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Entreprises de transport : qui doit payer les frais de déplacement ?

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Entreprises de transport : qui doit payer les frais de déplacement ?

L'inflation et la crise du carburant ont replacé la question des frais professionnels liés aux déplacements au coeur du débat dans les entreprises de transport. Revient-il à l'entreprise d'avancer les frais de carburant aux chauffeurs ? Les collaborateurs doivent-ils avancer les sommes et demander un remboursement via une note de frais ?

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Dans le secteur des transports, la confiance mutuelle est souvent assez faible entre employeur et employés. Avec la crise du carburant et l'inflation, 1ère source de risque selon les équipes financières pour 2023 selon PwC (1), la défiance est ultérieurement exacerbée lorsque les chauffeurs et l'équipe dirigeante se renvoient la balle concernant la responsabilité du paiement des frais de déplacements, faute de moyens de paiement suffisamment flexibles et transparents.

Et pour cause, les gestionnaires de flottes sont aujourd'hui les premiers à enjoindre les directeurs financiers à chercher des solutions qui satisfassent le besoin de contrôle des équipes financières et d'autonomie d'action des conducteurs.

Quelles doléances de la part des chauffeurs et des équipes financières ?

Trois tendances émergent parmi les frustrations récurrentes côté chauffeurs comme côté employeurs : pour les chauffeurs, celle de ne pas pouvoir se ravitailler à l'étranger (pour les frontaliers) et de devoir avancer les sommes de sa poche en pleine période inflationniste, et pour l'employeur, la crainte de peiner à recruter.

L'embargo sur le pétrole russe en vigueur depuis le 5 décembre 2022 rend désormais difficile aux chauffeurs de faire le plein dans les stations-service habituelles (pas assez approvisionnées), pour lesquelles ils disposent souvent d'une carte de paiement. Pour les chauffeurs frontaliers, renoncer à l'opportunité de se ravitailler en essence chez nos voisins Belges, Allemands, Espagnols, Italiens, à moindre coût et à moindre distance... est perçu comme une opportunité ratée pour leur employeur, et une rigueur administrative absurde et contraignante dans l'exercice de leur travail.

Aussi, face à une inflation galopante, l'option d'avancer les frais d'essence de leur poche n'en est plus une pour les chauffeurs. Dans les scénarios les plus heureux, les entreprises mettent à disposition de leurs chauffeurs une enveloppe supplémentaire en espèces, renonçant ainsi à tout monitoring sur la dépense, ou encore les chauffeurs doivent appeler leur employeur (parfois le week-end) en espérant pouvoir venir à bout de l'inter administratif à temps pour pouvoir faire un plein, en l'espace d'une pause sur aire d'autoroute.

Enfin, ces contraintes pèsent lourd sur les recrutements dans un secteur déjà fortement sous pression et exposé à la pénurie de main-d'oeuvre qui s'étend à tout l'Europe.

Ces éléments rendent l'identification d'un mode de paiement suffisamment fluide et transparent, essentiel à la compétitivité du secteur, à l'efficacité des supply chains et au dynamisme de l'économie européenne.

Un poids évident pour toutes les parties prenantes en entreprise

Les gestionnaires de flottes et les équipes financières sont unanimes : une gestion inefficace des frais professionnels en déplacement a un coût financier et un poids psychique.

Des responsables des opérations dérangés en pleine nuit par des conducteurs en besoin urgent de fonds pour se ravitailler en essence ou faire une réparation, aux équipes financières obligées de passer à la loupe chaque dépense de leurs collaborateurs, en passant par des chauffeurs obligés de tenir un registre précis de leurs dépenses sur fichier Excel avant de le soumettre pour remboursement : ces démarches font perdre du temps, de l'énergie, de l'argent et n'améliorent en rien la relation de confiance nécessaire au bon déroulé de toute activité commerciale.

Certes, des solutions existent et sont démocratisées auprès des entreprises de transport. C'est le cas de la plupart des "cartes carburant". Cependant, elles mobilisent le contrôle manuel des transactions par le directeur des opérations, ne servent qu'à payer les frais d'essence dans les stations-service agrémentées. Sont exclues les réparations chez le mécanicien, les nuits d'hôtel lorsque survient un imprévu, la possibilité de faire un plein dans une station avec des tarifs avantageux.

Ces lacunes engendrent fatigue du personnel et retards, du travail supplémentaire pour la fonction finance et une véritable menace de pénuries provisoires dans les chaînes de ravitaillement.

Satisfaire la fonction finance et les chauffeurs

En excluant les cartes de crédit, que les entreprises de transport rechignent à confier aux conducteurs dans un secteur où la courte durée des contrats de travail empêche de tisser des liens de confiance réciproque, l'identification de solutions permettant de voir les transactions initiées par les employés, de les contrôler, mais aussi permettre une autonomie danse leur travail sans frustration et pertes de temps, devient non négociable dans le transport routier.

Du côté des chauffeurs, il est souhaitable de faire son travail dans des conditions de sécurité optimale. Les rythmes doivent permettre de se payer une chambre d'hôtel lorsque la fatigue constitue une menace trop importante à sa propre intégrité physique et empêche de reprendre la route.

Le matériel de l'entreprise (les véhicules confiés) doit parfois subir des réparations : celles-ci doivent pouvoir être effectuées pour des raisons de sécurité du personnel et de productivité de l'entreprise, même à l'autre bout de l'Europe - et en cas d'urgence, même en pleine nuit !

Aussi, nul ne peut blâmer un chauffeur d'avoir le réflexe intrapreneurial de vouloir faire faire une bonne affaire à son employeur, en faisant un plein de diesel de l'autre côté de la frontière si une occasion avantageuse se présente.

Cependant, la fonction finance doit pouvoir avoir une vision d'ensemble des flux et paramétrer la dépense à tout instant, et si possible en temps réel. Une solution financière vraiment adaptée au secteur des transports ne doit sacrifier ni la fonction finance, ni les chauffeurs.

Démocratiser l'éducation financière en entreprise

Si une entreprise se construit souvent par un rapport de force, elle prospère à long terme que dans un rapport de coopération. Il s'agit moins pour les DAF de se servir du digital pour surveiller "foucaldiennement" leur personnel, que pour budgétiser, analyser les flux financiers, anticiper besoins et tendances financières pour les mois à venir, ainsi que pour identifier et éduquer aux bonnes pratiques qui viendraient de leur personnel.

Une solution financière profondément adéquate au secteur des transports ne peut faire l'économie d'éduquer toutes les parties prenantes aux bonnes pratiques financières et managériales.

C'est pourquoi, le digital doit aussi permettre de repérer que tel chauffeur se ravitaille régulièrement depuis des semaines en Andorre où le diesel coûte 1,5 euros le litre, contre presque 2 euros France(2), que tel autre a trouvé un mécanicien rapide et moins cher sur son chemin et peut partager cette adresse à ses collègues, de saluer leurs initiatives et de s'en inspirer pour évangéliser le reste des collaborateurs.

De cette confrontation productive entre le personnel sur le terrain et le personnel financier, les technologies financières peuvent nourrir l'émergence d'un esprit intrapreneurial favorisant l'éducation aux bonnes pratiques et à la responsabilisation financière de chaque partie prenante dans les entreprises de transport.

Pour aller plus loin

Roy Skop, Regional Manager chez Soldo




(1) https://www.pwc.fr/fr/publications/fonction-finance/priorites-des-directions-financieres.html

(2) https://www.cargopedia.fr/prix-des-carburants-en-europe

 
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