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Le dernier kilomètre en tête des défis supply

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Le dernier kilomètre en tête des défis supply

Entre la crise du covid-19, celle des approvisionnements et l'envolée des prix de l'énergie, les supply chain n'en finissent plus d'être dans la tourmente. L'heure est aux interrogations, à la recherche de solutions en phase avec les défis du moment, faisant la part belle aux offres innovantes.

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Stuart, Diligo, Mouvite, Sterne... En quelques années à peine, ces enseignes ont inondé les centres-villes. Objectif : désengorger ces derniers dans un contexte d'explosion du e-commerce. Selon la Fevad (Fédération du e-commerce et de la vente à distance), 2021 s'est soldée par un chiffre d'affaires global de 129 milliards d'euros pour le secteur. Une progression de 15,1 % par rapport à 2020, année qui s'était déjà distingué par une croissance de 8,5 %. Les conséquences sur les flux d'approvisionnement sont d'autant plus fortes que 10 % d'entre eux sont également concernés par des renvois de produits. Parallèlement, une étude publiée l'an passé par la plateforme d'expédition Sendcloud révèle que 56 % Français redoutent les conséquences environnementales qui découlent de l'essor rapide du e-commerce. La composante écologique occupe donc une place centrale pour les entreprises, au-delà des enjeux d'optimisation logistique.

Un contexte favorable aux nouvelles mobilités

"Nous sommes aujourd'hui à une grande abondance de solutions nouvelles focalisées sur la gestion du dernier kilomètre. Le paysage de l'offre s'apparente à une jungle ; la visibilité peut être difficile pour les entreprise clientes ou potentiellement intéressées. Mais le développement important du commerce en ligne a aussi une grande influence sur le degré de connaissance portant sur cette étape clé de la livraison", estime Tanguy Caillet, SVP Global Industry Solutions, chez o9 Solutions, fournisseur de solutions logiciels au service des supply chains.

Ces offres sont également de plus en plus connues à la faveur des restrictions de circulation au sein des villes. L'essor des ZFE (Zones à faible émissions) ainsi que la piétonisation croissante de voiries vont dans le sens d'une meilleure connaissance et de réflexions quant aux meilleures décisions à prendre dans ce domaine sur un plan logistique.

Sur un plan économique, la part du dernier kilomètre est souvent estimée à environ 30 % des coûts de l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement. A l'heure où le mot d'ordre est de réduire ces derniers, notamment aussi en raison de la cherté de l'énergie, l'attention est davantage portée sur ce segment particulier. "Les gains économiques s'obtiennent avec la massification. Or, il y a peu de massification possible sur le dernier kilomètre. Le point relais est le schéma le plus économique idéalement. Plus on est gros, en aval, plus on peut transporter de produits, et plus on est rentable. C'est ce point qui est désormais à l'origine de nombreux changements", analyse Tanguy Caillet.

Une évolution inévitablement écologique

Dans la lignée des particuliers qui révolutionnent leurs moyens de transports pour les déplacements de courte distance (vélos électriques, trottinettes, gyropodes, solutions d'autopartage...), l'acheminement de marchandises change de visage très rapidement. "On assiste actuellement à une uberisation forte des livraisons du dernier kilomètre, comme en témoigne les transports par le biais de camionnettes louées par des auto-entrepreneurs", souligne Philippe Lachaize, cofondateur de Flow and Co, cabinet du groupe de conseil en supply chain Square.

La demande de solutions innovantes, aussi bien en termes d'agilité que d'écologie, "ne va pas se tarir, estime Delphine Janicot, directrice Marketing, Communication & RSE du réseau Urby. Il s'agit aujourd'hui d'optimiser son impact environnemental tout en faisant des économies. Et dance domaine, écologie et recherche d'efficacité vont de pair."

Les problématiques de logistiques sont devenues un enjeu sociétal majeur, pour les chargeurs, les citoyens et les collectivités territoriales. "La révolution du transport de marchandises en ville est devant nous. Nous allons assister à une très forte décarbonation des flux, prédit Olivier Storch, directeur général adjoint du transporteur Geopost. Nous promeuvons également des vélos cargo permettant des transports jusqu'à 150 kg en centre-ville." Une solution d'ores et déjà en vigueur à Paris, Montpellier, Toulouse, ou encore Grenoble. Les développements prévoient de couvrir rapidement les 20 plus grandes métropoles du territoire national.

L'enjeu principal pour les villes est la pollution de l'air. Le transport de marchandises représente près de 20 % du trafic dans les grandes métropoles, alors qu'il est à l'origine de 30 % des émissions de gaz à effet de serre et 40 % des émissions de particules fines. Il devient alors prioritaire de proposer des solutions alternatives, voire de nouvelles réglementations, afin de limiter les impacts environnementaux et sociétaux qu'occasionnent les flux de marchandises, quels qu'ils soient.

Priorité à l'innovation

Entre les besoins d'acheminement de grands volumes et la composante écologique, la jeune structure Urby s'efforce de se démarquer en répondant simultanément à plusieurs défis. "Nous sommes une filiale de La Poste et de la Banque des Territoires, qui a pour mission de se positionner sur les solutions pour les flux volumineux de plus de 15 kg. Notre poids moyen transporté est de 250 kg et nous sommes présents dans 23 villes, avec une activité de distribution mais aussi d'enlèvement, c'est-à-dire d'évacuation d'invendus, de palettes, de cartons, des emballages en bois, en verre ou de produits à retourner", explique Delphine Janicot.

L'offre comprend un système de traçabilité pour l'ensemble des activités, ainsi que la préparation de commandes. "Des enseignes comme Decathlon, Manutan, des grossistes ou des chargeurs pour qui nous ordonnançons les tournées à l'aide de logiciels font partie de nos clients", poursuit-elle. Tanguy Caillet remarque que les entreprises dont la visibilité vis-à-vis du consommateur est la plus forte sont celles qui manifestent la plus grande demande en termes de solutions innovantes sur le dernier kilomètre.

Le besoin de massifier et de gérer d'importants volumes le plus près possible de la destination a conduit Urby à faire évoluer son offre : la société a acquis en 2022, 80 % du capital de la start-up Stocknord, spécialisée dans la location de containers en self stockage. "Le départ de micro-entrepôts situés très proches des villes ou dans les villes permet de distribuer certains produits au client dans la journée, là où les délais étaient jusque là plus importants", se réjouit Olivier Storch.

Cette optimisation recherchée des flux rencontre aujourd'hui un fort écho et devrait se développer rapidement, tout comme la mutualisation des entrepôts. Dans une rue commerçante, il est encore fréquent de constater des livraisons différenciées, en provenance d'entre­pôts centraux, mais avec autant de transporteurs différents. Une meilleure mutualisation s'inscrit dans un rapport gagnant, même si elle est complexe à mettre en oeuvre : elle nécessite une très bonne visibilité, une gestion optimale de son réseau de fournisseurs. Il en découle plusieurs avantages comme la diminution des coûts logistiques de stockage, l'amélioration de l'efficacité des tournées de grâce à des camions mieux remplis, une meilleure qualité de service et un impact carbone plus satisfaisant.

L'avenir de ces activités en aval des chaînes d'approvisionnement devrait aussi être inévitablement lié aux innovations logicielles. "Ceux-ci ne sont pas encore assez performants, estime Tanguy Caillet. De l'achat à la production en passant par l'entreposage, il faudra pouvoir tout modéliser en intégrant les impacts carbone de chaque segment de l'activité."

Les choix alternatifs ont aussi leurs limites

Parmi les annonces les plus spectaculaires des dernières années figuraient les projets de livraisons par drone. Si Amazon, Google ou d'autres n'ont pas abandonné cette idée, force est de constater que la démocratisation de cette solution n'est pas pour demain, les freins réglementaires et de sécurité notamment étant nombreux.

Poussées par des motivations écologiques mais aussi de différenciation, certaines enseignes ont opté pour des alternatives intéressantes comme l'acheminement par voie d'eau. Franprix a ainsi misé sur le transport fluvial il y a quelques années, en approvisionnant près d'un quart de ses 350 maga­sins parisiens par la Seine. L'atout économique et écologique paraissait évident, avec environ 90 000 litres de carburant non consommées et des émissions diminuées de 234 tonnes de CO2 par an. Le mode d'acheminement s'avère largement compétitif par rapport aux transports routiers. Mais Franprix s'est ensuite heurtée à des problèmes de taille : le niveau de la Seine n'est pas constant toute l'année, pour des raisons de variations naturelles. Certains flux se sont alors retrouvés bloqués parfois plusieurs semaines, à cause d'une impossibilité de passer sous les ponts de Paris.

 
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