Achats de prestations intellectuelles : vos bonnes pratiques
Si le critère prix reste essentiel, les acheteurs sont très attentifs aux critères qualité des livrables, respect des délais, création de valeur et RSE, attentifs à vraiment accompagner le besoin interne et à maîtriser les risques. Et la question des freelances se pose avec de plus en plus d'acuité
Je m'abonneChaque année, le Baromètre des Achats de Prestations Intellectuelles*, réalisé par le Club des Acheteurs, en partenariat avec le Conseil National des Achats et Décision Achats, permet de faire un point sur les pratiques des acheteurs en la matière. Les résultats de l'édition 2018 ont été présentés fin novembre à Paris. Revues de détails.
Entrant directement dans le vif du sujet, l'animateur de la soirée a détaillé le poids en volumes d'achats des trois sous-familles représentant les prestations intellectuelles (PI) : prestations informatiques (75 %), études & conseil (69 %) et formation (35 %). On le voit, c'est une catégorie très spécifique, qui nécessite de la part des acheteurs une très bonne maîtrise des différents enjeux métiers de l'entreprise.
S'agissant du détail de la mission et du fonctionnement du service achat (aide à la formalisation et sécurisation du besoin, aide à la rédaction du cahier des charges, benchmark, rencontres informelles, sourcing...), 70 % des répondants indiquent qu'ils accompagnent leur client interne dans l'expression de leur besoin, 62 % organisent des réunions informelles avec des prestataires avant de lancer la consultation, 54 % rencontrent des freelances en amont et 53% procèdent à une veille digitale.
"En ce qui nous concerne, nous avons transformé notre manière de fonctionner sur ces 10 dernières années", a commenté Laurent Bavière, chef du pôle stratégies d'achats du Minarm, qui s'avère le plus gros acheteur public avec un budget de près de 20 milliards d'euros avec l'armement. "Avant, nos achats étaient très atomisés. Aujourd'hui, nous avons diminué le nombre de services achats en interne et procédé à une spécialisation par segments. Grâce à cette nouvelle organisation, nos services n'achètent désormais plus que ce qui relève de leur coeur de métier, de manière mutualisée au profit de l'ensemble du ministère. Les PI, n'échappent pas à la règle, cela représente un budget de l'ordre de 300 millions d'euros. Nous avons, spécifiquement pour le conseil métier et pour les prestations intellectuelles informatiques, créé un poste de référent ministériel, positionné entre le service achat et le bénéficiaire. Nous sommes sur des segments qui n'ont pas de prescripteur structuré, le référent a pour mission d'aider les bénéficiaires, notamment pour mûrir son besoin. Il facilite le processus d'analyse des opportunités d'achats, mais n'en n'est pas juge".
Le poids du prix...
Sans surprise, sur les critères de sélection d'un prestataire, le prix arrive en première position : 72% des répondants pensent que le poids du prix dans la sélection d'un prestataire est fort. Suivent ensuite la qualité des livrables, le respect des délais, la création de valeur et la RSE. Pour Publicis, le timing fait partie des critères les plus forts : "j'ai des projets à deux jours : la pression est très forte, il faut aller vite et c'est pourquoi nous travaillons avec beaucoup de prestataires extérieurs", a souligné Marie-Madeleine Salmon, responsable informations, achats d'études et outils chez Publicis. Sachant que la question des freelances se pose avec de plus en plus d'acuité, leur nombre progressant de plus en plus. Entre les auto-entrepreneurs, les plateformes numériques collaboratives ou le portage salarial, les entreprises ne manquent pas d'options en matière d'achats de prestations intellectuelles.
Si 59 % des répondants indiquent avoir une politique de référencement, 78 % misent sur l'ouverture. "Chez Publicis, nos panels sont ouverts, pour faciliter la détection des innovations", a-t-elle confié. Le baromètre détaille également les méthodes de sourcing et il ressort que 73% des répondants s'appuient sur les recommandations des clients internes, 64% sur les réseaux d'acheteurs, 35% sur les plateformes en ligne et 30% sur les grands cabinets de conseil.
Seuls 29 % des répondants déclarent externaliser la gestion de certains familles d'achats PI. Il s'agit logiquement de celles réclamant une expertise plus pointue, en l'occurrence les PI concernant les systèmes d'information et les télécom (48 %) et celles portant sur les bureaux d'étude (46 %). Pour Marie-Madeleine Salmon, il n'est pas question d'externaliser des achats PI stratégiques. "Nous conservons en interne les achats concernant la création de valeur : c'est ce qui fait la marque de fabrique de Publicis".
A la question des risques fournisseurs (délit de marchandage, risque URSSAF, risque de requalification, dépendance économique, prêt de main d'oeuvre illicite, ...) 46 % des acheteurs répondent qu'ils peuvent gagner encore en maturité et 51 % n'ont pas encore établi de plans en la matière. Pour le Minarm, le risque juridique est bien couvert : "Nous travaillons avec des professionnels spécialisés par segment et notre culture juridique, héritée de la commande publique, limite les problèmes. Le risque achats est plutôt celui de la performance, au sens large", a affirmé Laurent Bavière. Une sécurisation de bon aloi car on peut supposer, avec la digitalisation de l'économie et le besoin permanent de nouvelles compétences, que le nombre de prestations intellectuelles à acheter va continuer d'augmenter. Cqfd.
* 406 professionnels ont collaboré à cette seconde édition, qui a été réalisée en ligne, du 6 septembre au 5 octobre 2018.
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