Turkish Aerospace : une stratégie d'intégration dans la supply chain aéronautique mondiale

Dans les chaînes d'approvisionnement aéronautiques mondiales, l'industriel turc Turkish Aerospace accélère sa montée en cadence. Déjà partenaire des grands noms du secteur, tels qu'Airbus, Boeing, ou encore Leonardo, l'entreprise ne se limite plus à la production nationale turque de défense. L'industriel construit aujourd'hui un modèle capable d'intégrer un écosystème de fournisseurs à l'échelle internationale. Et la conquête industrielle est redoutablement efficace, portée par un argument central qui est une organisation complète et autonome, mais surtout conçue pour s'ouvrir.

Les chiffres interpellent. " Nous utilisons plus de 200 fournisseurs locaux, et sommes en contact avec 300 fournisseurs internationaux... Nous avons investi 33 millions d'euros à l'international et plus de 250 millions d'euros en local ", détaille Emrah Ekri, manager Industrialization Operations chez Turkish Aerospace, ne laissant guère de doute sur les ambitions de l'industriel. Moins comme un sous-traitant, davantage comme un architecte capable de capter et redistribuer la valeur.

Un acteur intégré sur toute la chaîne de valeur

Turkish Aerospace affirme aujourd'hui une maîtrise complète du cycle de production, du composant à l'assemblage final. Concrètement, la société fabrique des pièces pour les programmes A400M, A320, A350, Boeing 737, mais égalemenlt pour ses propres plateformes, comme les hélicoptères Gökbey ou Atak, destinés aux forces armées turques.

Sur le plan industriel, cette autonomie est un levier d'efficacité. Les capacités internes atteignent 6 millions de pièces par an, auxquelles s'ajoutent 4 millions de pièces sous-traitées. La production repose sur plus de 500 fournisseurs actifs, avec une répartition géographique large en Europe, aux États-Unis, en Asie, et en Afrique.

Mais c'est du côté des relations fournisseurs que le virage est le plus significatif. L'entreprise revendique un rôle de "risk sharing partner" sur les grands programmes, c'est-à-dire un partage des responsabilités techniques, industrielles et parfois financières. Autrement dit, une co-responsabilité industrielle et financière avec ses partenaires. " Nous sommes ouverts à développer les capacités de chaque vendeur ensemble ", insiste l'expert. Il n'est pas question de dupliquer des relations client-fournisseur descendantes, il s'agit de procéder à une montée en compétences et au partage des feuilles de route.

Procédures d'intégration maîtrisées pour un écosystème en expansion

Pour intégrer un fournisseur, la méthodologie est la suivante. Le processus commence par une évaluation selon la norme AS/EN9100, suivie de la signature d'un NDA et d'un plan de travail détaillé. Ce dernier permet à l'industriel de tester la compréhension des exigences, l'adéquation technique, mais aussi la capacité du fournisseur à collaborer en mode projet. Une fois validé, le partenaire reçoit un ordre d'achat à long terme, assorti d'un accompagnement sur les matériaux ou la qualité. " Parfois, la pièce est complexe, et nous demandons un contrôle avec notre propre équipement. Mais parfois, l'enregistrement qualité repose sur le fournisseur ", précise Emrah Ekri.

Le modèle monte encore d'un cran avec un projet en gestation. La société prépare une nouvelle étape de développement de fournisseurs référents par zone géographique, capables de coordonner les activités d'autres sous-traitants dans leur région. Le manager Industrialization Operations explique : " Un fournisseur va gérer les autres fournisseurs sur une zone géographique donnée. Une nouvelle organisation voit le jour et participe au rééquilibrage des partenariats industriels à l'échelle mondiale."