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DSI-DA : un couple, une équipe

Publié par Anne-Sophie David le | Mis à jour le
DSI-DA : un couple, une équipe

Parce que les achats sont amenés à travailler de plus en plus en étroite collaboration avec les autres directions métiers pour participer activement à la croissance des entreprises, ils doivent en intégrer les contraintes et en comprendre le langage. Focus sur le couple DSI-DA.

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La DSI, considérée à ses débuts comme un mal nécessaire et un centre de coûts, est sûrement la fonction qui a connu le plus d'évolutions dans les entreprises. Elle a ainsi dû passer du "mainframe" aux mini-ordinateurs puis aux micro-ordis, puis au cloud et aujourd'hui au big data.

Poussée par une intensité concurrentielle extrêmement forte, elle doit prouver sa capacité à innover via la mise en place de solutions agiles de type ITaaS, cloud hybride ou encore plateformes DevOps. La vitesse d'expansion de ces nouvelles technologies l'oblige donc à se réinventer sans cesse et à rechercher la manière dont elle doit communiquer avec les directions métiers pour mener à bien ces projets qui engagent toute l'entreprise. Car, comme le souligne Éric Chicha d'EMC en charge du Global Services France (avant-vente, services et support), " de nombreuses initiatives de big data se sont soldées par un échec à cause d'une approche non coordonnée des projets ".

Son principal défi aujourd'hui : devenir force de proposition et se positionner comme véritable partenaire du développement de l'entreprise, à côté des métiers.

DSI-DA : Vers une interpénétration des rôles

Alexis Hartmann, Coupa Software

Si les relations entre les DSI et les directions achats n'ont pas toujours été un long fleuve tranquille, l'heure est aujourd'hui à la complémentarité. " Dans les années 2000, les métiers avaient davantage la main sur ces sujets et pouvaient prendre des décisions seules sans consulter la DSI. Aujourd'hui, avec le besoin croissant des entreprises de rationaliser le nombre d'applications, la DSI a repris la main. S'il peut y avoir des divergences en termes d'objectifs, de calendrier et de processus d'amélioration, ces deux fonctions s'entendent sur cette rationalisation des outils ", observe Alexis Hartmann, VP ventes Europe du Sud de Coupa Software, spécialisé dans les solutions cloud de gestion des dépenses.

DA et DSI doivent aujourd'hui s'appuyer l'une sur l'autre pour parvenir à des choix pertinents, à la fois en termes de budget et de stratégie. Ce qui n'est pas toujours simple car les achats IT sont sûrement les plus techniques des achats hors production et nécessitent donc de la part des acheteurs une bonne connaissance de l'écosystème fournisseurs, de leurs contraintes pour comprendre les contraintes de la DSI. La DSI, de son côté, doit comprendre les contraintes... des acheteurs, pour une relation véritablement "win-win" au profit du développement de l'entreprise. On le voit d'ailleurs sur le terrain avec l'apparition de directeurs ou responsables achats spécialisés en informatique et, de l'autre, des directeurs des systèmes d'information spécialisés dans les achats. Une interpénétration des rôles qui permet aujourd'hui une meilleure compréhension réciproque des tâches. Cas extrême, quand un DA devient DSI, ce que l'on a vu en janvier dernier chez Numericable-SFR : Christophe Delaye, directeur des achats de SFR est ainsi devenu le DSI de Numericable-SFR.

Interview

Pascal Buffard, président du Cigref *

"Dans 78 % des cas, les achats IT sont rattachés à la direction des achats et sont gérés par le trinôme DSI - acheteur - juriste"

Comment est géré le budget informatique dans les grandes entreprises ?

L'ensemble des budgets informatiques des grandes entreprises en France, pour faire fonctionner les installations informatiques en France, était estimé à 43 milliards d'euros en 2015 par l'IDC. Cette estimation correspond à la consolidation de chiffres d'entreprises françaises et de filiales.

Avec la consolidation continue du marché, l'évolution des réglementations et l'émergence du cloud, les achats IT se complexifient et impliquent de plus en plus d'acteurs : DSI, directions des achats et juridique, et même désormais les métiers eux-mêmes qui, avec le cloud, ont fait émerger dans l'entreprise l'in-business computing (ou Shadow I**).

Selon une enquête réalisée par le Cigref en 2014 auprès de ses entreprises membres, la ventilation des dépenses IT est très largement dominée par les services (dont la maintenance), qui représentent pas moins de 49 % des dépenses, suivis par les achats de software qui elles représentent 22 % des budgets, puis le hardware (15 %) et enfin les télécoms (11 %).

Les DSI et les directions achats se connaissent-elles bien ? Comment se passe la collaboration entre elles ?

Il existe différents modes de gouvernance des achats numériques, selon la taille et la structure des entreprises (centralisée/décentralisée). Le Cigref a mis en évidence trois grandes catégories d'organisations dans une étude publiée en 2014 intitulée "Achats numériques dans les grandes entreprises, organisation et indicateurs de performance" (avec le CRAI) : les organisations centralisées, les organisations décentralisées et les organisations de type GIE / CSP (centre de services partagés). Dans cette étude, il apparaît que les achats IT, dans les grandes entreprises, sont rattachés pour une très large majorité à la direction des achats (78 % des cas) et qu'ils sont gérés très largement par une équipe dédiée, caractérisée par un trinôme DSI - Acheteur - Juriste.

Peut-il y avoir des points de friction?

Développer l'agilité de la fonction achats est un enjeu majeur : les acheteurs doivent être force de proposition vis-à-vis des prescripteurs, et pour cela, ils doivent développer leur connaissance du marché et être plus proches des PME et des start-up notamment. L'enjeu est d'aller vite et donc d'avoir un bon sourcing.

Plusieurs leviers peuvent être utilisés pour permettre aux acheteurs de progresser :

- Simplifier les procédures sur les achats de faible valeur et lors des phases pilotes des projets innovants.

- Disposer de procédures simplifiées pour les besoins récurrents (par exemple pour les prestations en AT portant sur les profils fréquemment sollicités).

- Disposer d'une base fournisseurs qualifiés bénéficiant de dérogations (critère?: durée du contrat par exemple) et adhérer/appliquer les principes du Pacte PME pour faciliter le travail avec les PME.

- Faire une veille technologique pour être à l'état de l'art du marché, maîtriser la relation fournisseurs en liaison avec la DSI (travailler en synergie avec la DSI et les métiers).

* Réseau qui regroupe 140 entreprises et organismes français de tout secteur dont la mission est de développer la capacité des grandes entreprises à intégrer et maîtriser le numérique.

** Le Shadow IT désigne des systèmes d'information réalisés et mis en oeuvre au sein d'organisations sans approbation de la direction des systèmes d'information. Le Shadow IT peut autant être vu comme une source d'innovation que comme un risque pour l'organisation, les solutions de ce type étant réalisées sans les bonnes pratiques de la DSI notamment en matière de tests, de documentation, de sécurité, de fiabilité, de pérennité, de cohérence du SI, etc.

Interview croisée DA / DSI

Le cas Covéa : un exemple de collaboration réussi

"Les incompréhensions s'expliquent souvent par un manque de double compétence achats et IT"

La direction achats et la DSI du groupe d'assurance mutualiste Covea, qui regroupe la MAAF, MMA et GMF, travaillent de concert pour optimiser les dépenses d'achats IT. Une collaboration facilitée notamment par l'implémentation d'un outil e-achat collaboratif qui permet aux deux fonctions de maintenir le lien.

Comment qualifiez-vous votre relation ?

Sylvie Noël, directrice des achats : C'est une vraie collaboration. La DSI nous fait remonter ses besoins dans l'outil commun (Ivalua). Selon la nature du besoin, le dossier est pris en charge par le domaine d'achats adéquat (produits, solutions métier, prestations ou marketing/médias).

Stéphane Lapierre, responsable Solutions et patrimoine SI-DSI : Nous ne considérons pas les achats comme une fonction support mais bien comme des partenaires. Les achats IT sont rattachés à la direction générale des technologies et systèmes d'information (DGTSI) et nous gérons un budget de 500 M€ dont plus de la moitié passe par les achats. Cette fonction est donc très stratégique pour nous, dans une recherche d'optimisation des coûts. Les achats interviennent avec nous dans la définition de la stratégie de sourcing, le référencement des fournisseurs et leur suivi annuel de qualité, ainsi que sur le pilotage des dossiers achats importants. A contrario, les achats très encadrés sont délégués, permettant de positionner les acheteurs sur des missions à valeur ajoutée.

L'outil collaboratif d'Ivalua a-t-il permis d'améliorer votre relation ?

Stéphane Lapierre : Oui, cet outil a grandement participé au rapprochement de nos deux équipes. Nous l'avons installé il y a deux ans à la direction des achats et il nous permet de partager et collaborer. Il contient notamment la contrathèque, les informations fournisseurs, le workflow de validation des demandes et dossiers achats.

Sylvie Noël : Quand nous rencontrons des fournisseurs, nous mettons à jour les informations majeures dans cet outil collaboratif - véritable SRM - qui permet à la DSI de suivre nos relations fournisseurs.

Cette famille d'achats est très technique, pas toujours facile pour les acheteurs de s'y retrouver...

Stéphane Lapierre : Le digital nous oblige en effet à acheter différemment. La fonction achat va devoir évoluer rapidement car on n'achète plus des gens, des machines ou des logiciels mais des services, du cloud, ou encore du SaaS. Lorsqu'il y a des incompréhensions, elles s'expliquent souvent par un manque de double compétence achats et IT. Celle-ci va devenir indispensable. On constate néanmoins que les acheteurs commencent à avoir ce verni informatique. Ils nous challengent même sur les cahiers des charges et nous les attendons également sur l'encadrement du "shadow IT" - ces systèmes et applications qui échappent à DSI- et qui nécessite une plus grande coopération entre les achats et l'informatique pour être en mesure de nous alerter en cas de problème. Car une grande force des achats est également leur capacité à nous alerter sur les risques liés à la sécurité ou au juridique.

Quels seraient les leviers pour améliorer votre travail en commun ?

Sylvie Noël : Contrairement au périmètre des achats qui est aujourd'hui bien stabilisé chez Covéa, le périmètre de l'informatique est lui en perpétuel mouvement, comme dans beaucoup d'entreprises. Il y a aujourd'hui un travail à faire de leur côté au niveau de la communi­cation et du transfert d'informations notamment.

Autre axe d'amélioration : il peut arriver, par exemple, que des dossiers leur parvien­nent trop tard en raison parfois d'un manque de sensibilisation à la criticité d'un dossier ou le fait qu'il faille les traiter suffisamment en amont.

Stéphane Lapierre : Il y a encore trois ans, nous étions sur des achats et contrats très courts termes car dans une pure logique économique. Nous nous orientons de plus en plus sur des contrats plus longs, avec une implication de la direction des achats beaucoup plus en amont pour une relation de bout en bout : de la définition de la stratégie de sourcing jusqu'aux éventuels litiges fournisseurs. C'est un progrès important.

Lire en page 3 : L'interview de Pascal Buffard, président du Cigref
 
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