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"Les acteurs publics doivent renforcer leur démarche anticorruption"

Publié par Luc Perin le - mis à jour à
'Les acteurs publics doivent renforcer leur démarche anticorruption'

Créée par la loi du 9 décembre 2016, dite Sapin II, l'Agence française anticorruption exerce des missions de conseil et de contrôle. Olivier Renucci, chef du département du conseil aux acteurs publics au sein de l'AFA, souligne leurs progrès mais aussi les améliorations qu'ils doivent encore apporter à leur démarche anticorruption.

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En matière de lutte anticorruption, où en est le secteur public par rapport au secteur privé ?

De manière très synthétique, nous pouvons considérer que la maturité des acteurs publics en termes d'anticorruption est encore en retrait par rapport aux acteurs économiques assujettis à l'article 17 de la loi du 9 décembre 2016 [sociétés et établissements publics industriels et commerciaux employant au moins 500 salariés et dont le chiffre d'affaires est supérieur à 100 millions d'euros]. C'est ce qui ressort de cinq ans de missions de contrôle et de conseil de l'Agence française anticorruption. On ne peut exclure que cette tendance s'explique en partie par le fait que, pour ces acteurs économiques, le référentiel anticorruption est défini explicitement par la loi et que des sanctions administratives sont possibles en cas de non-conformité.

Quels progrès les acteurs publics ont-ils réalisés depuis la loi Sapin II ?

Il y a d'abord une prise de conscience croissante du nécessaire renforcement de la maîtrise des risques d'atteintes à la probité. De bonnes pratiques sont également constatées : comités spécifiques de pilotage du dispositif anticorruption, outils associant les opérationnels à l'identification de zones de risques, instances déontologiques compétentes pour les élus... Certaines collectivités font aussi bénéficier leurs principaux "satellites" de leur référent déontologue ou de leur charte déontologique

Quelles améliorations les acteurs publics doivent-ils encore apporter à la prévention et à la détection des faits de corruption ?

Nos contrôles révèlent encore des lacunes, notamment dans le portage du dispositif, le respect des règles déontologiques et la capacité des acteurs publics à déployer une fonction "contrôle et audit interne" efficace et structurée. Des mesures éparses de gestion des risques sont parfois en place, pour certaines issues d'autres obligations légales et réglementaires concourant à la probité : règles déontologiques statutaires, obligations de publicité sur les marchés ou certaines conventions octroyant des subventions... En ce cas, ce qui manque aux acteurs publics est l'articulation systémique et dynamique de ces composantes dans un dispositif d'ensemble fondé sur l'analyse des risques et impulsé par l'engagement de l'instance dirigeante. Nos enquêtes statistiques montrent par ailleurs que certaines mesures du référentiel anticorruption français, comme la cartographie des risques ou l'évaluation d'intégrité des tiers, suscitent encore des interrogations et sont peu familières des acteurs publics

Dans le domaine de l'achat public, pourriez-vous nous donner quelques pistes de prévention et de détection des atteintes à la probité ?

Sans prétention d'exhaustivité, lors du choix de la consultation, on peut signaler que la prévention des risques consiste par exemple à appliquer strictement les critères justifiant le recours aux procédures dérogatoires. Dans la consultation elle-même, elle réside notamment dans la justification du choix des critères d'analyse des offres, en particulier des critères techniques. En ce qui concerne le processus d'attribution du marché, un déport des décideurs en situation de conflit d'intérêts est nécessaire. Enfin, lors de l'exécution du marché, nous recommandons de réaliser des contrôles réguliers sur le volume et la qualité des prestations ou des travaux réellement réceptionnés.


Les principaux risques d'atteinte à la probité dans les marchés publics

L'attribution des marchés publics est particulièrement exposée aux risques de corruption et de trafic d'influence. Il y a corruption lorsque l'attribution d'un marché à un opérateur économique se fait en contrepartie d'une somme ou d'un avantage quelconque que l'opérateur verse ou attribue au décideur. Lorsqu'un tel avantage est versé à un tiers pour qu'il influence un décideur public, il s'agit de trafic d'influence. De plus, le non-respect des principes de la commande publique constitue en lui-même une atteinte à la probité : on parle de délit d'octroi d'avantage injustifié ou favoritisme. Par ailleurs, la décision d'attribution d'un marché public peut conduire à une prise illégale d'intérêts. C'est le cas lorsque l'un des décideurs dispose, au moment de l'acte qu'il accomplit en relation avec cette décision, d'un intérêt dans la société candidate ou attributaire d'un marché, de nature à compromettre son impartialité, son indépendance ou son objectivité. Enfin, un risque de détournement de fonds publics est associé à l'exécution d'un marché public, dans certaines circonstances : par exemple, le paiement de prestations ou de travaux commandés mais non réalisés, ou l'établissement d'un avenant dans des conditions contraires aux règles de la commande publique.

Pour aller plus loin :

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Olivier Renucci, chef du département du conseil aux acteurs publics au sein de l'AFA.La Rédaction vous met à disposition le Guide de l'achat public. Maîtriser le risque de corruption dans le cycle de l'achat public, document réalisé par l'AFA et la Direction des achats de l'Etat (DAE), juin 2020.

 
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