Pilotage hôtelier : la direction achats sommée de reprendre la main
Encore largement éclipsé dans les politiques travel, l'hébergement d'affaires pèse pourtant jusqu'à 40 % des dépenses. Les directions achats doivent reprendre la main à grands coups de négociation et de pilotage stratégique.

« L'hébergement d'affaires est l'un des derniers bastions non maîtrisés par les directions achats », alerte Pierre Mesnage, directeur général Europe de l'Ouest chez HRS. Et pour cause, si le billet d'avion ou la location de véhicule sont depuis longtemps intégrés aux politiques de voyage d'entreprise, le logement hôtelier continue d'échapper à toute forme de gouvernance structurée.
Pourtant, son poids dans la dépense travel est considérable. « L'hébergement représente en moyenne 40 % du budget total d'un voyage d'affaires », précise Pierre Mesnage. Ce ratio peut grimper jusqu'à 50 % dans les entreprises industrielles aux réseaux atomisés de sites, ou dans les secteurs de la vente et du conseil, où les séjours multi-nuits sont fréquents.
D'après les données de la Global Business Travel Association, les dépenses mondiales liées aux nuitées d'affaires devraient atteindre 430 milliards de dollars en 2024, un niveau supérieur à celui d'avant-crise (+6 % par rapport à 2019). En France, le budget moyen d'une nuitée s'est établi à 138 € en 2023, en hausse de +13 % sur un an (source : Insee, septembre 2023). Dans ce contexte inflationniste, les entreprises ont tout à gagner à structurer un pilotage rigoureux.
Réservations dispersées, pouvoir de négociation affaibli
La principale faiblesse du pilotage hôtelier réside dans l'absence de standardisation et de centralisation. Dans de nombreuses organisations, les collaborateurs réservent encore leurs nuitées via des plateformes grand public ou directement auprès des hôtels, échappant ainsi à toute visibilité pour la direction achats.
« On observe un taux de couverture contractuelle inférieur à 20 % dans une majorité d'entreprises », indique Pierre Mesnage. Une étude menée par HRS en 2022 révélait que plus de 60 % des réservations hôtelières échappaient au canal officiel de réservation dans les entreprises de plus de 500 salariés. Conséquence directe : une perte de pouvoir de négociation vis-à-vis des groupes hôteliers, une dispersion des tarifs, et un défaut de conformité aux politiques internes.
Ce fonctionnement éclaté génère également des risques de surcoûts, de fraudes et d'irrégularités en matière de conformité fiscale ou sociale (notamment en cas de déplacement dans des zones sensibles). Sans visibilité consolidée, les achats n'ont ni levier de renégociation, ni capacité d'analyse prédictive.
Technologie et data : des outils pour industrialiser la dépense hôtelière
Pour combler ce déficit de pilotage, des solutions technologiques se déploient à grande échelle. HRS fait partie des plateformes les plus avancées, avec une approche intégrée qui va bien au-delà de la simple réservation.
« Nous collectons et croisons les données issues des ERP, des outils de gestion de notes de frais, des cartes logées et des plateformes de réservation pour reconstruire l'historique de consommation », détaille Pierre Mesnage. Grâce à cet historique, la plateforme identifie les zones de sur-dépense, propose un portefeuille optimisé d'hôtels et automatise les appels d'offres.
L'un des avantages de ce type de solution est sa capacité à déployer rapidement un programme hôtelier clé en main, directement intégré aux outils déjà utilisés par les collaborateurs. HRS revendique un taux d'adoption supérieur à 85 % dans les six mois suivant le déploiement chez ses clients. À la clé, jusqu'à 12 % d'économies sur les coûts hôteliers directs, une amélioration de la conformité, et une meilleure satisfaction des collaborateurs.
Un levier sous-exploité pour la stratégie RSE des entreprises
Au-delà des aspects financiers, l'hébergement constitue également un levier de progrès environnemental et social. Le choix d'hôtels certifiés (Green Key, ISO 14001, EU Ecolabel), la réduction des déplacements non essentiels, ou encore le regroupement géographique des nuitées contribuent à l'amélioration du bilan carbone des entreprises.
Or, selon le baromètre CNA x AgileBuyer, seules 42 % des directions achats affirment intégrer systématiquement des critères RSE dans leurs consultations fournisseurs. La centralisation de l'hébergement permet pourtant d'imposer des standards, de mesurer l'empreinte environnementale par séjour, et d'éviter des réservations dans des établissements ne respectant pas les règles éthiques ou environnementales de l'entreprise. L'hôtellerie responsable est une extension naturelle de la travel policy. Encore faut-il que les données soient disponibles, consolidées et exploitables. Sans pilotage global, pas de reporting fiable, et donc peu d'effet de levier.
Vers une gouvernance stratégique du travel management
En période de tensions budgétaires et de recherche accrue d'efficience, la reprise en main du poste hôtelier s'impose comme une évidence. « Ce gisement d'économies est aujourd'hui sous-exploité, alors qu'il pourrait offrir des gains rapides et mesurables », résume Pierre Mesnage.
Les directions achats qui s'emparent de cette catégorie peuvent non seulement réaliser des économies directes, mais aussi restaurer une maîtrise stratégique de leurs fournisseurs hôteliers, renforcer leur politique RSE et améliorer la sécurité des collaborateurs. La mise en place d'une gouvernance hôtelière est également un signal fort envoyé aux autres directions (RH, finance, sécurité), celui d'un pilotage structuré, interfonctionnel et conforme aux exigences de l'entreprise élargie.
Un levier opérationnel devenu un sujet de gouvernance. C'est bien dans cette optique que les acteurs du travel management redéfinissent aujourd'hui les priorités : de l'autonomie à la centralisation, de la dépense à la valeur.
Sur le même thème
Voir tous les articles Voyage d'affaires