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Adoptez la rémunération variable !

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Adoptez la rémunération variable !

Non, la rémunération variable n'est pas réservée aux seuls commerciaux: elle peut-être un formidable levier de performance également au sein des directions achats. À condition de mettre en place un système transparent et clair basé sur des critères pertinents.

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Les directions achats ont parfois du mal à recruter et à conserver leurs collaborateurs. Différents leviers peuvent être utilisés pour attirer et garder les talents : augmentation du salaire, avantages en nature, parcours de formation, etc. Avez-vous pensé à la rémunération variable ? En effet, beaucoup utilisée pour les commerciaux, cette dernière est peu proposée aux acheteurs. "La part de variable est rare au sein des directions achats. Et quand il y en a, elle est tellement faible qu'elle en devient anecdotique. Pourtant, beaucoup d'acheteurs aimeraient avoir du variable", estime Stéphanie Plays, manager de la division achats chez Hays Lille. D'autant plus que les avantages de proposer du variable aux équipes achats sont multiples. À condition de suivre quelques bonnes pratiques pour sa mise en place et la définition des critères.

Davantage de performance

Pourquoi proposer du variable à ses équipes quand on est directeur achats ? "La motivation est le premier critère", avance Stéphanie Plays. Bernard Marty, fondateur de Bernard Marty Conseils - Rémunération & Engagement, observe en effet que les plus jeunes recrues sont désireuses que leur performance soit prise en considération dans leur rémunération. "Dans quelque fonction que ce soit, on ne peut désormais attirer des candidats de valeur si on ne leur offre pas la possibilité d'augmenter leur rémunération par une partie variable liée à leur performance ; proposer une rémunération purement fixe peut conduire à attirer des candidats pour lesquels la "culture de la performance" est insuffisamment développée", pointe-t-il. Les meilleurs éléments s'attrapent donc avec du variable ! Stéphanie Plays fait elle aussi un lien entre performance et rémunération variable, de par les objectifs fixés : "Les équipes ont une vision précise de là où on les attend, de la direction qu'elles doivent prendre", indique-t-elle. Elles savent donc immédiatement quelles tâches doivent être réalisées en priorité et ne s'éparpillent pas dans des actions inutiles. Cela est d'autant plus vrai que, en l'absence d'un système de rémunération variable, un autre système est en place au sein des entreprises qui consiste à verser des bonus aux salariés les plus méritants. "Ses règles de calcul ne sont pas formalisées et il est difficile d'établir un lien direct entre variable versé et performance constatée", précise Bernard Marty. Les salariés ne savent donc plus quelles missions sont importantes, quelle direction prendre... L'impact du variable sur les performances n'a donc pas lieu. Bernard Marty remarque également que de tels systèmes non formalisés affectent la crédibilité du management car perçus le plus souvent comme résultant du "fait du Prince".

Une bonne communication

Mettre en place un système de rémunération variable clair et formalisé est donc essentiel. Mais pour en tirer tous les avantages, quelques bonnes pratiques s'imposent. Tout d'abord, Bernard Marty conseille de mettre en place un système variable réellement différenciant, qui récompense largement les collaborateurs les plus performants au détriment de ceux qui le sont moins. "Une enveloppe salariale additionnelle limitée à 2 % permet de récompenser dans de bonnes conditions de motivation les plus performants... à condition d'éviter le "saupoudrage" sur les moins performants", met-il en garde. La part variable du salaire ne doit effectivement pas être considérée comme automatiquement acquise, sinon les effets de motivation et de performance sont nuls. Éviter, donc, de l'inclure dans le salaire brut lors d'un entretien d'embauche: elle doit être évoquée, car c'est réellement un plus, mais bien être distinguée du fixe. La communication autour de cette rémunération variable est donc primordiale. "Les objectifs doivent être clairs", souligne Stéphanie Plays. Bernard Marty pense aussi que les règles d'application ou non de la rémunération variable doivent être transparentes pour éviter tout malentendu et décrédibiliser le système. "Conduire une appréciation efficace nécessite un travail préalable de la part du collaborateur et de son manager. À cet effet, l'entretien doit être préparé de part et d'autre ; la confrontation des idées et des positions de chacun ne doit pas être conduite dans l'urgence et la précipitation : une plage suffisante doit être réservée à l'entretien d'appréciation. Par ailleurs, le processus doit prévoir une procédure d'arbitrage en cas de désaccord sur les objectifs et/ou sur l'appréciation", décrit Bernard Marty.

Jérémy Cottin-Lamy, consultant chez Crop & Co, conseille quant à lui de bien communiquer sur ces modalités et de consacrer une période lors de laquelle on explique pourquoi une rémunération variable va être mise en place, comment elle est calculée, etc. "Il s'agit d'en profiter pour prendre du recul, d'expliquer les enjeux et les objectifs, aussi bien au niveau individuel, que de la direction achats et de l'entreprise. Tout le monde doit y trouver son compte. Il faut insister sur les bénéfices de chacun", décrit-il. Bernard Marty conseille d'associer les salariés à la mise en place du système de rémunération variable par le recueil d'entretiens individuels en amont (ce qui permet aussi d'identifier les leviers et indicateurs sur lesquels la part variable pourra reposer), mais aussi des simulations. Il faut donc y aller en douceur. Jérémy Cottin-Lamy propose même de mettre en place une phase de test de un à deux ans. Lors de ces phases de test, Bernard Marty propose de commencer par les niveaux de responsabilité les plus élevés avant de déployer le système à l'ensemble des salariés. De quoi commencer à identifier les freins et les défauts du système, mais aussi d'insuffler par le haut une culture de la performance, essentielle à la réussite de la mise en place d'un système de rémunération variable.

Lire la suite en Page 2: Des critères qualitatifs & Un objectif de performance global

Des critères qualitatifs

"Les acheteurs ne sont aujourd'hui plus cantonnés à cette vision purement économique de leur fonction" Stéphanie Plays, manager de la division achats chez Hays Lille

En matière de rémunération variable, un des axes les plus importants est l'ensemble des critères retenus pour la calculer. Car ce sont eux qui vont donner sa crédibilité au système, mais aussi guider les axes de performances. Première bonne pratique : éviter de mettre en place des critères uniquement basés sur la réduction des coûts. Pour Jérémy Cottin-Lamy cela pourrait conduire les acheteurs à adopter un comportement de "cost-killer" et une vision court-termiste. "Il ne faut pas que le système incite à toujours chercher le meilleur prix, ce qui pourrait nuire à la qualité. Des critères qualitatifs sont donc préférables à des critères quantitatifs", juge Cyril Brégou, associé-fondateur de People Base CBM. Il donne quelques exemples de critères qualitatifs : travaux de reporting, entretien du portefeuille fournisseurs, etc. "Cela permet de faire aller l'acheteur vers une amélioration de ses process", explique-t-il. Jérémy Cottin-Lamy reconnaît cependant qu'il est difficile d'écarter totalement un objectif de réduction des coûts. "Mais il faut se poser la question des modalités d'obtention de cette réduction, raisonner en coût complet et introduire la notion de cycle de vie", estime-t-il. Il invite à surveiller les très importantes réductions pour se prémunir des mauvaises pratiques ou des gains à court terme que l'on va payer de façon indirecte. "Les acheteurs ne sont aujourd'hui plus cantonnés à cette vision purement économique de leur fonction", pense quant à elle Stéphanie Plays, qui estime que les acheteurs sont aussi attendus sur des sujets tels que la qualité, le made in France, leur comportement vis-à-vis des clients internes, la fidélisation des fournisseurs, etc. "Mais ces critères sont plus difficilement mesurables", reconnaît- elle, incitant à mettre en place des systèmes de scoring. On peut également définir les étapes qui mènent à l'atteinte de ces objectifs qualitatifs finaux et pointer la réalisation de ces étapes intermédiaires. Ce qui veut dire qu'il faut accepter un temps long, et non la réalisation des objectifs sur une seule année.

Un objectif de performance global

Brice Malm, manager exécutif senior en charge de la division achats/supply chain chez Michael Page Interim Management, recommande de décomposer le variable selon deux niveaux : une prime individuelle de performance et une prime collective concernant l'ensemble de l'équipe achats. "On entend toujours dire que les acheteurs doivent être des animateurs internes et externes. Or, on voit rarement des indicateurs collectifs", observe Jérémy Cottin-Lamy. Il donne comme exemples d'objectifs collectifs l'organisation d'une convention fournisseurs annuelle, la mise en place d'actions de communication ou encore l'obtention d'un label Achats tel que la relation fournisseurs responsable. Des critères collectifs qui permettent de se prémunir de comportements trop individualistes nuisibles à la performance de l'entreprise. Ce sont finalement les axes stratégiques de l'entreprise qui doivent guider les critères définissant la rémunération variable des acheteurs. Si l'entreprise souhaite travailler en priorité la RSE, les acheteurs devront être objectivés sur ce critère, de même si c'est l'innovation ou la gestion des risques. Car n'oublions pas que c'est avant tout un objectif de performance globale qui guide la mise en place d'un système de rémunération variable.

Lire la suite en page 2: Étude: Le variable repose de plus en plus sur des performances collectives

Étude

Le variable repose de plus en plus sur des performances collectives

Tolson Consulting a réalisé un benchmark entre une quinzaine de grandes entreprises sur le salaire des acheteurs. Concernant la partie variable, ce benchmark nous apprend notamment que la part du variable croît considérablement avec l'évolution dans la hiérarchie: alors qu'elle est faible pour les juniors (entre 5 et 10%), elle peut représenter plus du tiers du salaire en haut de la hiérarchie. "Il est essentiel de proposer une partie fixe importante pour attirer les plus juniors", analyse Thierry de Cassan Floyrac, président de Tolson Consulting, qui rappelle que beaucoup d'entreprises proposent aussi de l'intéressement et de la participation qui augmentent le variable des juniors, proportionnellement davantage que celui des seniors. "C'est un élément d'attractivité non négligeable", juge-t-il. Concernant la part importante du variable pour les plus expérimentés, Thierry de Cassan Floyrac l'explique par la nécessité pour les entreprises de tout mettre en oeuvre pour conserver les personnes d'expérience et performantes: "Augmenter fortement la part variable permet de proposer un salaire attractif en prenant moins de risque pour l'entreprise", considère-t-il. Le benchmark révèle également que le variable repose de plus en plus sur des performances collectives. Le collectif compte en effet toujours davantage au sein des entreprises. "L'employé franc-tireur qui travaille seul, ça ne fonctionne plus. On encourage l'entraide entre acheteurs et le partage de bonnes pratiques", observe Thierry de Cassan Floyrac. Une partie de la rémunération variable peut être liée au résultat des achats dans sa globalité ou de la seule entité à laquelle le collaborateur est rattaché. Une autre partie du variable est liée aux résultats de l'entreprise et cette part croît avec la séniorité. "Le variable d'un directeur achats est directement lié aux résultats de l'entreprise. C'est une reconnaissance de l'apport des achats à la performance de l'entreprise", note Thierry de Cassan Floyrac. Concernant les critères individuels, le calcul du variable est de plus en plus basé sur des critères qualitatifs plutôt que quantitatifs. Sont notamment remises en cause les rémunérations variables basées sur les seules économies réalisées dont le calcul est toujours sujet à discussion, notamment pour les "coûts évités". "Les soft skills sont davantage valorisées. On laisse aux managers l'appréciation de la qualité du travail de leurs collaborateurs et si leurs arguments ne sont pas forcément quantifiables, ils doivent être précis et illustrés", remarque Thierry de Cassan Floyrac.


 
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