5 conseils pour gérer le fait religieux en entreprise
Astrées, think tank sur le travail et l'emploi, a présenté mercredi 9 septembre 2015 le résultat d'une réflexion sur les réalités religieuses en entreprise. Celle-ci a permis d'établir 5 principes d'action proposés aux dirigeants pour mieux prendre en compte le fait religieux au travail.
Je m'abonneAider à la compréhension du fait religieux en entreprise et délivrer des principes d'action à l'usage des actions du monde professionnel, dont les dirigeants. Voilà l'objectif d'une "note" (un document de quarante pages) élaborée1 par Astrées, think tank sur le travail et l'emploi et présentée à ses adhérents, aux acteurs de son écosystème et à la presse mercredi 09 septembre 2015.
Selon cette note, un manager sur deux a déjà été confronté au fait religieux, soit occasionnellement soit régulièrement. " Traiter la question religieuse dans l'entreprise suppose de trouver un équilibre entre la liberté de conscience, la liberté des autres et la bonne marche de la société ", souligne Nicolas Cadène, rapporteur général de l'Observatoire de la laïcité. Pour cela, selon Astrées, pour qui il n'existe pas de " solutions uniques ni aux réponses toutes faites ", cinq principes doivent guider les actions des dirigeants :
1. Assumer
Si " le déni n'est pas une attitude tenable ", pour Claude Emmanuel Triomphe, délégué général d'Astrées, " ce type de pratique [discrétion, silence, ndlr] semble aujourd'hui majoritaire ", constate l'étude. Une politique de l'autruche qui s'explique par plusieurs raisons, notamment la peur d'avoir à traiter cette question délicate et potentiellement explosive. Il convient, pourtant, de traiter les demandes relatives au fait religieux et de leur apporter une réponse, même négative, tout en " concili[ant] le souci d'une certaine neutralité sur le lieu de travail (...) et l'acceptation de la liberté religieuse ", préconise Astrées.
2. Discerner
Revoir des conditions de travail pas adaptées, résoudre un problème relationnel dans l'équipe, réduire la pénibilité au travail... " Les revendications autour de la question religieuse peuvent en cacher d'autres ", note Claude Emmanuel Triomphe. L'objectif est de parvenir à cerner le véritable objet d'une demande exprimée par le salarié qui peut être le "symptôme" d'un problème existant à d'autres niveaux.
3. S'équiper
L'important est de pouvoir avoir des réponses à apporter aux salariés. Cela passe notamment par l'information, et par la conception et la diffusion de guides pratiques en interne. Astrées préconise également la mise en place de formations managériales, à la fois sur " le cadre juridique du fait religieux en entreprise, les grands courants religieux aujourd'hui et les réponses à apporter en situation ", énumère le document. Au-delà, il est recommandé de s'organiser en se dotant de représentants internes (correspondants diversité, réseaux syndicaux, médiateurs) afin d'optimiser la circulation des informations. Le moyen aussi de ne pas laisser la seule responsabilité de la question aux managers de proximité.
4. Dialoguer
" C'est la clé ", selon Claude Emmanuel Triomphe (Astrées). Voire, " La première urgence " d'après Nicolas Cadène (Observatoire de la laïcité). A défaut de permettre un accord, l'ouverture d'un dialogue permet a minima de réduire les risques de crispation autour d'une question qui n'aurait pas été débattue. Que ce soit au niveau individuel, ou au niveau collectif, via les représentants du personnel.
5. Décider
Pour définir des réponses claires et communes, l'entreprise doit trancher. " Ses décisions doivent être justifiées et transparentes ", explique Charles Emmanuel Triomphe. Au-delà de la transparence et de la communication de ses prises de position, l'entreprise doit également, à ce stade, respecter trois autres grands principes : la préservation de l'espace professionnel, " avant tout un espace de travail ", le respect du cadre légal et enfin l'équilibre. Aucun groupe de salariés ne doit être lésé.
Témoignage d'un patron confronté au fait religieux
Apporter une réponse négative plutôt que rien. Traiter la question sans la reporter sans cesse. C'est ce qu'a fait Wenceslas Baudrillart, président d'AIA (Asnières Industries Adaptées), une blanchisserie industrielle comptant 95 salariés dont 87 travailleurs handicapés, lorsqu'il y a quatre à cinq ans, des salariés lui ont fait remonter leur volonté de disposer d'une salle de prière sur leur lieu de travail.
Une demande à laquelle il n'a pas donné suite et qui ne l'a pas empêché de réagir en menant deux actions spécifiques. " J'ai fait réaménager les vestiaires en disposant autrement les armoires de façon à ce que des tapis de prière puissent être installés dans l'espace disponible ", explique celui qui, par ailleurs, observe une tolérance à l'égard des salariés qui souhaitent prendre une pause pour prier. Et le dirigeant de préciser : " Dans les PME, à l'inverse des grands groupes, les demandes peuvent être traitées au cas par cas ".
La note intégrale est téléchargeable ici.
1 Cette note est le fruit d'interviews d'experts français et étrangers sur la problématique, complétées par des données issues d'études déjà parues sur le sujet (Observatoire de la société française, INED, Insee, etc).