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La filière des vins et spiritueux, de plus en plus responsable

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La filière des vins et spiritueux, de plus en plus responsable

Bio, commerce équitable, RSE, transition énergétique... la filière des vins et spiritueux fabrique des produits de plus en plus vertueux pour des consommateurs de plus en plus exigeants.

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Les préoccupations environnementales et sociales prennent de plus en plus d'importance dans l'acte d'achat des consommateurs de vins et spiritueux, poussant, si besoin était les producteurs à s'en préoccuper toujours davantage. Ainsi, selon une étude Opinion-way pour Bacardi-Martini datant de novembre 2020, 61% des Français disaient donner la priorité à des emballages de spiritueux et de boissons alcoolisées plus responsables qui utilisent moins de carton ou de papier (que ce soit un emballage cadeau ou de livraison en ligne). 59% d'entre eux souhaitaient acheter des spiritueux et alcools produits en France afin de limiter l'impact écologique des transports. Tandis que 56% du panel recherchait des spiritueux et des bouteilles d'alcool à moindre impact polluant.

Côté vin, ces critères sont moins présents, mais le marché est de plus en plus marqué par la dichotomie viticulture conventionnelle (utilisant des pesticides de synthèse) et biologique (où ils sont interdits). Si la viticulture bio ne représente que 14% du vignoble hexagonal, elle progresse chaque année et grignote petit à petit du terrain. Ce qui démontre, de la part des amateurs de vin, un souci de la santé des travailleurs de la vigne et des voisins des vignes traités, ainsi que de l'environnement.

Les producteurs de vins et spiritueux se doivent donc d'être de plus en plus irréprochables, mais aussi de faire attention au comportement de leurs fournisseurs. Ainsi, depuis février 2017, toutes les entreprises donneuses d'ordres doivent élaborer un "plan de vigilance'' afin de s'assurer du respect des règles relatives aux atteintes graves à l'environnement, au travail des enfants, aux conditions de travail proches de l'esclavage, aux manquements à la sécurité... par leurs fournisseurs.

Quand la viticulture contrôle sa matière première

Pour une entreprise de vins et spiritueux, devenir une entité 100% verte et responsable socialement, c'est d'abord s'assurer que sa matière première est ''vertueuse''. Lorsqu'on est vigneron et qu'on cultive ses propres vignes, on est en contrôle total de sa matière première, le raisin. Il est alors possible de demander la certification viticulture biologique (logos Eurofeuille ou AB), qui s'obtient au bout de trois ans d'abstinence concernant l'utilisation de pesticides de synthèse.

Il est aussi possible d'opter pour le label HVE, mis en place par le ministère de l'Agriculture, non contraignant quant à la réduction des pesticides, mais comportant un volet sur le traitement des déchets ou d'utilisation d'énergies propres (le label Terra Vitis est du même tonneau). Viennent ensuite les labels biodynamiques, Demeter et Biodyvin, qui vont plus loin que la viticulture bio et qui commencent même à accueillir dans leur cahier de charges des clauses sur le respect des droits des travailleurs ou la transition énergétique. Cependant, ils contiennent aussi des critères qui peuvent être considérées comme ésotériques (enfouir une corne de vache emplie de quartz à l'équinoxe de printemps, par exemple), ce qui freine de nombreux vignerons cartésiens.

La question de l'approvisionnement

L'affaire se complique lorsque l'entreprise viticole n'est pas vigneronne, mais négociante, c'est-à-dire qu'elle achète tout ou partie de sa matière première à des fournisseurs pour après les vinifier et les élever, puis les vendre. C'est par exemple le cas de la majorité des grandes maisons de champagne. Ici, il faut convaincre les apporteurs de raisin de se convertir au bio ou à l'HVE, sans pouvoir les y contraindre. C'est un peu le même problème pour les coopérative viticoles, dont certains membres tentent l'aventure bio, alors que d'autres résistent à ses sirènes. La situation est encore plus compliquée pour les producteurs de spiritueux. La majorité des grandes marques de vodka, de gin, de rhum ou de whisky (même le scotch whisky) ne produisent pas eux-mêmes ou pas la totalité de la matière première qui sera distillée (orge, pomme de terre, canne à sucre...). Ils l'achètent à des fournisseurs de la région, parfois même à l'étranger.

Au contraire du vin, les spiritueux ne sont donc souvent pas des produits fabriqués en circuit court.

De plus, les producteurs de spiritueux résidant sur des îles (en France, la Martinique et la Guadeloupe, par exemple), ne possèdent pas toujours des filières locales leur permettant d'acheter des bouteilles, des machines, des étiquettes ou des tonneaux de vieillissement et doivent donc les importer à grands frais (financiers et impact carbone). Cependant, même si c'est moins rapide que dans le vin, le bio progresse dans l'univers des spiritueux. Par exemple, les rhums martiniquais Neisson, A1786 et le guadeloupéen Bologne, proposent désormais des cuvées labellisées bio.

Lire la suite en page 2 : Cas pratiques - Des vins et spiritueux de plus en plus locaux et équitables


Des vins et spiritueux de plus en plus locaux et équitables

Voyons comment les entreprises des vins et spiritueux (producteurs et fournisseurs) gèrent la pression autour des questions sociales et environnementales, et comment cela se reflète dans leurs achats.

Fair, le rhum équitable et bio

Alexandre Koiransky a créé en 2009 une marque de spiritueux en commerce équitable qui commercialise du gin, de la vodka et du rhum. Pour lui, le commerce équitable et le développement durable sont liés. "Il ne peut pas y avoir de transition énergétique pour les agriculteurs, ceux qui fournissent la matière première (quinoa, canne à sucre...), si on ne commence pas par les payer correctement, explique-t-il. Sans moyens, ils ne pourront pas transformer leurs outils de production et investir dans les énergies renouvelables ou le bio." Par exemple, Fair achète le rhum vieilli qui entre dans leur assemblage 15% plus cher que le prix moyen pratiqué au Belize.

Au lieu de faire 6% de marge sur une bouteille comme certains de ses concurrents, Fair se contente de 45%, et reverse 2,5% de son chiffre d'affaires pour que des audits sérieux soient pratiqués sur ses fournisseurs. De plus, le gin et la vodka de la marque sont désormais bio. Fair a aussi décidé de bannir toute trace de plastique sur ses packagings d'ici 2022. Par exemple, les bouchons seront désormais en liège et en bois. Reste le problème du poids des bouteilles et donc du bilan carbone, qu'Alexandre Koiransky compte appréhender en optant au fur et à mesure pour des flacons moins lourds.

Drappier, la maison de champagne zéro carbone

La maison de champagne Drappier s'est fixée comme objectif de devenir une entreprise 100% neutre en carbone il y a 14 ans et a obtenu en 2016 la certification EcoAct. Cela ne signifie pas que la maison n'émet pas de carbone, mais que son bilan est équilibré. Dans un premier temps, elle a travaillé à baisser au maximum ses émissions en optant pour l'énergie solaire (tous les toits des bâtiments sont équipés), en remplaçant au fur et à mesure les véhicules à énergie fossile par des véhicules électriques (y compris les tracteurs). Les bouteilles, allégées, sont produites en verre recyclé à proximité, dans le bassin parisien. Les barriques utilisées pour élever certaines cuvées ont été façonnées à partir de chênes locaux. Tous les effluents viticoles sont épandus sur des terres agricoles pour les amender... Tout le carbone que la maison ne peut économiser (voyages de commerce, envoi de bouteilles...) est compensé par un investissement dans un parc éolien en Inde.

Oeneo, le fournisseur responsable qui mise sur le local

Directeur juridique et RSE, Jean-Christian Lamborelle a rejoint Oeneo en mars 2019, notamment pour organiser une politique RSE transversale entre les différentes activités du groupe (élevage, bouchage, solutions de gestion de la production du vin...). Parmi les engagements pris par ce fournisseur haut de gamme de la filière vins et spiritueux : pérenniser les ressources que constituent les forêts face aux impacts liés au changement

climatique et préserver les savoir-faire traditionnels nécessaires aux métiers du groupe. "Un certain nombre de leaders à marque forte se sont engagés auprès de leurs consommateurs à améliorer leurs pratiques, réduire leurs impacts, et cela passe aussi par lechoix de leurs fournisseurs, explique Jean-Christian Lamborelle. Pour répondre à ces enjeux environnementaux et sociétaux, il nous appartient de nous transformer." Cette année, Diam Bouchage a initié un grand programme de réactivation des subéraies françaises, avec un premier projet dans le Var. Pour ses barriques, Seguin Moreau se fournit prioritairement en chênes français issus de forêts gérées par l'ONF et certifiées PEFC. Pour Oeneo, il s'agit aussi de transmettre les savoir-faire traditionnels, comme la levée du liège ou les métiers de la tonnellerie.

Bacardi, cap sur la bouteille 100% biodégradable

Bacardi, un des géants du rhum, annonce qu'il va, à partir de 2023, utiliser une bouteille de spiritueux biodégradable à 100 % en 18 mois. À partir de cette date, les 80 millions de bouteilles produites remplaceront les anciens modèles, ce qui permettrait au groupe de bannir toute trace de plastique de son packaging.

 
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