"Les audits énergétiques sont une nouvelle opportunité d'optimiser ses coûts de transports"
"Seule une minorité d'entreprises a profité des audits pour instaurer une vraie démarche de réduction de leur facture énergétique liée aux transports, avec à la clé des économies significatives", explique Thomas Moreau, spécialiste de l'optimisation de la chaîne logistique dans les entreprises.
Je m'abonneDans beaucoup de grandes entreprises et d'ETI, les consommations d'énergies liées aux transports sont significatives et, de fait, doivent faire l'objet d'un audit énergétique avant le 5 décembre prochain*. Où en sont-elles aujourd'hui ? Le point en 3 questions à Thomas Moreau, spécialiste de l'optimisation de la chaîne logistique dans les entreprises, directeur du pôle supply chain de Karistem.
Quel bilan tirez-vous des démarches effectuées jusqu'à présent par les sociétés concernées ?
Thomas Moreau. Le bilan est assez mitigé. Tout d'abord, un certain nombre d'entreprises n'ont pas du tout engagé de démarches en la matière, par manque d'anticipation ou d'information. Ensuite, la majorité des organisations qui ont bel et bien réalisé l'exercice se sont limitées à des audits purement comptables de leurs consommations d'énergies liées aux transports.
Dans ce cas de figure, ces audits ont été perçus comme un exercice imposé permettant d'échapper à une amende (jusqu'à 2% du chiffre d'affaires hors taxe) plutôt que comme une opportunité sérieuse d'optimisation des consommations d'énergies et donc des coûts. Au final, seule une minorité d'entreprises a profité des audits pour mettre en place une véritable démarche de réduction de leur facture énergétique liée aux transports, avec à la clé des économies significatives et une réelle démarche environnementale. On ne peut que le regretter, tout en se rappelant que nous avions constaté le même phénomène au début de la mise en oeuvre du Bilan Carbone il y a quelques années...
Quels sont les points positifs et les limites de ces audits énergétiques ?
L'audit énergétique permet de réaliser une photographie relativement précise des consommations d'énergies liées aux transports, d'identifier des sources d'économies potentielles et de formuler des recommandations. Mais cela s'arrête là, au même titre que les audits des consommations d'énergies liées aux bâtiments et aux process industriels. On notera d'ailleurs qu'il est préférable de s'adresser à un véritable spécialiste du périmètre audité plutôt qu'à un généraliste dont les recommandations seront souvent déconnectées de l'opérationnel.
Pour réellement réduire sa facture énergétique, ce qui est l'esprit de la loi, il faut aller plus loin et, par exemple, être capable de préconiser des évolutions dans les modes de transports utilisés et d'en calculer le ROI, de chiffrer l'impact d'un changement de d'équipement ou, dernier exemple concret, de réaliser une analyse technique des plannings des conducteurs ou des commerciaux pour optimiser les tournées et donc, par voie de conséquence, les consommations de carburant.
Dès lors, quelles sont les pistes d'optimisation permettant de réduire efficacement sa facture énergétique en matière de transport selon vous ?
Il existe principalement trois axes d'optimisation.
Tout d'abord, l'entreprise peut optimiser ses achats, ce qui recouvre par exemple les achats d'énergies proprement dits tels que les carburants. Si elle paraît évidente, l'optimisation de ce segment suppose une vraie connaissance des marchés fournisseurs.
Les achats de moyens de transport sont aussi concernés et, dans ce cas, il faut avoir la capacité d'évaluer avec précision l'adaptation de la puissance des moyens souhaités avec leur usage. Ensuite, l'entreprise peut optimiser le pilotage de ses activités liées aux transports, aussi bien au niveau de son organisation que de ses process. Cela peut passer par la formation des collaborateurs concernés, l'acquisition d'un outil de pilotage des transports ou la mise en place de nouveaux processus de contrôle.
Enfin, l'entreprise peut optimiser ses flux de transport, ce qui est déjà plus complexe à mettre en oeuvre car cela nécessite une expertise technique ainsi que l'utilisation d'outils de modélisation. Mais c'est aussi l'un des leviers les plus efficaces pour réduire ses consommations, en revoyant le plan de transport de l'entreprise, en optimisant les tournées ou encore en mettant en place des convoyeurs permettant de réduire à zéro la consommation de carburant et d'améliorer les coûts de maintenance ou la sécurité.
* Décret n°2014-1393 du 24 novembre 2014 relatif aux modalités d'application de l'audit énergétique. Sont concernées les entreprises de plus de 250 salariés, ou dont le chiffre d'affaires annuel excède 50 millions d'euros, ou dont le total de bilan dépasse 43 millions d'euros.