[Tribune] Comment bien gérer les risques achats ?
Souvent perçue comme une étape statique, la gestion des risques requiert en réalité un suivi en continu et une analyse permanente. Pour évoluer vers une démarche dynamique, la mise en place de nouveaux process et la formation des équipes sont des enjeux clés.
Je m'abonneLe pilotage du risque achats est aujourd'hui une préoccupation majeure pour les directions opérationnelles. Par définition, le risque représente la probabilité qu'un évènement puisse menacer les activités ou les actifs de l'entreprise. Savoir le piloter permet donc d'appréhender au mieux la mesure des pertes pouvant être engendrées par un évènement interne ou externe à l'organisation.
Problème : la gestion des risques était jusqu'alors très statique, souvent perçue comme une étape à accomplir pour "cocher toutes les cases" du tableau de bord. Or, les risques évoluent constamment. Ils peuvent s'aggraver et leur fréquence peut être de plus en plus intense. En outre, nous observons l'émergence de nouveaux risques, qui ne sont plus les mêmes qu'il y a une dizaine d'années. La gestion du risque n'est donc pas une étape figée, à l'instant T. Elle requiert un suivi en continu et une analyse permanente.
Quelle méthodologie adopter ?
La mise en place d'une gestion dynamique des risques achats nécessite du temps, des process et de former les équipes. Il est important d'y allouer des moyens humains et des outils. Pour démarrer, la direction des achats peut s'appuyer sur la norme ISO 31 000, qui propose une méthodologie de gestion des risques. Non certifiante, cette norme doit être utilisée comme un guide. Elle permet de définir la démarche et d'analyser les risques sur deux axes : fréquence et criticité.
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Par ailleurs, la cartographie des risques est un élément essentiel, qui permet de mieux visualiser les risques internes, externes, géopolitiques et réglementaires.
Globalement, nous pouvons distinguer quatre familles de risques :
- Les risques financiers, relatifs à la santé financière des fournisseurs, à la dépendance au fournisseur, aux délais de paiement, à la trésorerie, l'exploitation, etc.
- Les risques contractuels et sociétaux tels que le non-respect du contrat ou de la législation, la situation géopolitiques, l'évolution de la réglementation...
- Les risques industriels, qui ont trait, par exemple, à la conformité des produits, à la performance du fournisseur, aux produits proposés par les fournisseurs ou encore à la technologie utilisée.
- Les risques d'atteinte à la réputation, liés à la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Cette dernière catégorie de risque est apparue il y a environ trois ans.
Une bonne maîtrise du risque nécessite, pour l'acheteur, d'intégrer un nouveau processus. Ce dernier peut être diviser en quatre étapes : maîtriser le portefeuille achats (le marché, les contraintes internes, les fournisseurs), établir une veille stratégique, utiliser une matrice de contraintes afin de les quantifier et d'adapter les comportements et piloter les indicateurs en temps réels pour informer sur les nouveaux risques ou les évolutions.
Une évolution des compétences
La gestion des risques achats s'accompagne d'une évolution des compétences des acheteurs. Ils doivent faire preuve d'adaptabilité dans de nouveaux domaines comme l'écologie ou encore le droit des sociétés. Depuis quelques années, ils ont également un rôle de facilitateur pour l'ensemble des autres métiers de l'entreprise. Au-delà de leurs tâches traditionnelles, qui va de l'identification du besoin du client interne à la contractualisation en passant par l'élaboration du cahier des charges et le sourcing, les acheteurs interviennent également en amont et aval des actes d'achats. Objectif : garantir la pérennité de l'entreprise. Pour ce faire, ils apportent des outils mais aussi de nouveaux canaux d'accès à l'information.
Véritables chefs d'orchestre de la gestion des risques, ils sont responsables du déploiement de la démarche qui comprend l'identification, la surveillance, la définition et le déploiement du plan d'action. Dans ce contexte, la communication devient une compétence clé qui permet de déployer l'ensemble du process au sein de l'entreprise. Il est essentiel que l'acheteur soit en mesure de partager les éléments et les plans d'actions, d'alerter et de sensibiliser. Une mutation de leur métier, qui leur impose, en somme, de devenir de véritables "couteaux suisses".
Titulaire d'un MAI à la Kedge Business School, Solène Foulard a fait ses premiers pas d'acheteuse chez Lectra, une entreprise spécialisée dans les solutions technologiques pour les industries utilisatrices de matériaux souples. Après 12 années chez Lectra, elle rejoint la PME Valla début 2018 en qualité de directrice supply chain avant d'être promue directrice des achats et supply chain de Sauermann (groupe spécialisé dans les équipements de mesure et traitement de la qualité de l'air intérieur) fin 2018. Elle est aujourd'hui directrice du cabinet de conseil Impulsility, qu'elle a créé en mai 2022.