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La Covid-19 bouscule la restauration d'entreprise

Publié par le | Mis à jour le
La Covid-19 bouscule la restauration d'entreprise
© ©nadianb - stock.adobe.com

La restauration de demain ne devrait plus ressembler à celle d'hier. En cause : un contexte sanitaire tendu impactant les capacités d'accueil des établissements et les habitudes des hôtes. D'autant que les tendances de consommation évoluent avec l'organisation du travail et les mentalités.

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Au 17 mars 2020, les restaurants d'entreprise ont été désertés presque instantanément par la plupart des équipes. À l'exception des services pour lesquels le télétravail était contre-indiqué. "Certains de nos clients sont restés ouverts pendant le confinement, mais très rarement avec 100% des effectifs présents : la flexibilité de notre modèle nous a permis d'adapter nos approvisionnements pour des volumes divisés par trois, voire par quatre. Depuis septembre, les volumes reviennent, mais cela reste très fluctuant : c'est du cas par cas !", énonce, en préambule, Amaury Lefébure, responsable des ventes chez Foodles. Le confinement allégé, les grands groupes ont progressivement rouvert leurs restaurants avec des capacités d'accueil limitées, un agencement et une signalétique conformes aux règles sanitaires. Cela s'apparentait à un réel défi pour les RIE de la Défense.

Valérie Benhaim

"Il a fallu définir des créneaux courts et ultrastricts pour chacune des entreprises utilisatrices, afin d'éviter une affluence trop importante", explique Victoria Benhaim, fondatrice d'i-lunch. De fait, les entreprises apprennent à composer avec le protocole établi et les effectifs présents, et à rassurer les collaborateurs. "Nous avons dû remettre en place les emballages biodégradables ; même le morceau de pain est désormais emballé sous papier kraft", ajoute Victoria Benhaim qui se targue habituellement d'une solution de restauration zéro déchet.

Mutations profondes et durables ?

Eurest explique ne pas encore avoir récupéré les volumes d'avant la crise. "Cela nous incite à faire preuve d'agilité dans notre mode de fonctionnement et de contractualisation ; nos clients souhaitant instaurer des mesures complémentaires liées à la crise sanitaire, comme du personnel additionnel pour assurer la distribution des plateaux, la gestion des flux ou la désinfection. Plus que jamais, il faut se montrer ouvert à l'innovation, car le mode de consommation est challengé", avance Camille Berthaud, directeur général d'Eurest.

À court terme, les offres alternatives ont éclos pour pallier un service de restaurant traditionnel à l'arrêt ou diminué. Comme Foodless qui propose jusqu'à 16 plats traiteurs par semaine. "Comptez 3 000 euros par mois pour un frigo connecté de 50 couverts. En combinant des frigos connectés avec des modules complémentaires de type "salad bar", nous couvrons des sites de 800 collaborateurs", indique Amaury Lefébure. Déjà utilisé ces dernières années, les systèmes click and collect et click and serve ont et font aussi des émules, limitant les contacts et fluidifiant les trafics. Plus globalement, "la livraison a été la solution déconfinée compatible", souligne Victoria Benhaim.

Pour éviter un nombre trop important de livreurs postés devant l'entrée aux heures de repas, il peut être opportun de contractualiser avec une plateforme de livraison, comme i-lunch qui le prévoit par camion réfrigéré. Cela signifierait-il que le self-service traditionnel, uniquement disponible durant la pause-déjeuner, aurait fait son temps ? L'affirmative semble l'emporter, selon Victoria Benhaim : "Les directeurs achats vont de plus en plus devoir proposer des offres multicanaux, accessibles tout au long de la journée." La Covid n'est pas la seule fautive. "La crise sanitaire ne fait qu'accélérer les tendances d'hier : la diminution de la fréquentation des selfs traditionnels, la contrainte croissante sur les coûts fixes, les attentes des nouvelles générations pour des modes de consommations et d'usages nomades, digitaux et responsables, et des organisations en mutation", confirme-t-on au sein d'Elior Group.

En effet, l'avènement du home office et du flex office modifie en profondeur l'organisation du travail et, par ricochet, les effectifs présents sur site, susceptibles d'être en demande d'un service repas. "L'objectif n'est plus d'encadrer des prix, mais de proposer la bonne offre restauration", résume Camille Berthaud. Encore plus que par le passé, les collaborateurs veulent retrouver des produits qualitatifs, locaux, frais et fréquemment renouvelés. L'étude Altavia menée en juin 2020 le démontrait : 69% des Français envisageaient de consommer de façon différente et plus responsable à l'issue du confinement. De fait, la restauration d'entreprise tend à se rapprocher des standards de la restauration commerciale. "Les millénials plébiscitent la street food, les poke bowls, les recettes méditerranéennes, les plats végétariens", énumère Camille Berthaud.

Lire la suite en page 2 : Du sur-mesure / Témoignage- "La distribution des plats chauds au restaurant traditionnel connaît une baisse de 40%"- Michel Gely, responsable des services aux collaborateurs de Bouygues Telecom / Focus - Bien nourrir les télétravailleurs


Du sur-mesure

Il n'est plus question de tout révolutionner en interne, mais de vérifier l'adéquation entre l'offre actuelle et les attentes des collaborateurs. "Les directions vont prendre des décisions rapidement, ayant plus de visibilité sur la jauge de fréquentation", estime Victoria Benhaim. Cette stratégie va découler des accords trouvés concernant le télétravail notamment.

Sarah Jafarshad-Rajaei

"Les services de restauration vont subir de profondes mutations. Souvent installés dans des espaces relativement vastes et monofonction, ils vont cohabiter avec d'autres services proposés aux collaborateurs tout au long de la journée pour rentabiliser les mètres carrés (pause, réunion, coworking, etc.) et, surtout, donner envie aux télétravailleurs de venir en entreprise pour la valeur ajoutée qu'offre ces espaces et le lien que cela crée au sein d'une société", avance Sarah Jafarshad-Rajaei, directrice générale de Bleu Vert Concepts. Cela va dépendre de la culture de l'entreprise, de son activité, de son mode de fonctionnement et du taux de satisfaction des occupants pour le service restaurant.

Avant de définir son cahier des charges, recueillir les opinions des employés est fortement préconisé pour comprendre leurs besoins. "Les Français sont très attachés à leur pause déjeuner. C'est un temps de déconnexion convivial qui, mal appréhendé, peut être source de tensions", met en garde Sarah Jafarshad-Rajaei. À défaut, outre de susciter un mécontentement auprès des collaborateurs, cela peut retarder leur retour au travail. "Depuis le confinement, les employés n'entretiennent plus le même lien avec leur bureau. Il appartient aux directions d'imaginer des lieux qui soient attractifs et qui donnent envie de se déplacer. L'espace restauration doit figurer parmi les expériences positives de la journée", rappelle Thaïs de Gestas, responsable communication chez Foodles.

Tout porte à croire que les grands groupes vont se tourner vers un mix d'offres pour satisfaire la majeure partie des attentes. "Le service à table, avec une prestation différente, reste une demande fréquente. En ce sens, mettre en place un service type brasserie ne représente pas de réel surcoût dès lors qu'il est dimensionné aux besoins et bien pensé dans l'espace", soutient Sarah Jafarshad-Rajaei. Installer un service de restauration rapide ou des réfrigérateurs connectés peut s'avérer opportun si une part des collaborateurs désire manger sur le pouce ou simplement pour étoffer les gammes. Cela évite qu'ils aient à quitter le bureau à l'heure du déjeuner, surtout en période d'épidémie de Covid-19. Il peut aussi s'agir de déployer des corners thématisés dans l'esprit "food hall" pour s'accorder plus de flexibilité en exploitation. "Ils peuvent être accessibles selon des créneaux horaires restreints ou élargis en fonction du trafic, tout au long de la semaine ou de la journée. En moyenne, il faut compter 150 couverts par stand", conseille Sarah Jafarshad-Rajaei. En d'autres termes, il n'existe pas de recette valable pour tous. À chaque entreprise, son mix gagnant.

Témoignage- "La distribution des plats chauds au restaurant traditionnel connaît une baisse de 40%"-

Michel Gely, responsable des services aux collaborateurs de Bouygues Telecom

Durant le confinement, la restauration des sites de Bouygues Telecom n'a pas complètement été mise sur pause. Elle s'est limitée à un panier-repas quotidien, livré dans les bureaux des usagers. Dès le 11 mai, le service à table du restaurant rouvrait, réaménagé en conséquence. "Le salad bar a dû être retiré pour respecter les mesures sanitaires et éviter les manipulations, et du personnel supplémentaire a été réquisitionné pour gérer les flux et le service", relate Michel Gély, responsable des services aux collaborateurs de Bouygues Telecom. Ce self-service propose une dizaine de plats chauds par jour élaborés par des diététiciens à partir d'ingrédients locaux, de saison et frais. Depuis la reprise, "sa distribution connaît une baisse de 40% par rapport à l'avant-crise du fait du télétravail encore en place".

La formule clic and collect

À l'inverse, les kiosques de vente à emporter, déployés et étoffés sur l'ensemble des sites depuis 2012, semblent encore davantage recueillir les suffrages ; et particulièrement le stand asiatique. En décembre 2019, le groupe rejoignait également le mouvement antigaspillage To Good To Go, qui propose les invendus alimentaires aux collaborateurs pour leur repas du soir ; le menu complet revenait à cinq euros. "Ce service est de plus en plus utilisé, surtout en région parisienne. Le groupe réfléchit à la mise en place du système de click and collect pour élargir ses propositions. Finalement, "ces périodes troublées nous permettent de tisser des liens plus étroits avec nos partenaires et de continuer à progresser", conclut Michel Gély.

Focus - Bien nourrir les télétravailleurs

D'après un sondage ANDRH effectué en juin 2020, 60% des entreprises envisageraient d'avoir plus d'un quart de leurs salariés en télétravail, avec une moyenne de deux jours par semaine. Ce virage contraint les directions à s'interroger sur la prise en compte des repas en dehors du bureau. À ce titre, la start-up i-lunch lançait, en juillet, "2020 Télé restau" qui permet aux télétravailleurs de commander, depuis une plateforme internet, leurs repas de la semaine et de les recevoir à leur domicile. Ils bénéficient également d'un outil de suivi nutritionnel personnalisé et peuvent accéder à un salon en ligne pour garder le contact avec leurs collègues pour des moments de convivialité virtuels. Quant aux employeurs, ils ont la possibilité de piloter la restauration à distance depuis un dashboard dédié.

 
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