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Rupture conventionnelle : des changements majeurs en septembre

Publié par Audrey Fréel le - mis à jour à
Rupture conventionnelle : des changements majeurs en septembre

La loi de financement rectificative du 14 avril dernier a entériné des modifications importantes dans le régime social et fiscal de la rupture conventionnelle. Côté achats, ces changements impacteraient surtout les acheteurs seniors, dont l'employabilité devient plus complexe à partir de 50 ans.

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La rupture conventionnelle a le vent en poupe depuis sa création en 2008, mis à part un petit ralentissement en 2020 en raison de la crise sanitaire. Et pour cause : ce dispositif présente plusieurs atouts. Il offre la possibilité à un salarié de quitter son entreprise de façon amiable, sans démissionner et en conservant ses droits au chômage. Côté employeur, elle permet de se séparer d'un collaborateur en évitant de monter un dossier de licenciement. Face à cette popularité croissante, ce dispositif est rapidemment devenu un enjeu de finance publique. De fait, en 2013, les employeurs ont été taxés par le biais du forfait social à 20 %. "Une nouvelle étape est désormais franchie avec la suppression du forfait social et la création d'une contribution plus élevée de 30 % à partir du 1er septembre 2023", explique Elodie Moroy, avocate associée en droit chez Fidal Avocats et responsable nationale adjointe du pôle paie.

Une contribution unique de 30 %

Actuellement, les ruptures conventionnelles sont soumises à deux régimes sociaux différents selon que le collaborateur peut bénéficier, ou non, d'une pension de retraite.

Dans le premier cas, l'indemnité de rupture conventionnelle est soumise à cotisations de sécurité sociale ainsi qu'à la CSG-CRDS mais n'est pas assujetti à un forfait social de 20 %. A contrario, lorsque le collaborateur n'est pas en capacité de prendre sa retraite, l'indemnité est soumise à un forfait social de 20 %. A partir du 1er septembre 2023, ce forfait social sera supprimé et remplacé par une contribution unique de 30% quel que soit le statut du salarié via à vis de la retraite.

Selon les cas de figure, la rupture conventionnelle sera donc plus ou moins avantageuse pour les employeurs. "Si l'on zoome sur la rupture conventionnelle conclue avec un salarié pouvant bénéficier d'une pension de retraite (cas du salarié de 55 ans et plus selon l'Urssaf, mais âge bien différent selon la pratique), cela sera moins coûteux que par le passé pour l'entreprise", précise l'avocate. En effet, pour ces salariés, l'indemnité de rupture conventionnelle est, jusqu'au 31 août 2023, assujettie en totalité à cotisations (dont environ 40% de cotisations à la charge de l'employeur) mais sera exonérée, dans les mêmes limites que l'indemnité de licenciement, après cette date (tout en étant soumise à la contribution de 30% - soit un pourcentage inférieur). "Le coût d'une mise à la retraite et d'une rupture conventionnelle sera désormais équivalent pour l'employeur", résume Elodie Moroy. Cela pourrait donc favoriser les ruptures conventionnelles avec les salariés en âge de partir à la retraite, d'autant que la mise en retraite d'un collaborateur n'est pas facilement applicable pour l'entreprise. "L'employé peut la refuser jusque 70 ans. Dans ce cas, on comprend l'intérêt pour l'entreprise de proposer une rupture conventionnelle pour ce profil de salariés", indique Elodie Moroy.

Un dispositif plus coûteux

En revanche, la rupture conventionnelle sera désormais plus onéreuse pour l'employeur dans le cas classique des salariés ne pouvant pas prétendre à une pension de retraite. "Cela devrait avoir pour effet de limiter les ruptures conventionnelles réalisées par certaines entreprises pour rompre le contrat avec leurs salariés proches de la retraite mais pas encore en droit de toucher une pension de retraite et les inciter à maintenir ces profils seniors dans l'emploi", décrypte Elodie Moroy. Selon l'avocate, le dispositif reste toutefois intéressant pour les entreprises lorsqu'elles souhaitent se séparer d'un collaborateur sans passer par la case licenciement.

Pour Thibaut Gollentz, recruteur spécialisé dans les achats et supply chain chez Hays, ces changements auront essentiellement une incidence sur les profils d'acheteurs expérimentés. "Le marché de l'emploi commence à être un peu plus difficile à partir de 52 ans. Certains acheteurs seniors souhaitent s'orienter vers du consulting ou créer une auto-entreprise, par exemple, et prendre le temps de définir un projet professionnel. La rupture conventionnelle est, dans ce cas, intéressante car elle permet de débloquer du budget pour la formation et de pouvoir rebondir professionnellement", analyse-t-il. Or, la plupart d'entre eux ne sont pas encore en droit de bénéficier d'une pension de retraite.

Mieux valoriser les acheteurs seniors

A partir du 1er septembre 2023, la rupture conventionnelle risque donc d'être plus compliquée à obtenir pour ce genre de profils d'acheteur qui ont, par ailleurs, du mal à évoluer au sein de leur entreprise mais également à obtenir un poste à l'extérieur en raison de leur séniorité. Selon Thibaut Gollentz, il est essentiel, dans le contexte actuel, de mieux valoriser les profils seniors au sein des équipes achats. "Aujourd'hui, il n'y a pas assez de candidats pour répondre aux besoins de recrutement dans les achats. Or les candidats seniors peuvent tout à fait les combler mais les entreprises se tournent rarement vers de genre de profils, qui sont encore trop souvent victimes de préjugés", regrette-t-il. Avant d'ajouter : "Pourtant, les seniors peuvent apporter une grande plus-value dans les équipes grâce à leurs connaissances des marchés fournisseurs et leurs expertises techniques".

Plus d'offres que de candidats dans les achats

Pour les autres profils d'acheteurs, les modifications touchant la rupture conventionnelle devraient avoir peu d'incidence. "Le marché de l'emploi est très dynamique pour ces profils et je vois peu de candidats ayant demandé une rupture conventionnelle. Je ne pense pas que les changements attendus au 1er septembre auront une incidence sur les profils avec lesquels je travaille", estime Cléo Gouiffes, manager de la division achats pour le bureau parisien de Robert Walters. En effet, les acheteurs sont actuellement très convoités et posent en général leur démission lorsqu'ils souhaitent changer d'entreprise. "Les candidats reçoivent beaucoup de propositions. Nous observons de nombreuses créations de postes car les entreprises souhaitent renforcer leurs équipes achats", confirme Cléo Gouiffes. Selon l'experte, certains profils sont actuellement particulièrement recherchés, comme les acheteurs indirects.

 
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