"La baisse du cours des matières premières et en particulier du pétrole est plutôt une bonne nouvelle"
À retrouver chaque lundi matin sur le site de Décision Achats, un point sur les achats de matières premières avec une interview exclusive d'Olivier Lechevalier, cofondateur de DeftHedge.
Je m'abonneQu'observe-t-on sur les marchés ?
Une grande partie de la hausse de début d'année des matières premières (en particulier des métaux industriels) était liée aux anticipations de fort rebond économique de la Chine. Malheureusement, les dernières statistiques chinoises ne vont pas dans ce sens. Le secteur des exportations se tient bien, essentiellement grâce à des subventions de la part des gouvernements locaux et une politique de baisse du CNH. Mais la demande est toujours à la traîne, comme en témoigne la forte contraction des importations au mois d'avril. Cela a entraîné un ajustement des prix sur beaucoup de matières premières. Un autre facteur joue sur le marché pétrolier. Il y a bien-sûr un problème au niveau de la demande - celle en provenance de Chine est loin des prévisions. Mais il y a aussi un problème au niveau de l'offre. Il y a une augmentation inattendue de la production de la part de plusieurs pays membres de l'OPEP soumis à des sanctions occidentales. C'est le cas de la Russie, de l'Iran et du Venezuela. Autrement dit, le marché noir est en plein boom. La production de l'Iran a par exemple atteint un plus haut de quatre ans en avril tandis que le Venezuela va donner de nouvelles licences à des entreprises pétrolières étrangères pour booster sa production encore davantage. Ce sont des éléments qui poussent structurellement les prix à la baisse.
Quelles conséquences pour les entreprises ?
Les entreprises sont confrontées à un environnement économique plus incertain qu'il y a quelques mois de cela. Mais tout n'est pas négatif. La baisse du cours des matières premières et en particulier du pétrole est plutôt une bonne nouvelle. Rappelons-nous qu'en début d'année les analystes prévoyaient un baril à 100 dollars. Cela aurait fragilisé beaucoup de segments économiques, et pas seulement l'aviation commerciale. Cela aurait été également inflationniste dans un contexte plutôt défavorable. La correction en cours sur les matières premières, qui a de grandes chances de perdurer tant qu'il n'y aura pas de signaux évidents de renforcement de la reprise chinoise, est plutôt positive pour les acteurs économiques.
Quels sont selon vous les points de vigilance à surveiller ?
La Chine va certainement prendre de nouvelles mesures pour pallier la dynamique économique morose. Le marché s'attend à ce que la banque centrale baisse le taux de réserve obligatoire des banques, ce qui a pour effet mécanique d'injecter de la liquidité dans le circuit financier qui va permettre souvent de faire du crédit. Par le passé, cela a fonctionné. Cela fonctionnera de nouveau. En revanche, il y aura un décalage temporel de plusieurs mois avant que l'injection de liquidités ne se traduise par une augmentation de l'activité économique. Dit autrement, un baril de pétrole à 100 dollars, ce n'est pas pour tout de suite. Et c'est tant mieux !