Crise énergétique : la France, future puissance gazière ?
L'impact de la guerre en Ukraine continue de se faire sentir et la baisse des températures n'aide pas à calmer les inquiétudes sur la capacité de la France à passer l'hiver. Retour sur les enseignements de la dernière conférence de l'édition 2022 du Congrès Gazelec.
Je m'abonneLa crise énergétique engendre nombre d'inquiétudes pour l'hiver qui arrive. Pourtant, depuis 2018, une réforme du stockage est entrée en vigueur. Celle-ci donne aux fournisseurs de gaz, le moyen d'être flexible vis-à-vis de leurs clients notamment en cas de pointe de froid. Selon Pierre Chambon, directeur général de Storengy France, cette réforme a pu prouver son utilité puisque les stockages de gaz en France sont actuellement pleins depuis quelques semaines.
Cette situation pénurique amène tout de même à se poser la fameuse question "va-t-on passer l'hiver ?" Selon Benoit Pouzieux, directeur système gaz de GRTgaz : "Les simulations réalisées permettent d'affirmer que, pour un hiver moyen, le système gazier est capable de satisfaire l'ensemble de la demande tout en soutenant activement la production d'électricité à partir du gaz et en faisant jouer la solidarité européenne." Cependant, c'est le cas pour un hiver moyen. Si la saison s'avère plus froide, la France devrait faire face à un déficit de l'ordre de 16 TWh, ce qui correspond environ à 5% de la consommation hivernale. Afin de réduire ces potentielles situations de tension, Benoit Poulzieux invite les fournisseurs expéditeurs à gérer finement leurs niveaux de stock.
Mais en plus de s'inquiéter pour cet hiver, il faut réussir à se projeter, penser long terme.
La France, future puissance gazière ?
La crise énergétique impacte aussi l'importation de GNL. D'après Benoit Pouzieux, le record d'émissions sur le réseau était de l'ordre de 250 TWh en 2019. Actuellement, il est de 270. La France devient, selon Pierre Chambon, une sorte de "peuple gazier" grâce à ses frontières maritimes et l'arrivée massive de GNL (gaz naturel liquiéfié). Ilest également prévu qu'un terminal méthanier soit raccordé au Havre, fin 2024.
La construction de méthaniers amène la question du système d'infrastructures à mettre en place. En effet, il semble compliqué de déterminer si l'Allemagne, qui a aussi des projets de terminaux méthaniers, sera exportatrice. Ce qui impacte le besoin ou non de nouvelles infrastructures. Selon Nicolas Deloge, directeur des réseaux chez CRE, les enjeux de sécurisation de l'approvisionnement pour 2030 vont se confronter aux enjeux de décarbonation de 2050. En effet, la France va construire des infrastructures gazières pour 2030, sachant que moins de gaz sera consommé à terme.
Pierre Chambon (Storengy France) : "Pour la commercialisation de cette année et des prochaines, les conditions ont été assouplies. Il ajoute qu'il est important de garder la logique du stockage sans forcément mettre de trop grosses contraintes sur le sujet."
Benoit Pouzieux (GRTgaz) : "L'impact de la guerre en Ukraine se définit par une inversion des flux traditionnellement orientés de l'est vers l'ouest et du nord vers le sud. En effet, l'interconnexion avec les réseaux allemands était un point traditionnel d'entrée du gaz russe en France, et ces flux se sont progressivement taris au cours de cet été jusqu'à être nul depuis plusieurs semaines."
Nicolas Deloge (CRE) : "Je souhaite que les produits de stockage de l'année prochaine soient attractifs afin qu'ils soient souscrits par les fournisseurs."