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Pricing : comment les achats contribuent-ils à la décision finale ?

Publié par Audrey Fréel le - mis à jour à
Pricing : comment les achats contribuent-ils à la décision finale ?

Garants des relations avec les partenaires extérieurs, les achats jouent un rôle important dans la définition du prix des produits vendus aux consommateurs. Une position d'autant plus stratégique, dans un contexte d'évolution des besoins des consommateurs et de pénurie des matières premières.

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Fixer le juste prix d'un produit n'est pas chose aisée. Toute la difficulté est de trouver le meilleur équilibre entre le tarif qui valorisera le produit et permettra au groupe de faire de la marge et celui qui incitera le consommateur à sauter le pas. Si cette étape incombe aux équipes en charge du pricing et du contrôle de gestion, les achats peuvent apporter leur pierre à l'édifice. "Si un service achat est performant, les prix de vente seront plus intéressants pour le consommateur", explique David Sagalowicz, directeur des achats du groupe Arc, spécialisé dans la fabrication d'articles en verre pour la table (propriétaire des marques Luminarc, Cristal d'Arques ou encore Arcopal).

L'importance des critères ESG

A titre d'exemple, la mise en place d'une politique d'achats responsables peut permettre de répondre aux besoins des clients, tout en proposant le prix le plus juste. Un enjeu de taille, notamment dans l'industrie agroalimentaire puisque les consommateurs veulent désormais manger sain et local. "Cela se retranscrit sur nos pratiques achats qui sont davantage orientées sur la qualité des produits en termes d'agriculture durable, de bien-être animal et d'approvisionnement local", constate Isabelle Bailly, directrice des achats, supply chain, IT & digitalisation de Panzani. De fait, le groupe achète désormais du blé dur (utilisé pour fabriquer des pâtes et de la semoule) uniquement cultivé en France.

De même, depuis quatre ans, Panzani s'approvisionne auprès d'éleveurs français pour ses viandes utilisées dans les sauces bolognaises. "Toute la difficulté a été de réussir à changer de sourcing, tout en minimisant les coûts associés et les risques de rupture d'approvisionnement, puisque les marchés fournisseurs sont réduits", souligne Isabelle Bailly. Un choix qui a entraîné inévitablement des surcoûts. "Cela s'est traduit par une hausse des prix et il a été nécessaire de convaincre les grands distributeurs de payer ces surcoûts", indique Isabelle Bailly.

En effet, les consommateurs ne sont pas forcément prêts à mettre le prix pour consommer mieux et la grande distribution a donc tendance à tirer les prix vers le bas. De même, la direction des achats d'Arc travaille sur la relocalisation de certains produits, notamment les couvercles en plastiques utilisés dans les boîtes de conservation en verre. "Nous achetons désormais une bonne partie de ces accessoires en France, alors que nous nous approvisionnions jusqu'ici en Chine. Il est important pour notre image de proposer autant que possible du made in France, mais également vis-à-vis de notre politique RSE. Notre empreinte carbone est considérablement réduite grâce à ce nouveau sourcing", raconte David Sagalowicz. Dans ce cas, s'approvisionner à un niveau plus local permet également de réduire les risques de rupture d'approvisionnement et de réaliser des économies. "Le coût facial de ces couvercles fabriqués en France est moins élevé car l'outil de production de notre fournisseur est très performant et automatisé, ce qui lui permet de rivaliser avec la Chine. Les coûts liés aux transports sont également bien plus faibles", commente David Sagalowicz. Résultat : ce changement de sourcing a permis de mieux répondre aux attentes du consommateur sans impacter le prix final du produit.

Les pénuries entraînent une hausse des prix

Garant du management des ressources externes, l'acheteur peut également remonter des données stratégiques. "Les achats peuvent délivrer des informations intéressantes aux équipes de pricing car ils ont une visibilité sur les stocks et la situation des fournisseurs", note Damien Robert, chief solution and delivery chez Pricemoov, société qui édite une solution pour gérer et optimiser les prix. Ce lien entre l'interne et l'externe est d'autant plus important dans un contexte de pénurie sur les matières premières, qui touchent de nombreuses entreprises. A l'instar du groupe Schmidt, qui fabrique et commercialise des meubles de cuisine et de salle de bain.

"Après la sortie du premier confinement, nous avons été très vite confrontés à une pénurie de matières premières mais nos fournisseurs ont été présents et ont continué à nous approvisionner car nous les avions épaulés durant la crise", détaille Laurent Belloni, directeur achats et supply chain du groupe Schmidt. Cette stratégie de partenariat à long terme initiée par les achats a permis à l'entreprise de ne pas augmenter, dans un premier temps, les prix finaux de ses produits. Mais en 2021, la hausse des prix des matières premières se poursuit et s'intensifie. Le marché fait face à de grosses tensions, notamment pour les panneaux de particules et la quincaillerie technique. "Nous avons fait le choix d'augmenter nos prix de vente à nos réseaux de distribution à la hauteur des hausses matières uniquement, ce qui s'est traduit par une faible augmentation des prix pour le consommateur", confie Laurent Belloni.

La direction des achats d'Arc est également confrontée à une hausse des prix sur certaines matières premières essentielles à la fabrication du verre comme la soude, le sable ou encore le calcaire. "Au cours des derniers mois, le prix des matières premières a progressé de 30 à 35 %, ce qui génère une très forte concurrence à l'achat. De même, les prix de l'énergie sont en forte augmentation. Cela nous oblige à retranscrire une partie de ces hausses sur nos prix finaux", informe David Sagalowicz. Même constat dans l'industrie automobile, sévèrement touchée par la crise inflationniste.

"Les prix de l'énergie, de la logistique, des matières premières et plus récemment des semi-conducteurs, subissent de fortes hausses depuis un an. Lorsque ces augmentations dépassent ce que nous pouvons absorber dans nos coûts, nous sommes contraints de répercuter ces hausses sur le prix final de la voiture", indique Louis Schmidtlin, directeur Costing & Controlling chez Renault-Nissan Alliance. Dans ce secteur, le prix de vente est très corrélé aux achats. "Les achats représentent environ trois quarts du coût de la voiture en sortie d'usine", confirme Louis Schmidtlin.

Travailler main dans la main

Compte tenu des montants en jeu, la direction Costing & Controling de Renault-Nissan Alliance collabore étroitement avec les achats. "Nous travaillons avec la direction des achats sur ces inflations afin de ne pas faire subir aux clients des hausses injustifiées, d'autant plus que nous évoluons dans une industrie très concurrentielle", explique Louis Schmidtlin. Des propos corroborés par Damien Robert. "Alors que les équipes achats et pricing ne collaboraient pas forcément ensemble, le contexte actuel les amène à travailler main dans la main en permanence", remarque-t-il. La direction Costing & Controling de Renault-Nissan Alliance met notamment à disposition des acheteurs, mais également de leurs fournisseurs, des outils d'analyse et de contrôle des coûts. "Nous pouvons, par exemple, chercher des solutions avec certains fournisseurs pour optimiser leurs coûts", informe Louis Schmidtlin.

De même, la direction des achats de Panzani collabore de façon étroite avec la direction commerciale. "Nous intervenons parfois, aux côtés des forces de vente, dans les négociations avec les grands distributeurs pour témoigner sur l'évolution des marchés et la situation de certains fournisseurs", relate Isabelle Bailly. Même constat du côté de la direction des achats du groupe Arc. "Nous pouvons être impliqués dans les discussions avec nos distributeurs pour aider les commerciaux à expliquer la situation de certains marchés ou fournisseur", précise David Sagalowicz. Comme le dit l'adage, l'union fait la force.

Augmenter la valeur d'un produit

Créateur de valeur pour l'entreprise, l'acheteur peut être amené à travailler sur l'amélioration d'un produit. Ce qui peut se traduire, in fine, par une hausse du prix de vente au consommateur.

"L'acheteur contribue de plus en plus à donner de la valeur à un produit, à travers, par exemple, l'innovation, la visibilité du produit, l'économie circulaire ou encore la réduction d'émissions de carbone", souligne Dominique Lebigot, directeur des achats de Moët Hennessy, qui constitue la branche Vins & Spiritueux du groupe LVMH. A titre d'exemple, l'équipe développement packaging de la direction des achats de Moët Hennessy a initié et réalisé la mise au point d'un nouvel étui "seconde peau" pour le champagne Ruinart. Lancé en 2020, ce packaging est constitué de fibres naturelles de bois et est 100% recyclable. "Poussée par les achats, cette innovation disruptive a permis d'augmenter la valeur du produit en proposant un étui très esthétique et écoresponsable", indique Dominique Lebigot.


 
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