[Avis d'expert] Comment tirer profit des pure players de l'intérim ?
Avec la digitalisation de l'économie, le secteur du travail temporaire connaît sa révolution. Tirer profit de leurs avantages notamment en termes de tarifs demande-t-il de prendre des précautions ?
Je m'abonneAvec la digitalisation de l'économie de nouveaux acteurs sur le marché du travail temporaire voient le jour. Aux côtés des entreprises de travail temporaire, comme Adecco, Randstad ou encore Manpower qui font également leur révolution numérique, on compte des pure players tels Gojob et Vit-on-Job. D'autres comme Qapa, société RH, profite de cette aubaine pour développer une plateforme 100 % digitale dédiée à l'intérim. Et les levées de fonds, selon l'institut d'études économiques Xerfi, vont bon train. Il en est ainsi en 2017 de Qapa (11 millions €), Onvabosser.fr (6 millions €)... Et depuis le début de l'année, on voit des secondes levées comme celles de Gojob (17 millions €), StaffMe (3 millions €) ou encore Extracadabra (1,2 million €). Et ce n'est certainement pas fini, tant les perspectives sont prometteuses. Pourquoi une telle effervescence ? Comment tirer profit de leurs prestations ?
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Leurs atouts : simplicité et tarifs concurrentiels
"En termes de RH et plus particulièrement d'intérim, le numérique révèle toute sa puissance car il permet de répondre à la problématique d'accès à l'emploi", comme l'affirme Yann Depoys, directeur général de Qapa, que nous avons interrogé. Le digital est partout et concerne tout le monde comme en témoigne notamment la très forte pénétration des smartphones qui selon Statista, est de 76,6 % en 2017 et sera de 80 % en 2019. Une aubaine pour les entreprises de travail temporaire (ETT) qui peuvent ainsi faire un sourcing large et se targuer de proposer à leurs clients des profils qui échappent aux agences classiques.
En outre, leur impact positif auprès des entreprises toujours dans l'urgence quand il s'agit de recruter un intérimaire et les candidats avides d'avoir un emploi est voué à croître tant ces acteurs d'un nouveau genre facilitent la vie de tous et leur permet de gagner du temps.
En quelques clics, un poste de travail peut être pourvu. Les clients renseignent leurs besoins à tout moment 24h/24 et 7j/7. L'offre est publiée et est visible par des millions d'intérimaires sur leur smartphone via une application responsive Ios et Android gratuite et accessible depuis n'importe où. Ainsi, la plateforme tout digitale Qapa, créée en 2016, destinée au travail intérimaire, fait profiter les entreprises clientes de leurs 4,5 millions de candidats enregistrés et ces derniers se voient proposés plus de 450 000 offres. Les algorithmes identifient automatiquement et en temps réel les CV des profils compatibles avec la recherche du recruteur. "Par ailleurs, nos algorithmes développés en propre bénéficient de l'intelligence artificielle. Ils apprennent au fur et à mesure de leur enrichissement. Ainsi, ils permettent de convertir les expériences en compétences et de faire de plus en plus de rapprochements. De cette façon, une personne qui se présente comme préparateur de commande pourra trouver un poste dans des métiers autres que la logistique. Cela favorise l'accès à l'emploi à tous ceux qui ne maîtrisent pas les codes", ajoute Yann Depoys.
Toute la puissance de ces plateformes est là. D'ailleurs, les investissements sont colossaux. La dernière levée de fonds de Qapa, par exemple, est destinée certes à la communication (campagnes TV...), mais vise surtout à investir dans les technologies. "Nous poursuivons la digitalisation de tous les principaux processus : perfectionnement de l'algorithme de matching, signature des contrats en ligne, récupération en ligne des documents du type carte d'identité, carte vitale... ", précise Yann Depoys qui poursuit : "La paye et la facturation ne sont pas en reste. C'est technologiquement complexe de rendre ces process automatiques."
Les tarifs ultra concurrentiels sont également un facteur clé de leur succès. Sans agence physique, leurs frais de structure sont faibles. Un avantage que ces acteurs répercutent sur leurs tarifs qui peuvent être ainsi jusqu'à 50% moins chers en ce qui concerne les commissions (leur marge brute). Ainsi, les entreprises clientes auront à débourser chez Qapa moins de 15 % de commission sur le salaire brut chargé de l'intérimaire en délégation et au maximum 10 % en gestion. Cette commission est, chez eux, fixe quelle que soit la durée de la mission et le salaire brut. Par ailleurs, le dépôt d'offres d'emploi et la consultation de tous les CV sont gratuits.
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Parfait, mais pas pour tous les postes !
La première des conditions repose sur un changement culturel. Si les habitudes sont intégrées dans la vie personnelle, il faut effectivement que les entreprises acceptent les nouveaux procédés de contractualisation qui se font maintenant en ligne. Passé ce cap, il est bon de s'assurer que ces plateformes digitales sont en mesure d'assurer les mêmes services qu'une ETT traditionnelle en termes de :
- respect de la réglementation ;
- qualité des tests de recrutement ;
- capacité à proposer des candidats sur des postes spécifiques ;
- réponse à des situations d'urgence...
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Toute une liste de détails qui nécessite une bonne connaissance du monde de l'intérim, ses us et coutumes pas toujours modélisables dans un algorithme.
Pour garantir la satisfaction des besoins des entreprises clientes, il est important de vérifier que la plateforme dédie un interlocuteur afin que ce dernier connaisse les exigences / contraintes et les attentes de toutes les parties. Ce faisant il pourra interagir rapidement avec l'entreprise en cas d'absence d'un intérimaire par exemple, intérimaire qu'il faudra remplacer en urgence. Il faut, en effet, savoir gérer les aléas, ce que les algorithmes ne font pas. En outre, un minimum de transparence est à exiger des entreprises comme des candidats afin de s'assurer du respect des engagements.
Les emplois soumis à la réglementation ou de niche dans le domaine médical, du transport ou de l'agro-alimentaire ne sont pas à prioriser pour apprécier cette solution. Par ailleurs, dès lors qu'il y a un enjeu d'image pour l'entreprise tels les postes en relation directe avec la clientèle, il est préférable de confier la recherche d'un intérimaire à une agence classique. Ces ETT ont en effet pour force de rencontrer les candidats. Car un frein qui peut limiter le processus pour le recruteur, c'est la validation du savoir-être qui pour 50 % d'entre eux est déterminant. Si les compétences peuvent être acquises avec des formations, l'attitude au travail, non. Dans les RH, le fameux BAM (Bonjour, Au-revoir, Merci) est crucial. Des échanges via vidéo-conférence ne suffiront certainement pas.
En conclusion, si faire appel à une agence digitale est une solution pertinente, elle suppose d'avoir parfaitement défini les besoins de l'entreprise et d'avoir réalisé un benchmark précis avec ses équipes internes ou avec l'appui d'un conseil.
Par Bertrand Sanséau, directeur associé d'Euklead et expert intérim - Diplômé de l'IUT de Reims en informatique de gestion, Bertrand Sanséau débute sa carrière chez Ecco Travail Temporaire et ensuite Adecco à des postes de contrôleur de gestion, responsable administratif et financier et directeur de secteur. Puis, il rejoint Autobar comme directeur général avant de créer, en 2010 son propre cabinet de conseil en optimisation des coûts, SENS&O Conseil. En 2013, il participe à la création d'Euklead où il occupe le poste d'expert travail temporaire/optimisation RH. Il y est également en charge du Business Développement et du management de projets.