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"Les acheteurs vont prendre la main sur les contrats"

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Dans un monde où chacun essaie au maximum de limiter les risques, les contrats incluent-ils de plus en plus de clauses ?

Le contenu des contrats s'est, en effet, densifié, ces dernières années. Cependant, cet "enrichissement" ne concerne pas directement la chose ou la prestation achetées, ni même la gestion des risques que cet achat emporte. En réalité, il se dessine une forte tendance qui consiste à compléter les obligations contractuelles par un dispositif de clauses et/ou de documents étrangers à l'acte d'achat : chartes d'éthique ou de valeurs, codes de déontologie, adhésion au développement durable, déclarations sur l'honneur du respect des lois, etc.

L'entrée de ce type de documents, important de grands principes dans le champ contractuel, est signifiante. Ils sont créateurs de devoirs pour la partie qui les signe. Ainsi, au-delà du droit, l'intention est de faire du contrat un véhicule des valeurs de l'entreprise : il contribue, d'une certaine manière, à la construction de son image et à l'affirmation de sa réputation.

Tout se passe comme si l'entreprise posait le décor de ses relations et se positionnait vis-à-vis de ses partenaires. Le contrat se transforme en un outil de régulation de la relation à l'autre (les fournisseurs) en le contraignant au respect de devoirs et d'intérêts supérieurs à l'objet du contrat.

Il s'agit, au-delà des obligations du contrat, de mettre la relation sous contrôle, de la sécuriser pour protéger l'entreprise de la contagion d'un problème d'éthique. C'est une manière de rassurer l'entreprise sur la qualité globale de ses relations d'affaires.

Pourtant, la tendance est aux contrats courts, les acheteurs souhaitant se laisser la possibilité de renégocier rapidement. La relation paraît donc de plus en plus précaire. Est-ce une bonne chose, selon vous ?

En effet, cette précarisation existe : durées contractuelles très courtes, résiliation pour convenance, clauses de renégociation, de révision de prix, de benchmark, etc. affaiblissent le caractère contraignant du contrat. Mais cette tendance me paraît plus affecter les engagements que la relation elle-même. Pour être précis, elle affecte la fermeté des engagements. De ce fait, le contrat se réduit à une forme d'expression de la relation qui existe entre les parties. Tout se passe comme si le contrat incarnait plus la relation qu'il n'en matérialisait les engagements, comme s'il visait à préserver une relation qui le dépasse. Ce n'est pas illogique dans un monde complètement interconnecté par les technologies nouvelles et en relation immédiate permanente avec des partenaires.

Tous ces points sont-ils spécifiques à la France, à des relations contractuelles hexagonales ? Ou l'approche est-elle la même dans les autres pays avec lesquels vous travaillez ?

Même s'il existe des particularités culturelles et des systèmes de droit différents, ces tendances sont aussi présentes à l'étranger. Elles s'inscrivent dans un mouvement mondial. À titre d'exemple, dans les pays anglo-saxons se développe le concept de "soft law". L'idée est d'avoir une sorte de loi-cadre souple qui prévoit les lignes directrices mais qui ne lie pas trop.

Stéphane Larrière est directeur juridique pour les achats du groupe Atos après une expérience en cabinet d'avocats et dans les télécoms. Il est aussi, à titre privé, l'auteur du blog www.laloidesparties.fr dédié à la négociation et au droit.

 
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Aude Guesnon

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