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[Tribune 2/3] Clauses limitatives de responsabilité : de l'importance de l'objet du contrat

Publié par le | Mis à jour le
[Tribune 2/3] Clauses limitatives de responsabilité : de l'importance de l'objet du contrat
© Milenko Ðilas

Le régime des clauses limitatives de responsabilité a tellement été commenté que chacun, acheteur ou fournisseur, croit en connaître toutes les subtilités et a développé une stratégie pour y échapper ou les imposer. Voici quelques conseils aux acheteurs.

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Le régime des clauses limitatives de responsabilité a tellement été commenté que chacun, acheteur ou fournisseur, croit en connaître toutes les subtilités et a développé une stratégie pour y échapper ou les imposer. Peu ont en revanche pu mesurer l'efficacité réelle de leurs clauses lorsqu'elles sont appréciées par le juge. Quelques conseils aux acheteurs par un praticien des tribunaux pour ne pas céder plus qu'ils ne pensent avoir donné.


L'objet du contrat : tout le contrat mais rien que le contrat

La Palisse ne l'eut pas mieux dit : on n'est responsable que de ce qui nous est confié. La responsabilité " contractuelle " ne peut être engagée que si la prestation ou la fourniture est entrée dans le périmètre du contrat.

Un article est souvent négligé dans les contrats, mais il a pourtant une importante fondamentale : l'objet du contrat. Contrairement à une idée bien reçue, " l'objet du contrat " ne porte pas sur le document matériel qui doit être signé mais sur la nature et le périmètre de la prestation confiée. Il est utilisé par le juge pour comprendre ce que le fournisseur s'est engagé à faire en contrepartie de la rémunération qui doit lui être versée.

Ne survolez pas le choix de dénomination du contrat

" L'objet du contrat " ayant une valeur contractuelle supérieure aux offres commerciales qui ont été établies par le fournisseur avant la signature du contrat, c'est à l'occasion de la rédaction de cet article que le fournisseur avisé limitera souvent le champ des prestations offertes et donc de ses responsabilités. Il peut agir sur la dénomination du contrat (" contrat de vente " plutôt que de " contrat de prestations de services " ou " contrat d'entreprise ").

En effet, dans un contrat de vente, le vendeur n'est responsable que de livrer un produit conforme à la commande ; l'acheteur est lui responsable de l'adéquation entre le besoin exprimé et le produit commandé. A l'inverse, dans un contrat de prestation de service ou contrat d'entreprise (contrairement à une idée reçue, les deux termes sont synonymes même si l'usage réserve le nom " contrat d'entreprise " au seul secteur du bâtiment), c'est le prestataire qui est responsable de l'adéquation du produit (matériel ou immatériel) aux besoins exprimés. Aussi, le " fournisseur " (ce terme est générique et peut donc être indifféremment utilisé dans un contrat de vente ou dans un contrat de prestation de service) qui aura conseillé son client sur le produit ou la prestation à acquérir pour répondre à un besoin bien défini aura tout intérêt à établir un devis excessivement succinct dans lequel ne figurera que la référence du produit et le prix puis, au moment de la rédaction du contrat final, de dénommer celui-ci " contrat de vente " pour échapper à toute responsabilité tirée d'un défaut d'adéquation entre le besoin du client et le produit livré.

Pensez à bien décrire la prestation à réaliser dans l'objet du contrat

Les assureurs le savent : le risque de défaut sur un produit naît majoritairement au moment de quelques étapes bien précises : sa conception, l'exécution de certains de ses composants par des sous-traitants, son transport et son déchargement et sa mise en service. Ecarter tout ou partie de ces postes au moment de la rédaction finale du contrat permet au fournisseur de limiter efficacement sa responsabilité.

La conception et la réalisation du produit ne pouvant que difficilement être écartées du périmètre de ses obligations, c'est naturellement sur les opérations de déchargement et de manutention sur le site et sur les opérations de mise en service ou d'intégration dans un système que le fournisseur va trouver une possibilité de réduire son risque. Les moyens pour y parvenir sont connus : la crainte marquée par les entreprises de laisser pénétrer en leur sein des fournisseurs, pour des raisons de confidentialité ou de sécurité, les incite souvent à préférer réaliser les opérations de déchargement et de manutention ; il suffit pour le fournisseur, dans le découpage de son offre, de proposer des prix supérieurs au marché pour la réalisation de ces opérations pour que le client préfère y renoncer.

Il en est de même pour l'intégration et la mise en service d'un équipement, ou l'intégration d'un nouveau logiciel dans un système informatique complexe. Or, plus un système est complexe et plus il sera difficile, en cas de difficulté, de définir précisément l'origine du désordre. Les règles de la responsabilité mettant à la charge de la victime l'obligation de démontrer le lien existant entre le désordre et l'intervention d'un prestataire précis, le fournisseur intelligent aura ainsi subtilement utilisé l'adage bien connu au sein des tribunaux : pas de preuve, pas de droit. L'acheteur prudent appliquera donc le même adage lors de la rédaction du contrat.


Maître Xavier Marchand est associé fondateur du cabinet d'avocats Carakters, cabinet d'affaires dédié à la gestion des projets de R&D technologiques et industriels.




 
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