Recherche
Mag Décision Achats
S'abonner à la newsletter S'abonner au magazine
En ce moment En ce moment

Réhumanisez votre relation avec vos fournisseurs

Publié par le - mis à jour à
Réhumanisez votre relation avec vos fournisseurs

Alors qu'une négociation réussie aboutit à un accord gagnant-gagnant entre les clients et leurs fournisseurs, il semble que le sourcing soit entravé par des difficultés récurrentes.

Je m'abonne
  • Imprimer

Selon l'enquête du cabinet conseil AgileBuyer et le groupement achats & supply chain de HEC(1), la relation avec les fournisseurs s'invite une nouvelle fois parmi les priorités des services achats, qui évoquent des rapports biaisés par des comportements répréhensibles.

Ainsi, 25% des directeurs des achats déclarent avoir été confrontés à une tentative de corruption, dans un contexte où 74% des professionnels en lien avec les départements concernés indiquent avoir signé une charte anticorruption. Si ces documents engagent tout de même l'honneur de ceux qui les paraphent et contribuent à faire évoluer les mentalités, ils ne protègent pas contre des comportements peu éthiques. Les fournisseurs qui s'adonnent à ces pratiques semblent diriger leurs malversations principalement vers les donneurs d'ordre, afin de maximiser le retour sur investissement.

Néanmoins, ceux qui occupent des fonctions opérationnelles subissent, eux aussi, des tentatives de corruption. Dans ce cas, les attaques ciblent plutôt les personnels aux revenus plus modestes, considérés sans doute comme étant plus vulnérables. Dans le cadre de leurs missions, ces acheteurs sont régulièrement amenés à analyser les offres des fournisseurs. Ils peuvent être tentés de ­privilégier telle ou telle entreprise, en toute discrétion, ou de délivrer des informations à celles qui se montreraient "généreuses".

La ­préoccupation du moment reste la réduction des coûts, puisque des 77% des personnes interrogées dans le cadre de l'étude précédemment citée en ont fait un objectif en 2015, soit la même proportion qu'en 2014.

Moins de fournisseurs pour peser sur les volumes

Les entreprises s'appuient sur leurs services des achats pour maîtriser leurs dépenses, mais elles leur demandent également de rester vigilants sur la solidité financière des fournisseurs dans une conjoncture ­difficile. Pour elles, il ne s'agit pas forcément de ­comprimer les prix, mais d'acheter moins, mieux et moins cher.

D'ailleurs, la réduction du nombre de fournisseurs apparaît comme l'un des chevaux de bataille cités par la moitié des entreprises interrogées. L'idée sous-jacente est de jouer sur les volumes afin d'obtenir de meilleurs tarifs. La contrepartie est ­d'offrir ­davantage de business et de visibilité aux sociétés ­retenues. Et qui dit volumes d'achat, dit évidemment marges de négociation. Selon l'étude d'AgileBuyer, il s'agit même d'un objectif central pour 79%des ­services des achats de l'industrie manufacturière et pour 71% de ceux de l'ingénierie.

Alors qu'une ­négociation réussie aboutit toujours à un accord gagnant-gagnant pour les deux parties, la relation avec les fournisseurs reste encore soumise aux enjeux ­économiques de réduction des dépenses. Le contexte international incertain dicte aux directions des achats un cap à tenir et s'il est vrai qu'elles modernisent leurs pratiques, elles restent contraintes d'appliquer les directives qu'elles reçoivent.

(1) Cette étude a été réalisée à partir d'un questionnaire administré électroniquement à un panel ciblé entre le 1er et le 8 décembre 2014. Sur les 542 réponses, seules 482 ont été jugées assimilables.

>> Lire la suite en page 2.

L'externalisation, une piste à envisager pour les directions des achats

Une des solutions favorisant la mise en oeuvre d'une stratégie de réduction du nombre de fournisseurs est l'externalisation des achats. Même partielle, celle-ci représente un outil de management efficace, qui reste cependant peu utilisé en France.

D'ailleurs, avant de confier une part de son activité à un prestataire, l'acheteur doit bien identifier le ­partenaire adéquat. Pour cela, deux critères semblent entrer en ligne de compte: le pragmatisme et les coûts. "Les entreprises préféreront toujours une approche ­opérationnelle, avec des résultats concrets, à une approche théorique et méthodologique, assure Lee Sen, fondateur de NSP Expertise, prestataire de services, spécialisé dans le domaine des achats. Nos clients reviennent ­également à des valeurs telles que la proximité avec leurs interlocuteurs, la flexibilité et l'adaptabilité."

En période de crise, le prix constitue évidemment un paramètre central. L'expert observe que "même de très grandes entreprises ne sont plus prêtes à payer les tarifs appliqués par les grands cabinets de conseil. Un concurrent de taille moins importante pratiquera une politique tarifaire bien plus adaptée et accessible aux PME-PMI et aux ETI". Avant de s'engager auprès d'un partenaire, le dirigeant devra également vérifier l'expérience des consultants et leurs références par secteur d'activité.

Une démarche à suivre

La PFA, association ayant pour but de définir et de ­promouvoir les actions nécessaires à l'amélioration de la compétitivité de l'industrie automobile française, a dévoilé en juillet 2015 les résultats de la première édition de son enquête sur la qualité des relations entre clients et fournisseurs(2).

Les enjeux sont importants car les constructeurs sont exposés à une concurrence internationale toujours plus vive, au sein d'une filière où l'innovation impacte ­fortement la chaîne de valeur. Afin de maintenir leurs parts de marché et de réussir leur mutation ­technologique, les entreprises concernées ont ­l'obligation de veiller au maintien de la qualité de la relation avec leurs fournisseurs.

Pour mener son étude et bénéficier d'une analyse objective, la PFA a choisi le référentiel du PEAK Collaborative Index. Premier enseignement: alors que l'ensemble des ­fournisseurs de l'industrie française attribuent une note de 72/100 à la relation qu'ils entretiennent avec leurs fournisseurs, ceux du secteur automobile ­l'évaluent à 66/100.

Par ailleurs, si de bonnes pratiques existent au sein de la filière, l'enquête laisse également apparaître des points qui nécessiteraient d'être améliorés.

- Les points forts.

  • Souvent difficiles à installer, les fondamentaux de la relation sont en place (processus de contractualisation, outils informatiques, compétences des parties prenantes).
  • Le professionnalisme des partenaires, avec une culture de l'engagement et de la qualité ainsi que la disponibilité des interlocuteurs clients.
  • La pérennité de la relation: 75% des répondants font état de collaborations suivies depuis plus de 15 ans.
  • Le respect des délais de paiement et l'absence de pénalités.

- Les pistes d'amélioration.

Les résultats démontrent clairement que l'amélioration de la qualité des relations est liée à une meilleure application des normes relationnelles et, dans une moindre mesure, à la capacité de savoir partager des objectifs clairs et des perspectives à long terme. Les pistes d'amélioration relevées par l'étude portent notamment sur le contenu des messages et des échanges, la proactivité du partenaire en cas de difficulté et la capacité de ce dernier à mesurer et à prendre en compte ce qui est positif. Enfin, les compensations relatives à des reports, les annulations de commande ou la non-atteinte des volumes prévisionnels représentent des sujets de préoccupation pour de nombreuses entreprises, tandis que la phase préalable à la négociation de nouveaux contrats peut, elle aussi, être améliorée.

(2) Cette enquête a été lancée en janvier dernier auprès de 200 entreprises, dont 11 % de PME, 22 % d'ETI et 67 % de grandes entreprises.

Délais de paiement: nouveau train de mesures

Selon une étude menée par le cabinet Altarès sur le comportement de paiement des entreprises en France et en Europe, les retards ne cessent d'augmenter et atteignent 13,6 jours de retard en moyenne, soit la pire valeur depuis 10 ans. Seulement un tiers des entreprises payent toutes leurs factures à l'heure et autant sont touchées par des retards de règlement, en particulier les TPE-PME. Cela représente 15 milliards d'euros de ressources non mobilisables pour elles.

Le ministre de l'Économie a annoncé des mesures visant à enrayer cette situation. En application de la loi relative à la consommation, la DGCCRF a mené un important plan de contrôle sur le respect des délais de paiement en 2015, qui a concerné 2249 sociétés (au 15 novembre 2015). Les sanctions prononcées à l'issue de cette opération ont été rendues publiques.

Faisant le bilan du premier train de sanctions administratives prononcées, Emmanuel Macron a décidé du renforcement de l'efficacité du dispositif de sanction. Ainsi, le plafond par amende sera porté à deux millions d'euros, afin qu'il puisse être mieux proportionné aux profits pouvant être tirés des retards de paiement; l'administration pourra désormais prononcer et faire exécuter plusieurs amendes contre les entreprises auteurs de multiples manquements (alors qu'aujourd'hui, ces amendes sont plafonnées à 375000 euros); toutes les sanctions seront désormais publiées, la durée et les modalités de publication pouvant varier selon chaque situation. L'Observatoire des délais de paiement a, ailleurs, été relancé.

Source : ministère de l'Économie, de l'Industrie et du Numérique.

Lire la suite en page 3

Sébastien Taupiac, directeur délégué à l'innovation au sein de la direction de l'offre de l'Ugap

"Plus la relation est équilibrée, plus l'acheteur a de chances de parvenir à un accord gagnant-gagnant"

Eric VAZZOLER

Eric VAZZOLER

Face à l'émergence des centrales, quelle valeur ajoutée les acheteurs apportent-ils dans le secteur public?

Leur fonction est encore assortie d'a priori négatifs parce qu'ils représentent un passage obligé pour leurs collègues, parce qu'ils incarnent ceux qui tirent les prix vers le bas et parce qu'ils représentent une variable d'ajustement aux yeux de leur direction, mais la situation évolue dans le bon sens. Le nombre d'acheteurs publics, qui sont environ 130000 en France, se réduit, en raison de la multiplication des structures de mutualisation.

L'organisation bicéphale, avec d'un côté les acheteurs publics et de l'autre l'Ugap, a vécu. Désormais, nous devons faire face à la concurrence des centrales d'achats, qui sont notamment implantées en région, ou devenir leurs partenaires. Dans les deux cas, nos clients sont gagnants, car nous créons davantage de valeur ajoutée. L'Ugap considère en effet l'apparition de ces structures comme une nouvelle opportunité.

Par exemple, grâce à une convention passée entre les deux centrales, les adhérents d'Approlys achètent leurs véhicules par l'intermédiaire de l'Ugap, dont les résultats sur le sujet sont plus performants. En résumé, dans le secteur public, les centrales d'achats apportent à leurs clients des performances économiques -même si cela est moins vrai car, dans de nombreux domaines, nous avons atteint des seuils planchers-, ainsi qu'une large palette de services (outils de dématérialisation, conseil, solutions financières, etc.).

Le cost killer semble céder la place à l'acheteur expert. Comment définiriez-vous la mission de celui-ci?

Les achats deviennent de plus en plus complexes. À l'Ugap, un acheteur dédie 30% de son temps au sourcing, 40% aux procédures et 30% aux suivis de l'exécution des contrats. Il est en permanence en relation avec les fournisseurs. Aujourd'hui, les contrats ne sont plus figés, ils évoluent souvent avant que l'échéance n'intervienne. Le rôle de l'acheteur consiste également à s'adapter aux aléas industriels. Par exemple, il faut savoir se montrer compréhensif lorsqu'un fournisseur fait face à une crise passagère. Dans d'autres cas, le rôle de l'acheteur est aussi de veiller à la bonne exécution des pénalités.

Comment faut-il challenger les fournisseurs?

La question est mal posée. Qui dit challenge, dit création d'un déséquilibre. Or, pour être réussie, une négociation doit déboucher sur un accord gagnant-gagnant. Plus la relation est équilibrée, plus l'acheteur a de chance d'y parvenir. La sélection des fournisseurs en amont exige du professionnalisme. La compétence d'un acheteur se mesure à sa connaissance du marché et de ses acteurs, mais aussi à sa capacité d'obtenir des informations de la part des entreprises. Cela est primordial pour enrichir les appels d'offres de critères qui donneront envie aux soumissionnaires d'y répondre. Ils considéreront alors que l'acheteur a pleinement conscience des spécificités de leur secteur d'activité. En cela, les acheteurs apportent de la valeur ajoutée à leurs clients internes, à leurs fournisseurs et à leur établissement.

>> Pour aller plus loin, consultez l'article "La relation acheteur/fournisseur au coeur des dernières Rencontres Décision Achats"

 
Je m'abonne

NEWSLETTER | Abonnez-vous pour recevoir nos meilleurs articles

La rédaction vous recommande

Retour haut de page