Achats d'énergie à l'heure des conflits géopolitiques : comment manoeuvrer dans un océan d'incertitudes et d'opportunités ?
Àu regard des tensions géopolitiques qui se multiplient, les entreprises doivent repenser leurs stratégies d'achat d'énergie pour naviguer dans un paysage incertain. Le'ouverture du congrès Gazelec dont Décision Achats est partenaire fut l'occasion de répondre à la question suivante: Comment la géopolitique redéfinit-elle le processus d'approvisionnement et les relations commerciales ? Pour y répondre, une table ronde a rassemblé des experts pour discuter des enjeux géopolitiques impactant les achats d'énergie. Sylvain Cognet-Dauphin, de S&P Global Commodity Insights, Fabien Nguyen, directeur achats, énergie Europe chez Carrefour, Matthieu Espinas d'Axpo France et Fabrice Cambre, responsable des achats européens d'énergies chez Lesaffre, apportant des perspectives sur les défis actuels du secteur.
Je m'abonneAléas géopolitiques : des facteurs d'imprévisibilité pour les entreprises
" La géopolitique est devenue un facteur décisif dans les décisions d'achat. Il y a plusieurs facteurs de risques. La première incertitude qu'on voit chez S&P c'est la consommation ", résume Sylvain Cognet-Dauphin. 2022 reste une année marquée par de nombreux bouleversements, notamment avec la guerre en Ukraine qui a provoqué des ruptures d'approvisionnement en matières premières essentielles, mettant en évidence la vulnérabilité des entreprises dépendantes de certaines régions du monde. Il y a un an le Hamas a mené une attaque qui a entraîné des répercussions importantes dans le Moyen-Orient créant une instabilité sur le marché et bouleversements des chaînes d'approvisionnement.
Les tensions entre grandes puissances, comme celles entre les États-Unis et la Chine, exacerbent également l'imprévisibilité des marchés. " Ce qui se passe en Asie influence ce qui e passe en Europe aujourd'hui. Les entreprises doivent être prêtes à ajuster rapidement leurs stratégies pour faire face à des sanctions ou à des barrières commerciales ", ajoute encore l'expert. En conséquence, les entreprises sont contraintes de diversifier leurs sources d'approvisionnement, ce qui nécessite une compréhension approfondie des dynamiques géopolitiques en jeu.
Volatilité des marchés énergétiques
" Les achats d'énergie sont des achats stratégiques. L'achat d'énergie et la décarbonation vont de pair et se rendent service mutuellement ", remarque Fabrice Cambres. En effet, la volatilité des marchés énergétiques est souvent le reflet de tensions internationales sous-jacentes ce qui oblige les entreprises à naviguer dans un paysage où les prix du pétrole et du gaz fluctuent en fonction de ces développements politiques. Cambres précise encore : " L'acheteur doit être expert dans tous les domaines et les couvrir intégralement. Il y en a nombreux en électricité, en gaz, en décarbonation sur la France mais également il faut multiplier par le nombre de pays ou vous suivez. C'est une quantité d'information qu'il faut digérer et qui est considérable. "
Pour certains acteurs, cette volatilité représente un risque majeur, mais pour d'autres, elle ouvre des opportunités d'investissement. Les entreprises qui adoptent une stratégie proactive, en investissant dans des sources d'énergie renouvelables ou en diversifiant leurs portefeuilles, peuvent tirer parti de cette instabilité. Ce qui est certean, c'est que la transition énergétique est désormais incontournable : les acteurs qui s'engagent vers des pratiques plus durables peuvent non seulement se protéger des chocs géopolitiques, mais aussi se positionner comme des leaders sur le marché mondial.
L'émergence de nouveaux métiers face aux défis du secteur
En ce qui conserne les évolutions sur la scène mondiale, elles redessinent le paysage des achats et nécessitent l'apparition de nouveaux rôles et compétences. Comprendre les effets des tensions internationales sur les chaînes d'approvisionnement devient primordial et exige des savoir-faire spécifiques. Ainsi, les entreprises cherchent à recruter des talents capables d'évaluer les risques géopolitiques et d'anticiper les impacts sur leurs opérations. Une formation continue et une sensibilisation aux périodes de forts troubles sont désormais indispensables. L'enjeu est d'anticiper avec précision les besoins énergétiques futurs et de définir une politique de gestion des risques en phase avec l'évolution du contexte économique de l'entreprise.
Vers une clarification des rôles et des enjeux de rémunération
À mesure que les enjeux géopolitiques se complexifient, il devient essentiel de clarifier les rôles au sein des équipes d'achat. Alors, la collaboration entre les départements d'achat et de gestion des risques parait d'une grande importance.
Pour engager, l'incentive demeure primordiale et la question de la rémunération devient centrale. Actuellement, les entreprises se retrouvent dans une situation ou elles doivent réfléchir à des modèles de rémunération qui tiennent compte de la complexité croissante des achats. Les acteurs sont tenues de considérer leur modèle d'intégration, à l'instar de ce qui s'est passé avec certains acteurs gaziers dans le passé. Une rémunération alignée sur les résultats et la prise de risques peut encourager l'innovation et l'adaptabilité. En offrant des incitations basées sur la performance, les entreprises peuvent motiver leurs équipes à développer des solutions innovantes pour surmonter les défis.
Comment équilibrer le rapport de force entre acheteurs et fournisseurs ?
L'équilibre entre acheteurs et fournisseurs est également redéfini par les enjeux géopolitiques. " La collaboration devient essentielle pour naviguer dans un environnement instable ", affirme Matthieu Espinas. Les entreprises doivent établir des partenariats solides avec leurs fournisseurs pour anticiper et gérer les risques.
"Les entreprises qui établissent des relations de confiance avec leurs fournisseurs peuvent mieux s'adapter aux chocs ", explique le responsable des achats européens d'énergies chez Lesaffre. En partageant les informations sur les risques géopolitiques, les entreprises peuvent mieux planifier et ajuster leurs stratégies d'achat. Cela nécessite une transparence accrue et un engagement envers la collaboration, ce qui peut renforcer la résilience globale des chaînes d'approvisionnement.