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Les achats responsables ne sont pas un objectif prioritaire

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Les achats responsables ne sont pas un objectif prioritaire
© Sergey Nivens - Fotolia

En 2019, il apparaît que les achats vont surtout contribuer à la politique RSE de l'entreprise sur des aspects liés à l'environnement et à l'économie circulaire. Un pourcentage très supérieur à d'autres thèmes RSE, tels que les droits humains, la notion de territorialité, le handicap ou l'insertion.

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"Sujet très en vogue depuis plusieurs années, valorisant pour la fonction, il n'en demeure pas moins que les achats responsables ne sont toujours pas une réalité", commente Olivier Wajnsztok, directeur associé de AgileBuyer, au vu des résultats de son étude annuelle "Tendances et achats des Priorités des départements achats en 2019" et grand chef d'orchestre de cette étude. "Ou tout du moins une priorité. Seules 46% des personnes interrogées déclarent avoir des objectifs liés au développement durable et à la RSE, un pourcentage en baisse de 4 points par rapport à 2018 et qui atteint là l'un de ses plus bas niveaux depuis que cette étude existe."

Les achats responsables restent un incontournable dans la sphère publique

Sur le thème des achats responsables, on observe toutefois une différence substantielle entre le secteur privé et le secteur public : si 44% des acheteurs du privé affirment avoir des objectifs achats liés au développement durable et à la RSE, ils sont près de 67% dans le public, soit 24 points de plus. "Un tel écart peut s'expliquer par le fait que les directives européennes sur lesquelles s'appuient les politiques d'achats publiques encouragent les acheteurs des entités et des structures publiques à réaliser des achats dits responsables", commente commente Olivier Wajnsztok. "Et cela parallèlement aux volontés affichées par les élus."

Dans le secteur privé, au-delà du respect de telle ou telle norme, le politique de l'entreprise n'est pas obligatoirement orientée développement durable. Toutefois, les grandes entreprises doivent désormais produire un rapport RSE pour lequel les achats sont souvent sollicités. Au demeurant, une minorité d'acheteurs possède de réels objectifs en la matière. Pour d'autres, un tel objectif n'est pas facile à concrétiser.

Une préoccupation plus importante au sein des grandes entreprises

Autre tendance notable : il existe une corrélation entre la taille de l'entreprise et les objectifs liés au développement durable et à la RSE. Ainsi, au sein des grandes entreprises de plus 5.000 salariés, 48% des répondants ont des objectifs en matières d'achats responsables, soit 5 points de plus que la moyenne du panel. Une proportion que l'on ne retrouve pas dans les ETI (44%) et surtout dans les PME (39%). Plusieurs raisons peuvent être avancées : la responsabilité des grandes entreprises est souvent engagée et scrutée, la réputation et les risques d'images sont des sujets très sensibles au sein des grands groupes, les effectifs achats sont plus étoffés et permettent de dédier des ressources au sujet, les dirigeants des petites entreprises sont davantage orientés business et les achats responsables ne sont pas une priorité, etc.

Quelques branches d'activité en pointe sur le sujet

Statistiquement, une branche d'activité se distingue clairement des autres : 93% des acheteurs évoluant dans le secteur de la communication et des médias ont des objectifs achats liés au développement durable et à la RSE. Plusieurs raisons peuvent expliquer un tel écart avec les autres branches : des risques d'images et de réputation connus et bien appréhendés, la volonté de s'appliquer à soi-même les conseils donnés à ses clients, la digitalisation des métiers, etc.

Parmi les autres secteurs, les entreprises de services sont, dans l'ensemble, plus sensibles au développement durable et à la RSE : 61% des acheteurs des banques, de finance et des assurances sont incentivé sur les achats responsables, 56% dans le conseil et la formation ou 52% dans le tourisme. A l'inverse, les acheteurs dans l'industrie semblent moins concernés : 25% dans l'automobile, 35% dans l'aéronautique ou 42% dans la mécanique et la métallurgie.

Environnement et économie circulaire comme actions RSE

En 2019, il apparaît que les achats vont surtout contribuer à la politique RSE de l'entreprise sur des aspects liés à l'environnement et à l'économie circulaire, selon 63% des personnes interrogées. Un pourcentage très supérieur à d'autres thèmes RSE, tels que les droits humains (32% des répondants), la notion de territorialité (30%), le handicap (25%) ou l'insertion (17%).

Pour rappel, l'économie circulaire est un concept économique qui s'inscrit dans le cadre du développement durable et qui s'inspire notamment des notions d'économie verte, d'économie de l'usage ou de l'économie de la fonctionnalité, de l'économie de la performance et de l'écologie industrielle.

Le suivi des délais de paiement fournisseurs : un sujet toujours sensible

Le respect et le pilotage des délais de paiement sont des sujets extrêmement sensibles des relations fournisseurs. Ainsi, 31% des acheteurs interrogés affirment que le respect des délais de paiement fait totalement partie de leur mission et de leurs objectifs, quand 29% déclarent le suivre souvent. Toutefois, près de 21% des répondants déclarent que leur service achats n'a pas d'objectifs en la matière, un résultat en hausse de 5 points. Un résultat qui s'explique par le fait que, dans certaines organisations, l'acheteur n'est pas nécessairement la personne qui déclenche le paiement et qu'il ne peut donc être responsable du respect des délais de paiement.

Lire la suite en page 2: Les directions achats restent attentives à l'éthique des affaires - Start-ups : des fournisseurs pas si favorisés que cela

Pour rappel, le respect des délais de paiement est l'un des fondements de la Charte Relations Fournisseurs Responsables. Conçue en 2010 par la Médiation des entreprises et le Conseil national des achats, cette charte a pour but d'inciter les entreprises et organisations publiques à adopter des pratiques d'achats responsables vis-à-vis de leurs fournisseurs. Par le biais de ses 10 engagements pour des achats responsables, cette charte participe à la construction d'une relation équilibrée et durable entre les grandes entreprises et leurs fournisseurs, dans la connaissance et le respect des droits et devoirs respectifs de chaque partie. A ce jour, le volume d'achats des entreprises signataires de la Charte Relations Fournisseurs Responsables est de près de 600 milliards d'euros. Dans le prolongement de cette charte, la Médiation des entreprises et le Conseil National des Achats ont également créé en 2012 le Label Relations Fournisseurs & Achats Responsables. Aujourd'hui, 41 entreprises sont auditées et labellisées, ce qui va au-delà d'une charte d'engagements.


Les directions achats restent attentives à l'éthique des affaires

Si l'année 2019 annonce des relations potentiellement plus tendues avec les fournisseurs et donc de possibles dérives, l'éthique des affaires reste une préoccupation centrale des directions des achats. Dans ce sens, près de 67% des personnes interrogées déclarent avoir été formées au cours des 24 derniers mois à l'éthique des affaires. A noter une différence notable pour le secteur public, où "seuls" 59% des acheteurs publics ont suivi ce type de formations, soit 8 points de moins que la moyenne du panel.

"D'une manière générale, les directions des achats restent très vigilantes sur le sujet de la corruption, particulièrement dans les grandes entreprises", souligne Olivier Wajnsztok. "A ce titre, la Loi sur la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique (dite "Sapin 2"), adopté par le Parlement le 8 novembre 2016 et validée définitivement par le Conseil constitutionnel le 8 décembre 2016, ne nécessite d'actions spécifiques "que" pour 28% des personnes interrogées." Pour rappel, cette Loi a pour ambition de porter la législation française aux meilleurs standards européens et internationaux en matière de lutte contre la corruption et de contribuer ainsi à une image positive de la France à l'international. L'un des projets phares de cette Loi est notamment de mieux prévenir et détecter la corruption. Pour ce faire, deux dispositifs ont été mis en place : la création d'une Agence nationale de prévention et de détection de la corruption d'une part, et une obligation de vigilance applicable aux grandes entreprises (> 500 salariés et ayant un chiffre d'affaires > 100M d'euros) d'autre part, afin que ces dernières mettent en oeuvre des procédures de détection et de prévention des faits de corruption ou de trafic d'influence (par exemple, un code de conduite ou un programme de formation du personnel). Cette obligation concerne environ 1.570 groupes qui, au total, emploient 5,3 millions de salariés en France.

"Tous nos acheteurs sont formés à la déontologie", commente Pascal Pelon, directeur des achats chez Axa France. "Une déclaration d'absence de conflits d'intérêts est demandée à chacun d'entre eux annuellement."

Arnaud Choulet, directeur achats Groupe chez Korian souligne quant à lui que "Les acheteurs et les fournisseurs signent notre charte des achats responsables."

Start-ups : des fournisseurs pas si favorisés que cela

Alors que les start-ups sont généralement considérées comme des fournisseurs innovants mais à risques, notamment en termes de dépendance économique, très peu de donneurs d'ordres ont finalement mis en place un processus pour simplifier le sourcing et surtout la collaboration avec cette typologie d'entreprises. Seuls 16% des acheteurs affirment en effet s'appuyer sur un processus défini en interne pour simplifier le travail avec les start-ups. A noter qu'une part non négligeable des personnes interrogées (21%) ne semble pas être au courant de l'existence ou non de ce type de dispositif, ce qui dénote un certain manque de communication en interne.

"La recherche d'innovations ne peut se faire sans l'accès aux start-ups ou scale-ups", souligne Pascal Pelon. "Nous expérimentons actuellement un processus allégé d'entrée en relation avec elles, sans remettre en cause toutefois nos obligations en termes de protection des données personnelles ou de sécurité informatique".

Parmi les 16% ayant répondu positivement, seulement 30% estiment que le dispositif mis en place pour simplifier le travail avec les start-ups a atteint son rythme de croisière. Au contraire, ils sont près de 65% à penser que ce type de process est encore en phase de lancement voire d'expérimentation. Des résultats qui prouvent, s'il y a lieu, qu'il n'est pas toujours facile d'intégrer des start-ups à ses panels fournisseurs, particulièrement pour les très grands comptes.

"Uniquement 16% d'acheteurs s'appuyant sur un processus défini en interne pour simplifier le travail avec les start-ups... c'est très peu", commente Karine Alquier-Caro, directrice achats chez Legrand. "Les directions achats agissant en transverse des programmes d'innovation et d'accélération dans le digital des entreprises doivent être acteur du process. Sinon, ces relations s'instaureront sans nous et serons hors de notre domaine accessible. Cela me rappelle une rencontre au CES 2018 à Las Vegas où un jeune start-upper, à qui je demandais de m'expliquer son business case et son concept, m'a répondu : "Ah non, les achats, je ne dois pas leur parler !"

Parmi les branches d'activité, c'est très clairement dans le secteur des services et du BtoC, très friands de solutions innovantes, que des dispositifs spécifiques pour collaborer avec les start-ups ont été mis en place : 28% des répondants dans le tourisme, 27% dans la banque, la finance et les assurances, ou encore 22% dans l'informatique et les télécoms. A l'inverse, une minorité d'entreprises industrielles se sont dotées d'un processus adapté aux start-ups : 5% dans l'industrie lourde, 9% dans l'automobile, 11% dans la métallurgie ou dans la mécanique.


 
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