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Dématérialisation de tous les flux: objectifs et impacts sur l'organisation

Publié par Aude Guesnon le - mis à jour à
Dématérialisation de tous les flux: objectifs et impacts sur l'organisation

Dématérialiser l'ensemble de ses flux est autrement plus compliqué que la seule "démat" des factures puisque ce sont tous les processus de l'entreprise qu'il va falloir modifier pour espérer des gains en termes de productivité, de réduction des risques et de relation client. Décryptage.

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La dématérialisation ne concerne pas que les factures : contrats, fiches de paie, bons de commande, dossiers clients, etc. peuvent aussi être dématérialisés. "Les trois objectifs qui poussent une entreprise à passer à la dématérialisation de tous les flux sont l'amélioration de la relation client, la réduction des risques et le gain de productivité", énumère Patrick Michels, directeur marketing de Everial.

Mais dématérialiser l'ensemble de ses flux est autrement plus compliqué que la seule "démat" des factures puisqu'il va falloir modifier tous les processus et repenser l'organisation de l'entreprise. "Si on veut tirer bénéfice de la dématérialisation des documents, il est utile de dématérialiser tous les flux et donc, l'ensemble des processus, afin de synchroniser les informations. Il faut combiner tous les canaux", assure Philippe Delanghe, directeur marketing d'Itsoft. "Je vous donne un exemple : il faut que l'outil puisse traiter toutes les informations, de l'amont de la commande à l'aval, notamment vérifier la demande d'achat dans l'ERP, la confronter à la facture, etc. Il faut créer une sorte d'énorme toile d'araignée.

Philippe Delanghe

"Or, les structures actuellement en place au sein des entreprises ne sont pas faites pour communiquer ensemble. Ajouter une "couche" supplémentaire au système d'information de l'entreprise coûte cher et c'est compliqué. Cette transformation, qui impacte l'infrastructure même de l'entreprise, demande la coopération de la DSI avec toutes les directions métiers. C'est un projet considérable, mais le bénéfice est énorme. Il permet, notamment, un gain de temps conséquent. Nous avons des clients qui traitent 600 000 factures par an avec un service de trois personnes !"


Faciliter la gestion de la relation client

Les secteurs de la banque, des mutuelles et des assurances ainsi que les opérateurs téléphoniques s'y sont mis massivement, parce que la dématérialisation permet notamment de faciliter la gestion de la relation client qui induit des échanges importants de documents. "Pour elles, c'est un vrai avantage compétitif", commente Philippe Delanghe. C'est aussi une question de survie pour ces acteurs qui font face à la concurrence de nouveaux entrants pour qui la dématérialisation est native. Ainsi que la communication sur tous les devices. Les banques, les mutuelles et les assurances ont besoin de communiquer et d'inter­agir avec leurs clients sur tous les canaux car c'est là leur attente. Pour aboutir à cette communication multicanale, la dématérialisation devient stratégique pour recruter des clients ou, a minima, les garder. "Cela concerne tous les secteurs du B to C", abonde Philippe Delanghe (Itsoft), "qui brassent énormément de documents et qui sont contraints par un environnement législatif fort"

Et bénéfice annexe, qui n'est pas des moindres, la gestion de la data, cet or noir de notre siècle, en est facilitée. Lorsque l'entreprise centralise ses données, elle acquiert plus de connaissance, ce qui lui permet de faire des meilleurs produits et de mieux servir le client. Bien exploitées, les données peuvent aussi aider à améliorer le modèle économique de l'entreprise. À la question, "la "démat" ne favorise-t-elle pas la cybercriminalité ?" Philippe Delanghe répond par la négative : "Avec la démat, vous centralisez des informations qui sont déjà présentes dans les systèmes d'information de l'entreprise. Il faut simplement se doter des moyens nécessaires pour se protéger."

Lire la suite en page 2 : Une maîtrise des risques

Une maîtrise des risques

Mieux maîtriser les informations disséminées au sein de l'entreprise permet aussi à cette dernière de mieux maîtriser les risques. Les risques RH, par exemple. Ainsi, Patrick Michels, directeur marketing d'Everial, cite l'exemple d'une chaîne de restauration qui a récemment fait appel à leurs services pour résoudre des problèmes de circulation de l'information, notamment RH, entre les différents établissements et le siège. "La direction n'arrivait pas à collecter toutes les informations relatives aux absences, présences, aux contrats intérimaires, aux CDD, etc. L'organisation ne suivait plus et mettait le groupe en situation de risque . Aujourd'hui, la communication s'est très nettement améliorée entre les sites, le groupe maîtrise toutes les informations et donc, les risques et... le stress a beaucoup diminué au siège."

Faire des économies et réexploiter les ressources

L'entreprise peut aussi, et surtout, décider de passer au tout numérique pour des raisons de coût. De fait, la dématérialisation impacte beaucoup les professions intermédiaires puisqu'elle automatise nombre de process lourds et coûteux. Si l'entreprise a un potentiel de croissance, elle peut choisir de ré-exploiter ailleurs les compétences.

Patrick Michels (Everial) raconte le cas d'un client qui exerce dans le domaine de la comptabilité. Ce dernier a choisi de reconvertir les employés dont la charge de travail a chuté du fait de la dématérialisation plutôt que de licencier. "Ils ont créé un nouveau service, de nouveaux métiers en rapport avec la relation client. Ils ont développé une nouvelle activité et un nouveau chiffre d'affaires. Ce qui était une menace pour certains est devenu une opportunité pour tous". Mais l'entreprise peut aussi décider de confier la gestion de ses flux à un prestataire externe pour plus d'économies."En externe, la gestion est souvent moins chère qu'en interne, de l'ordre de 8 fois sur 10", commente Patrick Michels. "Certes, elle peut être mal vécue en interne, et entraîner des suppressions de postes mais elle peut éviter de délocaliser. Alors autant outsourcer que délocaliser."

Côté logiciels

Dans son e-Book "Digital & transformation des processus documentaires - Tendances 2015", Markess avait estimé à plus de 5,2 milliards d'euros le marché français des logiciels et services IT associés à la dématérialisation. C'est près de 15 % de l'ensemble du marché des logiciels et services IT évalué à 49,5 milliards d'euros par Syntec Numérique pour 2014. Ce marché de la dématérialisation connaît une croissance dynamique depuis plusieurs années et figure parmi les segments porteurs du marché des logiciels et services IT en France. D'ici 2016, Markess indique qu'il devrait poursuivre sa progression au rythme de 7 % par an et atteindre les 6 milliards d'euros.

Ce que dit la loi - Le chemin de la "démat"

La dématérialisation est restée peu développée pendant de nombreuses années car le législateur imposait aux entreprises et collectivités de conserver les traces papier. Mais l'évolution du cadre légal dans le domaine de la dématérialisation a amorcé la révolution. Ainsi, depuis la loi du 13 mars 2000 reconnaissant la valeur probante des documents numériques, la directive européenne 2010/45/UE a apporté des précisions sur les moyens de transmission des documents dématérialisés et sur les règles de confidentialité. Enfin, les décrets du 18 octobre 2013 et du 19 septembre 2014 ont précisé la réglementation en matière de facturation. Il est à présent permis d'échanger des documents sous la seule forme électronique. L'État français a, quant à lui, indiqué la voie à suivre à ses fournisseurs qui devront être passés à la facture électronique en 2017. "D'ici 3-4 ans, tous les documents seront dématérialisés", prophétise Philippe Delanghe (Itsoft).

Zoom -Que faire de l'existant ?

Stéphane Benais

Une fois le sujet dématérialisation sur le tapis, se pose la question suivante : "Que faire de l'existant ?", de ces dossiers papier qui se sont accumulés. Faut-il tout numériser pour avoir toutes les informations en version électronique, en numériser une partie, ou numériser de façon opportuniste en fonction des besoins ?"Tous les niveaux existent. Le choix se fait dans une logique économique", explique Stéphane Benais, directeur des systèmes d'information chez Iron Mountain France.

"Nous avons récemment travaillé pour un client qui exerce dans le domaine de l'énergie et qui a choisi, afin que les conseillers de toutes ses plateformes aient le même accès à l'information clients, de numériser l'ensemble des documents jusque-là éparpillés dans tous les centres. Les établissements de santé choisissent, quant à eux, de ne dématérialiser qu'une partie des dossiers patients - ceux qui ont fait une visite depuis moins de deux ans, par exemple - et ensuite, nous demandent de numériser les dossiers dont ils ont besoin, de façon "opportuniste"." Et d'expliquer que "les sommes en jeu sont considérables puisque la numérisation d'une page peut coûter, selon la complexité du document, de 2 à 12 centimes d'euros."

Lire la suite en page 2 : L'exemple du Crédit Agricole Ile-de-France qui va dématérialiser près de 20 millions de pages sur 3 ans


Le Crédit Agricole d'Île-de-France va dématérialiser près de 20 millions de pages sur trois ans

Le Crédit Agricole d'Île-de-France a décidé de procéder à la dématérialisation et à l'archivage physique de l'ensemble de ses flux (dossiers contractuels) et fonds documentaires en agence, pour en faciliter la gestion, soit près de 20 millions de pages sur trois ans. Ce projet s'inscrit dans le cadre d'un programme "Zéro papier en agence" de la banque régionale qui veut réduire de 80 % sa consommation de papier.

Cette numérisation des flux et des fonds documentaires répond à plusieurs enjeux : simplifier la gestion quotidienne des dossiers bancaires par les collaborateurs en agence, grâce à la mise à disposition sous format numérique des documents contractuels de leurs clients ; optimiser le service client, en améliorant la réactivité des gestionnaires de clientèle en cas de réquisitions ou de réclamations client et, enfin, fluidifier les échanges entre le réseau d'agences et le siège grâce à un accès dématérialisé et rapide aux dossiers des clients. Vincent Souliac, directeur du département de la transformation numérique du Crédit Agricole d'Île-de-France, en est convaincu : "La dématé­rialisation facilite le travail au quotidien en agence et les échanges réseau-siège. Elle diminue les risques opérationnels et améliore la réactivité lors de la recherche d'un document."

Recours à l'Association des paralysés de France

Le Crédit Agricole d'Île-de-France, a choisi Everial pour prendre en charge les fonds actuellement archivés dans les agences (7 000 000 de pages sur 15 mois) et les flux générés quotidiennement en agence (13 000 000 de pages sur trois ans). Son prestataire assure la préparation et le tri des documents. Ce dernier pan a, en partie, été délégué à du personnel de l'Association des paralysés de France, recruté spécifiquement dans le cadre de cette prestation. "La capacité de ce prestataire à intégrer du personnel de l'Association des paralysés de France a été déterminante dans notre choix", a souligné Vincent Souliac, "en plus de sa capacité à gérer l'ensemble de la chaîne de traitement du document."

Le prestataire va aussi assurer la numérisation, l'indexation, l'archivage physique sécurisé, la gestion des éliminations puis l'envoi et l'intégration des documents contractuels numérisés (fond et flux) sur le système d'information commun et multicanal des Caisses régionales du Crédit Agricole (Nice). Aujourd'hui, les collaborateurs de la banque bénéficient d'un accès sécurisé et simplifié aux documents numérisés pour plus de réactivité. La traçabilité des dossiers bancaires est renforcée et les données sensibles sécurisées, dans le respect de la réglemen­tation en vigueur. Enfin, l'externalisation de la dématé­rialisation des dossiers contractuels permet aux équipes présentes en agence de se recentrer sur leur coeur de métier, assure le Crédit Agricole.

Côté achats publics Les petites communes avancent malgré les difficultés

Depuis le 1er janvier 2015, c'est le PES V2 qui est devenu l'unique protocole ­utilisable par les collectivités et les établissements hospitaliers pour envoyer des données comptables sur le portail de la direction générale des finances publiques (DGFIP). Il permet de véhiculer des données comptables et les pièces justificatives liées à chaque événement, et offre la possibilité aux collectivités de supprimer définitivement tout papier de la chaîne comptable. Ce protocole, entre autres éléments, a incité les collectivités à réfléchir la dématérialisation dans son ensemble.

Mais la démarche n'est pas aussi aisée pour tous...

Les petites communes poursuivent leur chemin malgré les contraintes matérielles et humaines, rapporte le baromètre 2015 de la dématérialisation de JVS-Mairistem* qui pointe "un manque d'accompagnement ressenti par près de 34 % des collectivités répondantes". À noter, la perception des aspects positifs de la dématérialisation est en baisse par rapport au baromètre 2014. 32 % des communes de moins de 1 000 habitants la considèrent comme une opportunité (- 3 %), 38 % des mairies de 1 000 à 3 500 habitants (- 4 %) et 33 % des mairies de plus de 3501 à 10 000 habitants (- 26 %).

Cependant, plus d'une commune sur deux s'accorde à dire que "cela dépend des projets", c'est 4 à 18 points de plus qu'en 2014 en fonction des strates. La dématérialisation de la paie est en tête des projets numériques adoptés dans les communes (hors PES v2), avec une hausse de 14 points par rapport à 2014. Près d'une mairie sur deux est aujourd'hui équipée. Le projet ACTES, permettant de télétransmettre les actes soumis au contrôle de légalité, a, quant à lui, été mis en place dans 40 % des mairies (+ 2 %). Enfin, l'outil de visualisation et d'exploitation de données dématérialisées, Xémélios, est toujours utilisé par 37 % des répondants. Fortement impulsée par le passage à la "full démat" (télétransmission des flux et pièces justificatives), l'adoption d'un tiers de télétransmission (36 %) et la dématérialisation des factures (35 %) se placent respectivement en quatrième et cinquième positions.

Les contraintes matérielles persistent

Alors même que certaines villes entrent dans l'ère du cloud et de la fibre optique, la plupart des très petites communes peine à obtenir un débit de connexion de bonne qualité et les difficultés budgétaires entravent souvent leur volonté de se moderniser. Seules 52 % des communes de moins de 1 000 habitants accèdent au haut débit. Si ce chiffre est en nette progression (+ 6%) par rapport à 2014, il reflète encore des disparités persistantes. Les deux tiers d'entre elles ne disposent pas d'un serveur informatique pourtant nécessaire à de nombreuses actions de dématérialisation. Cependant, 71 % des mairies disposent d'un accès wi-fi contre 67 % en 2014, ce qui démontre la volonté des collectivités de se tourner vers les nouvelles technologies en se dotant d'outils modernes et efficaces, lorsqu'elles en ont la possibilité.

Des professionnels généralistes

79% des répondants ne disposent ni d'un service informatique, ni d'un service information-communication, ni d'un service de relation aux citoyens, ni d'un chargé de mission en lien avec le numérique. Mais les situations sont encore une fois très différentes selon la taille de la commune. Dans les plus petites communes, les secrétaires de mairie sont souvent seul(e)s pour faire face à toutes les tâches et doivent faire preuve d'une grande polyvalence.

Les outils de GRC au point mort

À l'heure où le Web est devenu quasiment incontournable dans notre vie quotidienne, les communes françaises pâtissent du manque de temps, de moyens et de compétences pour mettre en oeuvre de tels outils. Les communes de moins de 1 000 habitants accusent une fois encore un retard malgré une progression notable de 5 points par rapport à 2014, seules 39 % d'entre elles disposent d'un site internet. La diversité des tâches que doivent mener les secrétaires de mairie rend difficile la mise en oeuvre de nouveaux services et freine leur capacité à impulser des projets numériques innovants.

* Chiffres issus du baromètre de la dématérialisation réalisé par JVS-Mairistem. 806 mairies de moins de 10 000 habitants ont répondu à un questionnaire en ligne (77 % des communes ont moins de 1 000 habitants, 19 % ont entre 1 000 et 3 500 habitants, 4 % ont entre 3 501 et 10 000 habitants). Pour en savoir plus : http://www.jvs-mairistem.fr/barometre-dematerialisation.

Lire aussi sur ce sujet: La dématérialisation des factures fournisseurs en 6 points

 
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