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Rémunération : comment incentiver ses acheteurs sur la RSE?

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Rémunération : comment incentiver ses acheteurs sur la RSE?

Si en termes de rémunération, la fonction achat bénéficie encore trop peu d'une variable délinée sur les enjeux RSE, de plus en plus de directions achats sautent le pas.

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En 2019, le groupe de luxe Hermès a annoncé lors de son assemblée générale que 10 % de la rémunération variable de son dirigeant Axel Dumas serait désormais soumise à des critères RSE comme la consommation d'énergies industrielles ou l'ancrage territorial des sites. Un effet d'annonce certes mais qui semble augurer de nouvelles pratiques en termes de variables de rémunération. A leur niveau, comment les directions achats incentivent-elles leurs équipes sur des critères extra-financiers ?

10 À 20 % DE VARIABLE BASÉE SUR DES CRITÈRES RSE

Rappelons que les entreprises labellisées RFAR (pour relations fournisseurs et achats responsables) ont l'obligation d'avoir des objectifs RSE pour les acheteurs, et de minimiser la part économique dans les objectifs impactant les rémunérations variables. Ainsi, parmi les 87 entreprises labellisées (en date du 1er juillet 2023), les entreprises telles que Enedis, Aéroports de Paris (ADP), GRDF, ... ont des critères RSE dans leur rémunération achats. Le label implique de fixer une politique cohérente de rémunération des acheteurs et cite comme bonnes pratiques le fait de « fixer des objectifs qualitatifs annuels d'achats responsables à tous les niveaux de la fonction achats, et/ou mettre en place des objectifs quantitatifs et mesurables à tous les niveaux de la fonction achat qui intègrent les critères pour des achats responsables ». Et en cas de part variable de rémunération, « il s'agit de veiller à la cohérence des critères d'attribution avec l'ensemble des principes d'achats responsables, et ce pour tous les niveaux de la fonction achat ».

Pour Timothée Quellard, cofondateur d'ekodev, cabinet de conseil en expertise RSE et stratégie climat, acteur de la branche Energy & Environment du groupe EPSA « généralement, les critères extra-financiers peuvent représenter de 10 à 20 % d'une variable dans la rémunération des acheteurs ». Il peut également s'agir d'un 13e mois. Mais cette variable dépend de la taille de l'entreprise. De plus en plus de directions achats des grands groupes incentivent leurs acheteurs sur des critères RSE. Mais dans une grande majorité des cas, « ceux-ci sont principalement liés au montant des achats dans le secteur protégé et/ou adapté, au nombre de marchés passé avec des critères RSE, aux business review des fournisseurs, et à la part de l'évaluation fournisseurs faites avec des plateformes notamment », souligne Fanny Bénard, directrice générale associée de BuyYourWay France, cabinet de conseil en achats responsables. Il semblerait que les objectifs soient davantage axés sur les critères sociétaux qu'environnementaux. Une des raisons pouvant être la difficulté de mesure de ces derniers. Ce que confirme la directrice générale de BuyYourWay pour qui « il est plus difficile d'avoir des objectifs quantitatifs car les mesurer est plus spécifique en fonction des différentes catégories d'achats ».

Des KPI's à définir au cas par cas

Une des premières difficultés est d'avoir une grille de lecture unique. Or, « les sujets de RSE sont souvent traités en mode projet, il n'y a pas encore de réel poste achats dédié à ces sujets-là. Sans compter que les indicateurs diffèrent selon les secteurs d'activité des entreprises », souligne Cléo Gouiffes, Managing Consultant au sein du cabinet de recrutement Robert Walters. Ainsi, « il paraît difficile d'incentiver les acheteurs selon des critères RSE communs à toutes les entreprises ». Autre problématique, celle de la formation et/ou de manque de compétences sur ces sujets. Pour Timothée Quellard, cofondateur d'ekodev, cabinet de conseil en expertise RSE et stratégie climat, acteur de la branche Energy & Environment du groupe EPSA, « Beaucoup de grandes entreprises ont bien intégré les enjeux et les demandes légales de reporting extra-financier avec la notation Ecovadis notamment. Mais les formalités restent très théoriques et la mise en application reste difficile à faire redescendre dans les métiers ». Même son de cloche pour Cléo Gouiffes de Robert Walters : « Les critères RSE peuvent s'intégrer dans une rémunération variable mais en fonction des domaines d'achats cela peut s'avérer complexe car selon les zones d'achats la réglementation dans certains pays ne permet pas d'appliquer l'ensemble des critères RSE ».

Avec les enjeux de décarbonation et de la prise en compte du scope 3 mais également du plan de stratégie nationale de biodiversité (SNB) 2030 fixé par la France, de nouveaux critères RSE liés à la biodiversité ou à la zéro déforestation ont été mis en avant. C'est désormais tout un champ des possibles qui s'ouvre pour les achats.

ENCADRÉ 1

Témoignage Jean-Nicolas Lintz, CPO du groupe Demathieu Bard.

« 20 % de la prime des acheteurs est basée sur des indicateurs RSE redéfinis chaque année »

Le groupe Demathieu Bard a pris des engagements RSE qui reposent sur quatre piliers (réduction de l'empreinte environnementale, construire durable, contribuer au développement des territoires et affirmation des valeurs RSE) déclinés en 20 mesures de progrès. Chaque année, en lien avec le Comité de Pilotage Développement Durable, la direction achats définit une thématique. « En 2021, nous avons travaillé sur des critères sociétaux que nous avons partagés avec nos sous-traitants en ayant un focus sur l'éthique et le respect des droits humains. En 2022, nous avons mené une action forte pour améliorer le tri à la source des déchets. Les acheteurs, partout sur le territoire, ont donc référencé, sur la base d'audits, des prestataires à même de nous accompagner et ont intégré dans leurs négociations avec nos sous-traitants un critère spécifique sur le respect du tri. En 2023, nous avons élargi les critères de sélection pour mieux tenir compte d'aspects sociaux tels que l'insertion ainsi que d'aspects environnementaux en développant nos partenariats et en proposant des variantes « bas carbone » », développe Jean-Nicolas Lintz, CPO de Demathieu Bard. Ainsi, 20 % de la prime des acheteurs sont basés sur des critères en lien avec la thématique retenue. « Cette prime globale est variable annuellement. Mais 20 % de son montant est calculé sur la base d'indicateurs RSE définis chaque année. Il s'agit la plupart du temps d'indicateurs personnels », précise le CPO du groupe. Enfin, le groupe a fondé son accord d'intéressement pour partie sur la baisse de son empreinte carbone et l'évolution de sa note Ecovadis.

 
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