin le point de loin le plus important et le plus juste des trois proposés. Le rappel de notions telles que celles du capital immatériel des entreprises, du pilotage de l'entreprise étendue étayeront la force du propos. Et pourtant, il reste de nombreuses forteresses internes qui nuisent à la pacification de ces relations, s'expliquant par les relations intuitue personae, les habitudes de dirigeants, le manque de crédibilité accordée aux acheteurs, et bien d'autres, sans oublier bien sûr dans de nombreux secteurs l'excellent travail de sape des forces de vente !

Lire la suite en page 2 : Les autres hypothèses à explorer...


Nous devons explorer d'autres hypothèses

Revenons donc à la question, "Pourquoi les directions achat ne sont-elles pas encore au coeur de l'activité ?". Avons-nous donc une réponse satisfaisante ? Non. Devons-nous explorer d'autres hypothèses ? Oui. En voici donc quelques-unes, proposées en toute modestie, et certainement incomplètes.

Quand le dirigeant s'intéresse-t-il à ses achats ? L'histoire de la fonction achats, depuis sa première description au 19e siècle au moment de la construction du réseau ferroviaire aux Etats-Unis jusqu'à aujourd'hui est d'une banale simplicité. Le dirigeant s'intéresse à cette fonction lorsque les profits baissent et que la concurrence l'empêche de rétablir la situation sur les marchés avals de l'entreprise. Il est alors temps de regarder vers l'amont. Depuis 40 ans en France, nous l'avons ainsi observé depuis l'automobile puis le reste de l'activité manufacturière et vers l'industrie des biens de consommations dans les années 90, avec une accélération dans les années 2000 en réaction aux crises économiques, d'abord dans les services aux entreprises, puis le secteur financier et plus récemment celui des mutuelles, de la communication, et bien sûr des organismes publics. Il s'agit donc d'une posture défensive, orientée réduction des coûts. Par essence ce n'est pas le coeur de l'activité.

Or cette vision "court-termiste" tire ses sources dans la culture managériale dominante. La majorité des dirigeants des grandes structures ont été formés dans les années 80, voire pour les plus anciens à la fin des 30 glorieuses. Selon les entreprises et leurs enjeux, ils sont issus de filières financières, marketing, techniques ou des grands corps de l'Etat (Conseil d'Etat, Inspection des Finances etc ...). Qu'enseignait-on à l'époque dans les grandes écoles au sujet des achats ? Rien. Ou sinon que la fonction achats approvisionnement était au mieux une fonction support (comme présenté en 1983 par Peter Kraljic, pourtant un des théoriciens des achats les plus connus).

Cette vision des achats, fonction support au service de clients internes, reste dominante et assujetti les acheteurs à un objectif de satisfaction interne au détriment de l'approche Business partner, car le support et la vision politique fait défaut. Nombre de dirigeants n'ont pas encore perçu tout le potentiel de valeur ajoutée, et sont restés sur cette vision de fonction support qui les conduit à devoir arbitrer ce qu'ils imaginent être des conflits de territoires entre leurs managers, malheureusement non alignés, et éloignant les attentions du coeur de l'activité de l'entreprise.

Avec le départ en retraite des baby boomers, la génération de managers va se renouveler rapidement maintenant. On peut donc anticiper une révolution culturelle quand on voit la place des achats dans les formations, qu'il s'agisse des modules dédiés dans les formations généralistes et les Executive MBA, ou bien les masters spécialisés des grandes écoles. Par exemple les "3 parisiennes" ont chacune leur cursus achats et l'excellence des formations publiques est reconnue (la meilleure formation achats B+5 française est d'ailleurs celle de l'IAE de Grenoble, le DESMA). Cela aura un double effet: une meilleure considération de la puissance du levier achats par les dirigeants et une progression de la qualité des professionnels des achats, mieux formés, plus ambitieux, ce qui leur permettra de franchir le plafond de verre de la relation partenariale avec les membres du Comex, et de gagner la même part de voix auprès du directeur général puis ensuite de concurrencer ses collègues au moment de la succession !

On l'aura donc compris. La conformité, le big data, la relation fournisseur sont les moyens techniques du moment qui permettent aux fonctions achats de grandir. Pour réussir et maximiser les bénéfices attendus ces moyens pourront être mobilisés lorsque la culture managériale de l'entreprise sera mature et prête à accepter de placer les achats au coeur de son activité. Dirigeants, n'ayez pas peur, vous réussirez grâce aux achats !

Par Philippe Demangeot, directeur achats de TNT France


 
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