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Entrepôt connecté : la robotisation est sur les rails

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© Production Perig - stock.adobe.c
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La digitalisation et la mécanisation transforment la vie des entrepôts en concentrés de technologies innovantes. Mais alors que l'offre ne cesse de grossir, tout l'enjeu est de savoir quelle mutation concrète est adaptée, rentable et dans quelles conditions.

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Le géant de la grande distribution E.Leclerc a récemment opté une mutation en profondeur de ces centrales régionales. Les sites d'entreposage de Scapnor, Socamaine ou encore Scapalsace disposent désormais de nombreux robots et d'unités de préparation totalement automatisés. Dans un livre blanc publié en 2021 et consacré aux entrepôts de demain, Acteos, cabinet spécialisé dans les projets de digitalisation de la supplychain, souligne les résultats de cette transformation : une productivité en hausse de 24%, sept colis de plus préparés à chaque heure, un taux de remplissage de 93%, et un taux de fiabilité de chargement des palettes de 99%.

Retard du secteur industriel

Parmi les domaines les plus avant-gardistes sur ce plan, on trouve la parfumerie de luxe, l'agroalimentaire et la grande distribution. "Cette dernière a massivement automatisé ses dispositifs depuis 10 ans. Le secteur souffrait à l'époque d'un taux d'accidents du travail cinq fois supérieur par rapport à aujourd'hui, et d'un nombre considérable de problèmes de santé au sein de ses personnels liés aux tâches quotidiennes", explique Jean-David Attal, directeur général de Viastore Systems France, intégrateur de solutions intralogistiques. L'industrie en général affiche à l'inverse un retard : des investissements existent de façon non négligeable actuellement dans les lignes de production, mais plus rarement sur le volet logistique.

Pourtant, "cette évolution vers la robotisation semble inéluctable, poursuit-il. Dans un passé encore récent, le discours dominant consistait à dire "il faut voir si on veut vraiment le faire". Aujourd'hui, le mot d'ordre est plutôt "il faut voir si on vraiment ne pas le faire"."

Automatisation en cours depuis 5 à 10 ans

L'automatisation dans les entrepôts s'invite dans les projets de transformation depuis cinq à 10 ans. Le développement des flux imputables à l'essor du e-commerce et leur accélération à l'occasion de la crise mondiale de la Covid-19 expliquent cette évolution. Des phénomènes auxquels s'ajoutent la pénurie main d'oeuvre, les conditions de travail difficiles et la pénibilité des métiers dans les entrepôts.

En réponse aux besoins, plusieurs dizaines de start-ups proposant de la robotique innovante sont apparues en France au cours des dernières années, avec un succès parfois spectaculaire à l'image d'Exotec et sa solution baptisée Skypod, système de préparation de commande au détail qui a enregistré une croissance de 100% entre 2019 et 2020. "Cette nouvelle offre contribue elle aussi à accélérer la prise de décision de la digitalisation", constate Jean-David Attal.

Bien définir ses attentes

Les projets très structurés à l'heure actuelle concernent avant tout une minorité de grandes organisations : "bon nombre de PME auraient un intérêt fort à se transformer, mais elles ne savent pas par quel bout prendre ce type d'initiatives. Le manque d'investissement dans ce cas vient d'une méconnaissance", ajoute Jean-David Attal.

Méconnaissance de la méthode mais aussi des bonnes pratiques qui constituent le fil conducteur d'une mutation réussie. Au-delà des objectifs stratégiques trop généraliste comme la réduction des coûts ou l'augmentation de la productivité, la définition des attentes doit être précise : il peut s'agir par exemple d'une diminution des coups de fourche dans les palettes qui peuvent avoir des répercussions néfastes à plusieurs niveaux, d'une baisse quantifiée des émissions de CO2, de pouvoir assumer certains processus après à 18h, ou encore d'un taux de croissance amélioré sur des segments spécifique de la production.

Une bonne structure avant des produits innovants

L'état des lieux, l'analyse de l'existant, et les perspectives d'évolution envisagées pour les années à venir sont bien sûr au coeur des premières étapes. Pour connaître le schéma de dimensionnement de son entrepôt futur, les experts du domaine invitent à répondre à la question suivante : "à quelles promesses clients mon organisation doit-elle pouvoir répondre ?"

Dans un second temps, la rédaction du cahier des charges doit être élaborée en gardant à l'esprit par plusieurs priorités : la simplicité de la solution déployée, l'ergonomie des postes de travail, le calendrier de mise en oeuvre, la capacité du fournisseur à mettre en oeuvre la solution (équipes nécessaires, disponibilité sur le long terme, solidité financière du prestataire...), les solutions et l'organisation nécessaire pour la maintenance future.

"Il importe de se souvenir que la technologie le plus innovante n'est pas forcément la meilleure. Certaines entreprises disposent des bons produits, mais pas forcément des bonnes structures. Le degré d'engagement du fournisseur par rapport aux exigences de productivité doit être clairement défini. Pour les PME et ETI en particulier, un pilotage au niveau de la direction générale s'avère pertinent, avec par exemple un point mensuel sur l'avancement du projet, les difficultés rencontrées", préconise Karine Louarn, consultante en immobilier logistique pour la société Eol, et membre de l'association France Supply Chain.

La digitalisation, une menace pour les processus industriels ?

On peut également se demander si cette digitalisation n'est pas une menace pour les processus industriels. Ainsi, dans un contexte où les entrepôts sont de plus en plus connectés, les spécialistes de la cybersécurité tirent la sonnette d'alarme quant aux précautions indispensables qui doivent accompagner les projets. Les conclusions du récent rapport de Claroty, qui se penche sur les failles existantes en comparant le premier semestre 2021 et le premier semestre 2020, sont inquiétantes. En effet, les vulnérabilités globales dans les systèmes industriels bondissent de 41% et 71% d'entre elles sont classées en niveau de gravité élevé ou critique. Or, 61% des failles sont exploitables à distance, d'où l'importance de sécuriser les connexions et accès distants, ainsi que les objets connectés.

"Récemment, certains entrepôts ont été confrontés à des menaces d'interruption de la chaîne du froid. Les mentalités quant aux risques ont beaucoup évolué. Ils sont désormais pris très au sérieux, ce qui bien sûr déterminant dans ce type de projets. Nous sommes souvent face à des environnements peu ou pas sécurisés, avec des Windows obsolètes", s'inquiète Emmanuel LeBohec, directeur de France Claroty, spécialiste de la cybersécurité des systèmes industriels.

Une demande très forte de sécurité

Les structures nouvelles très digitalisées ne font pas particulièrement face à des difficultés sur ce plan. Mais les anciennes organisations qu'il s'agit de moderniser se retrouvent bien plus exposées aux risques. "Les hauts fourneaux par exemple, qui n'ont aucune raison d'être remplacés, peuvent se heurter à des complexités dans ce domaine. Une digitalisation en toute sécurité n'est pas impossible pour autant. Mais le coût est bien plus élevé", précise le directeur de France Claroty.

Yvan Rogissart, responsable de l'ingénierie chez le spécialiste de la sécurité Zscaler, remarque lui aussi une forte préoccupation en matière de sécurisation : "il y a une demande importante dans les entrepôts sur les accès 4G, les accès Wifi, de sorte que les opérateurs soient directement équipés avec des tablettes, des smartphones. Les entreprises dans ces cas une surcouche de sécurité, en s'assurant que les communications se font vis-à-vis des bonnes applications, dans un périmètre aussi restreint que possible."

Quels équipements pour l'entrepôt du futur ?

Parmi les innovations qui modifient le visage des chaînes logistiques, 4 équipements font toutefois figure d'incontournables :

  • Le convoyeur : lors de la réception d'une commande, il permet d'acheminer les marchandises du lieu de déchargement au lieu de stockage.
  • Le transtockeur de palettes : il s'agit d'un bras robotisé grâce auquel les produits peuvent être entreposés dans un rack, généralement à grande hauteur.
  • Le pick-to-light : un mode de prélèvement où le préparateur se retrouve assisté par des dispositifs lumineux qui le guident vers l'emplacement à prélever.
  • Les AGV (Automatic Guided Vehicle) : ce sont des véhicules entièrement autonomes qui assurent une fonction de chariots élévateurs.

"Un ROI de cinq à sept ans en moyenne"

"Avec son nouvel entrepôt robotisé Quai 30, La Redoute forme un symbole du virage technologique radical qu'opèrent de grandes organisations à l'heure actuelle. On peut aussi citer le projet de robotisation d'un entrepôt de Leroy Merlin, à Réault, qui sera d'ici peu entièrement mécanisé." Ces exemples mentionnés par le consultant Philippe Letard, habitué des projets digitaux d'envergure, font figure de partie visible de l'iceberg. "A l'heure actuelle, les projets importants de plus de 100 millions d'euros ne sont pas rares", précise-t-il. Si l'investissement initial s'avère conséquent, l'avantage économique au bout du compte ne fait aucun doute. Il estime le ROI "entre 5 à 7 ans en moyenne."

Les motivations à l'égard de ces initiatives concernent également l'amélioration de la qualité du travail, les conséquences positives sur les personnels, ainsi que l'intégration concrète de critères RSE. "Pour s'assurer que les opérateurs s'approprient leurs postes de travail, nous les incluons dès le départ dans la conduite du changement, en créant par exemple un poste de travail en réalité virtuelle afin de comprendre au mieux quelle disposition est la plus pertinente pour ce qui est des machines, des équipements... Car les personnels de terrain sont les mieux placés pour prendre des décisions concrètes véritablement en phase avec les différents bénéfices espérés", conclut Philippe Letard.

 
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