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(Tribune)" Oui" aux primes liées aux gains pour les acheteurs

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(Tribune)' Oui' aux primes liées aux gains pour les acheteurs

Faut-il attribuer aux acheteurs une prime liée aux gains générés par leur travail? Oui. Mais de façon équilibrée par rapport à d'autres objectifs plus qualitatifs et adaptés au contexte de l'entreprise. Il faut les moduler en fonction des enjeux du moment et de la situation financière.

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Faut-il attribuer aux acheteurs une prime liée aux gains générés par leur travail? Voilà un sujet pertinent lancé sur la page LinkedIn de Décision Achats, bien loin, à la réflexion, d'un "marronnier" des sujets achats et qui pose une vraie question de management sur laquelle les entreprises ont encore des approches trop disparates. A ce titre, on peut même s'interroger sur la question, s'agit-il seulement, dans nos entreprises, de donner davantage de primes, liées aux gains, ou bien d'octroyer aux acheteurs une part variable ? Petit tour des forces en présence...

Les arguments en faveur d'une "prime aux gains"

Explorons d'abord les arguments en faveur d'une "prime aux gains". Même si de nombreux enjeux "qualitatifs" essentiels au développement de l'entreprise traversent les achats, nous représentons une fonction, qui avant tout, est d'abord observée par le directeur général sous l'angle de sa contribution au résultat opérationnel. Bien souvent certains oublient, et les DRH au premier titre, que la fonction achats est une fonction commerciale avec un impact significatif sur les flux financiers de l'entreprise (résultat, trésorerie, etc.).

Il est donc tout à fait légitime de récompenser les acteurs de la fonction pour leur performance, dans le même esprit que la force de vente. Par ailleurs, le directeur des achats a, la plupart du temps, un objectif de performance économique. Le décliner sur ses équipes lui permet de se doter d'un outil de management supplémentaire et de s'assurer que tout le monde est bien dans le même bateau. Nos acheteurs l'ont d'ailleurs bien compris : ils "manipulent" ainsi des sommes souvent conséquentes avec responsabilité, et attendent cette reconnaissance, notamment les jeunes générations issues des meilleures formations achats. Il ne s'agit plus alors de les récompenser, mais parfois de les garder !

Les effets contre productifs des primes aux résultats économiques

A l'inverse, qui n'a jamais observé les effets contre productifs des primes aux résultats économiques ? Il y en a certainement beaucoup et je n'en citerai que les trois que j'ai le plus souvent observés. L'effet nocif peut apparaître, par exemple, dans la gestion des projets achats avec les prescripteurs, car ils vont suspecter les acheteurs de ne travailler que pour leurs primes, proportionnelles aux économies : voilà un redoutable frein à la coopération ! Sans aller jusque-là, objectiver les acheteurs sur les gains peut contribuer à transformer des acheteurs en une sorte de mercenaires, qui vont développer un comportement trop agressif et pousser les négociations à un extrême toxique pour l'entreprise, au détriment de la qualité, ou de la relation de long terme. Et bien sûr cela peut générer des inégalités de traitement entre acheteurs : comment intégrer objectivement la valeur ajoutée de l'acheteur pour faire fi des tendances marché, des effets volume, des changements de spécification... ?

Revenons aux fondamentaux

Alors que faire ? Revenir aux fondamentaux. Ne soyons pas naïfs, nos entreprises n'évoluent pas dans le monde des Bisounours. Pour être efficaces, elles doivent motiver leurs équipes sur toutes les dimensions possibles : la reconnaissance n'est pas que financière mais elle passe par là aussi ! Oui, il convient d'intégrer une prime aux gains, mais de façon équilibrée par rapport à d'autres objectifs plus qualitatifs et adaptés au contexte de l'entreprise : il faut donc les moduler en fonction des enjeux du moment et de la situation financière car on n'attendra pas la même chose d'un acheteur d'une entreprise qui dégage 10% de résultat net d'une autre dont la trésorerie est à sec et affichant une perte.

Une fois les objectifs de performance économique définis, transparence et communication interne au sein des achats et auprès des autres fonctions sur l'ensemble des objectifs de la fonction permettront de démystifier le sujet et de faire adhérer ou au moins de faire comprendre. En interne, la direction des achats doit décliner les objectifs globaux vers tous les acheteurs, de façon proportionnée selon leur statut (junior, sénior, responsable achats, etc.) permettant une évolution de la part variable parallèle à la progression de carrière. Ce sera, là, une réponse équitable. Et pour garder, voire amplifier, un esprit collectif et solidaire entre acheteurs, des alternatives aux primes individuelles pourront aussi être explorées, par exemple en s'inspirant des challenges qui animent certaines forces de ventes Bien sûr, tout ceci ne fonctionnera qu'une fois déployé un mécanisme de mesure de la performance financière pertinent et partagé dans l'entreprise, mais ceci est une autre histoire...

En fin de compte, nous, responsables achats, ne nous trompons pas de combat. Attribuer des primes aux acheteurs permet certes de les impliquer davantage, mais cela n'a du sens que si l'organisation est prête (des acheteurs formés et mobilisés) et l'entreprise familiarisée avec sa fonction achats. Sur cette question également, il ne s'agit donc que d'une affaire de maturité et ne pas agir simultanément sur ses différents aspects n'apportera pas grand chose, sauf des critiques !

par Philippe Demangeot.
Philippe Demangeot exerce des responsabilités dans la fonction achats de groupes industriels ou de service depuis plus de vingt ans.

 
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