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"Innover est une condition de survie pour l'entreprise" - M. de Neuville, DA groupe Pierre & Vacances Center Parcs

Publié par Marie-Amélie Fenoll le - mis à jour à
'Innover est une condition de survie pour l'entreprise' - M. de Neuville, DA groupe Pierre & Vacances Center Parcs

La direction achats du groupe Pierre & Vacances Center Parcs mène de front une véritable stratégie d'achats locaux auprès des PME et la recherche de l'innovation fournisseurs avec la découverte de start-up "pépites". Entretien avec Martin de Neuville, DA groupe de Pierre & Vacances Center Parcs.

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Quel est le profil de la direction achats du groupe Pierre & Vacances Center Parcs ?

Le groupe a une double activité : il est promoteur immobilier et opérateur touristique dans cinq pays principaux - France, Hollande, Belgique, Allemagne, Espagne - avec deux marques principales, Center Parcs et Pierre & Vacances. Les achats du groupe représentent 650 millions d'euros. [99 % des commandes sont effectuées auprès de fournisseurs européens, dont 72 % situés en France, et moins de 1 % dans des pays dits "à risque", notamment en Chine, NDLR.]

Les achats se divisent en trois catégories égales : construction / rénovation ; opérations, maintenance et énergies ; achats hors production (services). L'équipe est intégrée et gère tous les achats du groupe. Quelques acheteurs sont basés en Belgique pour couvrir les marchés du nord de l'Europe. À noter que l'extension des activités du groupe dans les pays du sud de l'Europe et surtout en Chine va probablement entraîner une adaptation de ce modèle. Enfin, les sites gèrent directement les approvisionnements. La direction achats fonctionne comme une centrale de référencement.

Vous projetez d'augmenter votre taux de couverture achats. Comment allez-vous procéder ?

Aujourd'hui, 70 % des achats du groupe sont couverts par la direction des achats à travers des contrats-cadres. Le groupe opère 250 sites et la direction des achats doit encore progresser pour mieux assister les sites dans l'optimisation de leurs achats "locaux", c'est-à-dire les petites et moyennes dépenses effectuées auprès de fournisseurs locaux. De plus, le groupe doit être encore mieux discipliné dans l'application des contrats-cadres et des catalogues. Notre ambition est de porter notre taux de couverture à 85 %.

Cet objectif fera partie de notre prochain plan d'orientation à trois ans avec la volonté d'économiser environ 10 % sur ces dépenses. Un certain nombre de leviers sont envisagés comme fixer des montants minimums au-delà desquels les directions achats doivent être impliquées, délocaliser les achats produits de type C, identifier des fournisseurs de premier rang pour en gérer d'autres de deuxième ou troisième rang sur des petites prestations locales, ou encore travailler avec les opérations pour standardiser davantage des prestations de maintenance.

Mais attention, nous ne parlons pas de massification ! Nous cherchons à organiser la base fournisseurs, pas à en réduire le nombre. Notre approche ne se fera pas au détriment des territoires et de notre volonté d'y agir de façon responsable et respectueuse des emplois.

Justement, le groupe revendique son ancrage territorial. Comment les achats y participent-ils ?

Le groupe souhaite se comporter comme un "bon citoyen" partout où il opère. Nous avons commencé par signer la charte "Relations Fournisseur Responsables" en 2012. Et nous voulons maintenant obtenir le label "Relations Fournisseur Responsables". [NDLR : le groupe vient de se faire labelliser Relations fournisseurs responsables le 8 juin dernier] Le groupe Pierre & Vacances Center Parcs est membre de l'association Pacte PME et y est actif dans plusieurs initiatives, comme celle du baromètre fournisseurs qui mesure la qualité des relations entre les grands comptes adhérents et leurs fournisseurs. Une sorte de mise en danger car c'est une évaluation à 360°. Nous envisageons également d'utiliser la plateforme innovation pour des appels à candidatures pour nos projets nouveaux. De plus, nous organisons des journées fournisseurs PME dont la prochaine aura lieu en septembre.

Vous avez une politique d'achats auprès du tissu économique local. Comment gérez-vous le risque de dépendance ?

Sur nos 6 000 fournisseurs en France en 2015, 3 000 ont travaillé avec nous sur les trois dernières années (2013/2014/2015). Ils sont 54 à être très dépendants (plus de 50 % de leur CA est réalisé avec PVCP ), ce qui est somme toute assez peu. Nous les connaissons, les aidons dans leur activité économique et travaillons avec eux pour faire baisser cette dépendance.

Un autre chiffre est plus frappant : près de 600 fournisseurs n'ont pas déposé leurs comptes. Ce qui veut dire que, pour ces entreprises, nous n'avons pas d'idée précise et chiffrée sur leur éventuelle dépendance à notre groupe. Pour remédier à cette situation inconfortable, tout en évitant de demander aux sociétés leurs comptes ou une attestation à chaque fournisseur, nous réfléchissons à créer un label qualité PME /TPE propre à Pierre & Vacances ou à partager avec d'autres acteurs. Nous envisageons de nous rapprocher de start-up qui proposent des solutions de gestion à ces très petites entreprises. L'une d'elles est "Small Business Act". Nous sommes en réflexion sur ce sujet.

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Parlons innovation. Comment les achats la favorisent-ils ?

Au sein du groupe, l'innovation obéit à deux cycles. En premier lieu, un cycle long pour tout ce qui concerne l'immobilier. Compte tenu des contraintes liées notamment aux permis de construire et à la durée des projets, l'innovation doit être largement anticipée et réalisée avec des partenaires solides car le groupe n'a pas toujours une R & D suffisante en interne. En second lieu, un cycle court pour tout ce qui concerne le tourisme et les produits et services que nous offrons à nos clients. On peut y ajouter l'innovation liée à nos processus de travail.

Dans ce cadre, un processus "trial and error" est envisageable avec des sociétés innovantes. L'innovation a toujours été présente dans le groupe, mais elle n'est pas organisée autour d'un point central. Chaque département y travaille puis la partage avec les autres parties prenantes concernées dans la société. Les achats jouent un rôle actif : comme ils travaillent avec l'ensemble des clients internes et ont accès au marché fournisseurs, ils sont une force de propositions d'innovation et de gestion de projets d'innovation.

Comment être au plus proche de l'innovation ?

Deux conditions sont essentielles pour qu'une direction achats soit efficace en matière d'innovation. La première est la proximité avec les lignes de Business et leurs besoins d'évolution à court et moyen terme. Dans le cas de Pierre & Vacances, si les acheteurs ne comprennent pas les fondamentaux de la relation client, de son parcours ou de son expérience, il leur sera quasi impossible d'identifier une solution ­adéquate sur le marché.

La seconde est la capacité des acheteurs, non seulement à repérer des solutions sur les marchés fournisseurs, start-up ou entreprises classiques, mais aussi à faire le lien entre le besoin et la solution. Ceci demande de la curiosité, de la créativité et de l'envie. Des qualités que nous recherchons chez les acheteurs que nous recrutons.

Pour "sourcer" de l'innovation, nous nous appuyons sur nos fournisseurs. Toute la question est : vers quel client cette innovation est-elle dirigée ? Le groupe travaille avec un certain nombre de fournisseurs qui deviennent partenaires sur des produits et services qui vont lui permettre d'améliorer voire de renouveler son offre. Dans beaucoup de cas, le travail est coordonné par les achats.

Travaillez-vous avec des start-up ?

Oui. Notamment grâce à l'Adra (Association des directeurs et responsables d'achat) dont le groupe est membre. L 'Adra a organisé en décembre dernier une manifestation durant laquelle 20 start-ups ont pu rencontrer les directeurs achats des entreprises adhérentes de l'association. Ces start-up ont été proposées par les adhérents parce qu'elles répondaient soit à des besoins spécifiques d'une direction achats, soit à des besoins métiers généralistes. Grâce à cet événement, j'ai rencontré huit start-up qui sont des pépites et qui répondent à autant de problématiques métier auxquelles le groupe fait face.

Quelques exemples : Hopework, qui met en relation des free-lances experts et les entreprises dans le domaine des prestations informatiques. Bebook, qui est une solution de catalogue viral. Nos catalogues sont nombreux, lourds et peu ergonomiques et leur mise à jour prend beaucoup de temps. Nous travaillons à un POC avec Bebook, pour délocaliser nos catalogues sur leur plateforme. Kaliti, que nous utilisons sur nos chantiers pour optimiser le suivi. Mobeye, qui, dans sa version professionnelle, permet de collecter des remontées terrain et de les analyser en temps réel. Nous envisageons de travailler avec eux pour traiter les questions liées à la qualité des prestations fournisseurs.

Qui dit innovation, dit digital. Quelle politique appliquez-vous en la matière ?

Sur la digitalisation, les achats du groupe sont relativement peu matures. Nous avons des processus et outils internes robustes et notre taille limite l'intérêt de certains outils. Concernant le SRM et l'e-sourcing, à ce jour nous n'avons pas de projet. Pour la partie approvisionnement, nous bénéficions du module e-procurement d'un ERP. Nous souhaitons aller plus loin dans la dématérialisation des documents avec les parties prenantes externes. Le groupe a adopté une solution dématérialisée de gestion des contrats. Enfin, nous avons développé un outil interne sur l'analyse de données d'achat et le reporting. Quant à la communication interne nous utilisons le réseau Yammer, mis en place pour l'ensemble de l'entreprise.

Un autre pan d'action est en cours pour les achats digitaux. Historiquement, nos directions n'étaient que peu intégrées à ce type de commandes. Des progrès importants ont été faits auprès du marketing et des ventes pour les agences. Les achats spécifiques, comme ceux effectués chez Google ou Booking, sont considérés comme des actes commerciaux business. Les directions peuvent donc apporter un regard extérieur de spécialistes, mais les négociations sont menées par les opérationnels.


Groupe Pierre & Vacances

CA 2015 : 1 436,30 M€ dont 1 180,70 M€ (82 %) pour la partie tourisme et 255,6 M€ (18 %) pour l'immobilier)*

Budget achats : 650 millions d'euros

Effectifs salariés : 12 500 salariés *

Effectifs achats : 20 personnes

*Chiffres au 30 septembre 2015.

 
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