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« Notre action dépasse le simple militantisme »

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La direction achats durables de la SNCF poursuit, depuis plus de trois ans, une démarche exemplaire pour rendre plus écologiques les processus métiers du groupe. Pour ce faire, la SNCF mène plusieurs actions d'envergure. Olivier Menuet, le directeur délégué aux achats durables de la structure, fait le point sur ce sujet.

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La SNCF est l'un des rares groupes français à disposer d'une direction achats durables dédiée. Comment l'expliquez-vous ?

Olivier Menuet: Le respect du développement durable fait partie de l'ADN du groupe. Une vocation «sociale» qui s'explique par le statut d'établissement public de la SNCF, soumis, de fait, à la directive européenne de 2004, proche dans ses dispositions du Code des marchés publics. Cet engagement s'est concrétisé en 2008 avec le lancement, par notre p-dg Guillaume Pépy, de la stratégie «Ecomobilité» couplée, au niveau des achats, au programme SynergiA. Fondé sur cinq axes de progrès, celui-ci a permis de jeter les bases de notre politique d'achats durables : la recherche de la performance globale plutôt que celle de la performance économique seulement. Si notre organisation s'impose effectivement comme une des seules structures françaises, dotée d'une véritable direction achats durables (forte de quinze personnes, NDLR), rappelons toutefois que de plus en plus de grands groupes - entre autres Veolia, Renault, Alstom, Accor, Bouygues Telecom - se mettent désormais au diapason. C'est un mouvement de fond qui s'avère très positif.

SNCF


ACTIVITE
Ferroviaire


CA 2010
30,5 milliards d'euros


EFFECTIF
235 000 personnes dans 120 pays


VOLUME D'ACHATS
11,5 milliards d'euros


EFFECTIF ACHATS
700 personnes


NOMBRE DE FOURNISSEURS ACTIFS
27 000 personnes

Comment se singularise votre action?

Grâce aux moyens qui nous sont alloués, nous avons effectivement la possibilité d'expérimenter et de tester les achats durables au quotidien. Sans oublier un tableau de bord qui nous permet de piloter et de mesurer la performance de nos actions mois par mois. Les résultats sont ensuite partagés avec les chefs de départements achats, puis présentés lors des réunions de l'Ecomobile Club, comité de pilotage stratégique du développement durable de l'entreprise. Tel un centre de recherche et d'innovations, notre structure a pour vocation, à terme, de tirer le marché vers le haut en généralisant les pratiques les plus exemplaires.

De quelle manière déclinez-vous votre politique au niveau opérationnel ? Bien au-delà du simple militantisme, notre action se traduit à travers trois volets : les relations avec nos fournisseurs, les produits et prestations achetés, et les processus achats internes. Jusqu'à présent, nous nous sommes principalement attelés à ce dernier pan, mettant ainsi entre parenthèses l'évaluation RSE de nos prestataires. Car notre parti pris est le suivant : avant de vouloir changer les pratiques des autres, il faut avoir la volonté de changer les siennes. C'est pourquoi, nous préférons d'abord oeuvrer à l'évolution de notre coeur de métier, en transformant en profondeur nos processus et méthodes internes, plutôt que de faire signer une simple charte à nos fournisseurs. Un travail des plus ardus, mais qui confère plus de cohérence et de pérennité à notre démarche.

@ ARNAUD OLSZAK

Comment êtes-vous parvenu à transformer vos achats en interne ?

La mutation de nos savoir-faire et savoir-être passe aujourd'hui encore par un long travail d'accompagnement de nos acheteurs (mise en place de fiches achats durables par famille, nomination d'un coordinateur achats durables dans chaque équipe centrale ou régionale, etc.). Car c'est bien dans tous les process achats amont et aval que les acheteurs doivent intégrer des critères développement durable. D'ailleurs à la fin 2010, plus d'un dossier achats sur trois (cahiers des charges et documents de marchés) comportait au moins un critère de ce type. Pour gérer nos actions en fonction de priorités, sept catégories ont été traitées (mobilier, fournitures, nettoyages des gares, entretien des voies, etc.) et pour 22 autres, le travail est en cours.

Sur l'ensemble de nos familles, l'état d'avancement de notre démarche a été évalué à 26 %. Signe du succès remporté par cette stratégie, notre taux de pénétration «Développement durable», issu d'une moyenne de cinq axes - dont la transformation managériale et l'engagement individuel des acheteurs - est passé de 29 % en 2008 à 39 % en 2009, et à 55 % en 2010. Rappelons, d'ailleurs, à ce titre, que 96 % de nos acheteurs sont aujourd'hui évalués selon des objectifs achats durables et solidaires.

Quel bilan faites-vous de votre politique d'achats solidaires ?

On peut dire qu'il est positif puisque nous avons multiplié par quatre notre volume d'achats solidaires, passant de 5 millions d'euros en 2007 à 21 millions en 2010. Ce qui équivaut à l'emploi d'environ 535 travailleurs handicapés et 109 personnes issues de milieux en difficulté. Si, au départ, nous sous-traitions des prestations très «classiques», comme l'entretien des espaces verts, nous misons désormais sur des prestations plus proches de notre environnement industriel et ferroviaire, comme le traitement du contact client, la réparation de cartes électroniques, le nettoyage de nos gares, etc. Rappelons que notre objectif pour 2011 est d'atteindre un montant d'achats solidaires de 27 millions d'euros.

Quels sont vos futurs axes de travail ?

L'année 2011 représente pour nous celle de la consolidation. C'est pourquoi, nous allons passer à la vitesse supérieure sur l'ensemble des volets de notre politique d'achats durables. Concrètement, nous allons accompagner les acheteurs dans l'analyse détaillée de leurs 1000 dossiers d'achats les plus importants. En parallèle, nous allons travailler, en partenariat avec le cabinet EcoVadis, sur l'évaluation de la performance RSE de nos fournisseurs. Notre objectif d'ici trois ans : évaluer 500 entreprises. Enfin, nous allons poursuivre la conduite du changement en interne à deux niveaux : sur le plan stratégique, via la définition et la mise en oeuvre d'une feuille de route achats durables coconstruite avec chacun de nos clients internes, et sur le plan local, via l'appropriation sur le terrain des stratégies et méthodes achats durables et solidaires par les centrales d'achats interrégionales.

Biographie

Olivier Menuet, 43 ans, est ingénieur de formation. Fort d'une carrière de 17 ans dans les achats, il a occupé le poste de manager achats, notamment, chez Renault et Rhodia, avant d'intégrer en 2007, la SNCF en tant que directeur délégué achats durables et solidaires. Depuis 2005, il enseigne également les achats durables à HEC, Centrale, l'ESCP et l'EM Lyon.

 
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Charles Cohen

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