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Géraldine Olivier - "La RSE est un élément clairement différenciant"

Publié par Aude Guesnon le - mis à jour à
Géraldine Olivier - 'La RSE est un élément clairement différenciant'

La directrice des achats indirects et de l'amélioration de la performance du groupe Fnac Darty est sur tous les fronts. Optimiser les achats indirects et les approvisionnements, animer le plan de performance groupe et assurer les synergies entre les enseignes... Rencontre avec Géraldine Olivier.

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Comment votre direction achats est-elle structurée et à qui êtes-vous rattachée ?

La direction des achats indirects compte 16 personnes et est rattachée à la direction des opérations et systèmes d'information du groupe dirigée par Olivier Theulle, membre du Comex.

Les achats indirects représentent 800 millions d'euros à l'échelle du groupe ; l'essentiel est en France (665 millions), le reste, en Belgique, aux Pays-Bas, en Suisse, en Espagne et au Portugal. Sur cette partie internationale, nous avons un responsable achat en Belgique et un autre sur la péninsule ibérique qui me sont rattachés fonctionnellement. Les sujets sur la Suisse sont gérés par mon équipe, en France.

Comment avez-vous travaillé sur la synergie Fnac Darty et structuré les équipes ?

La fusion entre Fnac et Darty a été officialisée en juillet 2016. Fin août, l'ensemble des cadres dirigeants avaient été réunis pour structurer 13 chantiers sur lesquels nous devions travailler entre septembre et décembre 2016 pour identifier des synergies entre les deux enseignes et les valoriser. Parmi ces 13 chantiers, il y avait un sujet achats directs, un sujet achats indirects, des sujets RH, marketing, logistique, finance, etc. Au bout de 4 mois, nous avons tous rendu notre road map, cadencée dans le temps.

Pour identifier les sujets achats prioritaires, nous avons croisé les cartographies des dépenses des deux enseignes, ouvert tous les contrats pour voir les échéances contractuelles et répertorié les fournisseurs communs. Nous avions 800 fournisseurs en commun qui représentaient près de 40 % de la dépense du groupe. Début janvier 2017, nous avions notre plan de route achats indirects.

Sur les achats indirects, il y avait une direction achats chez Darty plus réduite que chez Fnac qui avait un taux de couverture bien moindre des dépenses. Ils ne couvraient pas certains domaines. Pour que notre action soit efficace et pour que tout le monde trouve sa place au sein de la direction des achats indirects du groupe, j'ai créé des binômes composés d'un acheteur de chaque enseigne et, au fil des sujets, un acheteur pouvait être soit contributeur, soit leader. Chacun apportait son savoir-faire sur son périmètre et chacun négociait sur les sujets qu'il maîtrisait le mieux, pour les deux enseignes. Tout le monde a été embarqué et mobilisé.

J'ai été en charge pendant trois ans, entre le moment de la fusion et la finalisation des actions de synergies, de l'animation du plan de synergie. A l'échelle du groupe, nous avons réalisé 130 millions d'euros d'optimisation de coûts et revenus. Au début de la fusion, on avait prévu une réalisation à fin 2019 et nous l'avons délivré avec un an d'avance, au 31 décembre 2018.

Vous avez identifié 800 fournisseurs en commun.... j'imagine dès lors que vous avez massifié. Comment les fournisseurs ont-ils vécu cette période?

Le sujet des fusions et acquisitions est un sujet standard. Les fournisseurs n'étaient pas surpris de notre démarche; de notre volonté de tirer le meilleur de cette fusion. Nous n'avons pas ressenti de malaise. Pour certains, cela a été l'occasion de se positionner comme fournisseur des deux enseignes et de massifier leurs volumes.

La synergie a-t-elle également porté sur les outils?

La fusion des outils achats a bien évidemment fait l'objet d'une réflexion globale. La Fnac avait implémenté une solution en Saas (Ivalua). Darty fonctionnait avec un module de SAP vieillissant, qui n'était plus vraiment maintenu. Darty avait réfléchi à changer d'outil quelques années auparavant et avait envisagé d'opter pour la solution Ivalua. Le projet n'avait pas abouti pour des raisons budgétaires, mais quand, au moment de la fusion, s'est posée la question de l'outil, la décision de prendre la solution Fnac pour tout le groupe s'est naturellement imposée à nous, et nous avons opté pour Ivalua. En novembre 2017, l'ensemble des dépenses de Fnac-Darty en France était sous solution Ivalua. En novembre 2018, nous avons pu intégrer les activités de Darty en Belgique sous la marque Vanden Borre. L'ensemble des dépenses du groupe, filiales comprises, hors Pays-Bas, sont désormais dans l'outil de e-procurement.

Nous avons également traité des sujets de compliance. Nous avons un outil eAttestations sur lequel nos fournisseurs sont invités à déposer un certain nombre de documents légaux, par exemple déclaration Urssaf, habilitation de travaux électriques, etc. qui nous permet d'avoir une bonne idée de la compliance de nos fournisseurs vis à vis des sujets RGPD, loi Sapin II, etc.

Pourquoi l'animation du plan de synergies du groupe a-t-il été rattaché aux achats?

Lors de mon arrivée en février 2016, on m'a confié l'animation du plan de performance. Il était donc assez naturel de me confier l'animation du plan de synergies

A l'instar du plan de performance, le plan de synergies concernait toutes les directions de l'entreprise: les opérations (transport, logistique, SAV, livraisons, relations clients, informatique etc), l'exploitation des magasins, l'immobilier, la billetterie, le marketing, la direction commerciale et des services; toutes les directions ont été contributives du plan de synergies et sont aujourd'hui contributives du plan de performance. Le fait de confier l'animation du plan de performance et du plan de synergies aux achats me semble très pertinent car, côté achats, il nous donne les coudées franches sur un certain nombre de sujets. Nous sommes autorisés à challenger les besoins des uns et des autres. Il est très cohérent que les achats et la performance soient réunis au sein de la même entité. Quand j'étais chez Canal +, en charge des achats indirects, l'un des challenges principaux était d'embarquer les opérationnels dans le processus achats. Il fallait évangéliser sur le sujet des achats pour que les clients internes intègrent la direction des achats dans leur process. En alliant plan de performance et achats, la direction des achats, est naturellement légitime pour attaquer des sujets d'achats, d'appels d'offres, de négociation et d'optimisation.

Lire la suite en page 2 : Quelles seront les synergies avec Fnac/Darty ? - Comment travaillez-vous sur l'amélioration de la performance ? - Quelle relation entretenez-vous avec les fournisseurs stratégiques ? - Comment votre direction achats a-t-elle passé la période covid ? Quels ont été pour vous les difficultés les plus marquantes ?



Suite au rachat de Nature & Découvertes, quelles seront les synergies avec Fnac/Darty ?

Plusieurs partenariats opérationnels ont été lancés dès le deuxième semestre 2019 avec, en premier lieu, le développement de shop-in-shop Nature & Découvertes dans des magasins Fnac.

Le déploiement a débuté dès septembre avec l'ouverture d'un premier shop-in-shop à la Fnac La Rochelle Puilboreau, puis un shop-in-shop éphémère a ouvert ses portes à la Fnac Montparnasse pour la période de Noël. Trois autres suivront d'ici à la fin de l'année, avec notamment une première implantation de l'enseigne en Espagne.

Enfin, les produits Nature & Découvertes sont également vendus en France via un shop-in-shop digital accessible sur Fnac.com depuis le mois de septembre.

Sur le plan achats indirects, nous travaillons sur un plan de synergies. Classiquement, nous priorisons les sujets pour lesquels les fournisseurs sont communs à toutes les enseignes du groupe et les catégories d'achats avec un poids significatif en termes de masse d'achats.

Comment travaillez-vous sur l'amélioration de la performance ?

Chaque année, au moment de l'élaboration du budget, la direction financière détermine des objectifs, notamment en terme de chiffre d'affaires, de marge, de résultat opérationnel, de cash.

Le plan de performance vient contribuer au résultat opérationnel puisqu'il s'agit d'optimiser les dépenses versus l'exercice précédent. Un objectif global de performance est inscrit puis décliné par business units et cadencé mois par mois. La direction financière suit l'atteinte de ce plan de performance et vérifie que les actions ont bien les effets escomptés dans le compte du résultat du groupe. Mon équipe et moi sommes là pour que, au quotidien, l'ensemble des acteurs du groupe se mobilisent autour de cet objectif de performance et travaillent par des actions concrètes à l'optimisation des dépenses. Il peut s'agir d'actions d'achats, mais ce n'est pas uniquement cela. Le plan de performance comprend des actions autour de l'optimisation de la productivité en magasin, dans les entrepôts, de l'optimisation du plan de transport, du SAV, de la livraison du dernier kilomètre, etc. Toutes ces actions viennent nourrir ce plan de performance.

Tous les mois, un reporting commun finance-achats est élaboré monitorant l'atteinte de ces objectifs et montrant si la trajectoire globale est respectée. En début d'année toutes les actions permettant d'atteindre notre objectif global annuel ne sont pas identifiées, il s'agit donc tous les mois également de challenger l'ensemble des contributeurs sur la mise en place de nouvelles actions pour in fine atteindre l'objectif. Il faut être créatifs innovants et avoir la volonté de faire bouger les lignes. C'est un mode de fonctionnement qui était inscrit dans l'ADN de Fnac, avant la fusion. Notre plan de performance est à présent à l'échelle du groupe Fnac Darty.

Quelle relation entretenez-vous avec les fournisseurs stratégiques?

Elle est assez standard. Nous avons une dizaine de fournisseurs auprès desquels nous avons mis en place un suivi particulier tels nos partenaires du secteur du transport de l'intérim. Ce sont des gros postes de dépenses pour nous.

Concernant l'intérim, nous faisons beaucoup appel à eux pour nos entrepôts et nos magasins. Nous les sollicitons beaucoup et cette relation est vraiment construite dans la durée. Nous avons cette année mis l'accent sur le sujet des travailleurs handicapés. En interne, nous avons un taux de recours aux travailleurs handicapés qui est supérieur à ce que font nos entreprises d'intérim font pour notre propre compte. Nous avons mis en place un plan d'action avec l'ensemble de nos partenaires du secteur de l'intérim pour accélérer sur ce sujet-là.

Nous suivons également de près le sujet de dépendance économique. Une fois par an, nous faisons un mapping de la dépendance fournisseurs de FnacDarty. Nous veillons à ce que le groupe ne représente pas une part trop significative des revenus de nos fournisseurs. Nous les incitons à diversifier leur panel de clients. Nous sommes attentifs, lorsque nous passons de nouveaux marchés à ne pas rendre nos fournisseurs dépendants par la prise d'un marché significatif.

Comment votre direction achats a-t-elle passé la période covid ? Quels ont été pour vous les difficultés les plus marquantes ?

Comme bon nombre d'entreprises et de directions des achats, cette période de covid nous a obligés à nous repenser et à nous adapter en un temps record.

Au niveau du groupe Fnac Darty, nous sommes passés sur la période de confinement à un modèle de pure player, avec la fermeture de nos magasins, et le maintien de nos activités notamment dans nos entrepôts logistiques mais également de livraison à domicile et de réparation/SAV à domicile. Priorité a été donnée à la direction des achats, en collaboration avec les opérationnels et la direction des ressources humaines, de garantir la sécurité de nos salariés (gestion des dotations en équipements sanitaires, nettoyage/désinfection régulier de nos sites, ...). Il était également essentiel de travailler de très près avec nos prestataires de transport de colis à domicile pour garantir nos livraisons auprès de nos clients internet. Enfin, un travail en étroite collaboration avec la direction financière et notamment la trésorerie de groupe, et la comptabilité pour piloter et optimiser le cash.

Post confinement, la direction des achats a été à nouveau sollicitée pour étendre à nos magasins dans le cadre de leur réouverture des processus sanitaires drastiques non seulement vis-à-vis de nos employés mais de nos clients (mise en place de plexiglas, distributeurs de gels hydro-alcooliques ...). Plus globalement, aux côtés de l'ensemble des opérationnels, la direction des achats a négocié l'adaptation de certaines prestations au nouveau contexte qui est le nôtre dans tous les domaines : IT, marketing, relation client, maintenance, Facility Management, transport ... Cela a nécessité une mobilisation forte des équipes en un temps record !

Lire la suite en page 3: Misez-vous sur l'IA ? - Les deux enseignes, Fnac et Darty, vont-elles rester distinctes? Et comment mutualiser les dépenses sans risquer de fondre les identités? - La RSE est-elle une majeure au sein du groupe et comment vous, achats, contribuez-vous à rendre l'entreprise plus responsable? - Et sur la partie transport, comment limitez-vous votre empreinte ?



Misez-vous sur l'IA au niveau du Groupe Fnac Darty?

De façon globale, le groupe développe une démarche innovation portée par la direction de la stratégie. Des roads shows, par exemple, sont organisés par Fnac Darty qui permettent à des startups de se faire connaître. Que ce soit aux achats, à l'IT ou au marketing, nous sommes tous, contactés par des startups : nous avons donc a mis en place une communauté d'échanges pour savoir qui a rencontré des acteurs intéressants et faire que ces startups puissent être reçues par les directions métiers concernées. Nous organisons régulièrement des speed meetings qui réunissent les opérationnels, la direction de l'innovation et des startups. Des POCS peuvent alors être lancés. Nous avons 4 ou 5 POCS en cours au sein de l'entreprise sur des sujets complètement différents. La mise en relation a lieu entre les opérationnels, la direction de l'innovation et ces startups. Les achats, sont mis dans la boucle s'il y a la volonté de lancer un POC, pour mettre en oeuvre un contrat particulier, des éventuelles conditions tarifaires, etc. Et quand la graine a pris, nous faisons partie du circuit de validation.

Les deux enseignes, Fnac et Darty, vont-elles rester distinctes? Et comment mutualiser les dépenses sans risquer de fondre les identités?

Le groupe a la volonté de garder les deux enseignes distinctes, avec leurs spécificités. Ce sont des marques puissantes qui ont chacune leur identité et leurs clients. Il n'est pas question de faire fi de ces deux ADN forts. Les deux circuits de distribution sont différents et ils le resteront. Nous conservons l'identité visuelle de chacun et leur écosystème. Ce qui n'empêche nullement de mutualiser ce qui peut l'être. Pour le mobilier, par exemple, on peut conserver l'identité visuelle de chacun mais n'avoir qu'un fournisseur. Pour le marketing et communication, on peut aussi travailler avec la même agence. Ils savent gérer deux marques différentes. Il est aussi possible de mutualiser l'IT, la sécurité ou l'intérim sans risquer de perdre les identités de chaque enseigne.

Nous souhaitons capitaliser sur les points forts de chaque enseigne afin de les exploiter au service de l'autre. Darty, par exemple, est reconnu pour son excellent service après-vente et son service de livraison. Si un client commande une TV grand format à la Fnac, il bénéficie de la livraison et de l'installation Darty. On ne s'interdit pas de prendre le meilleur de chacune des enseignes pour l'offrir à l'autre enseigne.

La RSE est-elle une majeure au sein du groupe et comment vous, achats, contribuez-vous à rendre l'entreprise plus responsable?

Le groupe est très engagé dans cette démarche. À l'heure de l'hyperchoix, le groupe Fnac Darty s'engage à accompagner et à informer ses clients pour leur permettre de faire un choix éclairé. Cette mission est rendue possible grâce à des collaborateurs bien formés, sûrs de leur expertise; une information transparente sur les produits et des services innovants; un maillage territorial renforçant l'accès à la culture, aux services et à la technologie; des objectifs environnementaux ambitieux et partagés avec nos clients; une éthique des affaires plus consciente de ses devoirs et engagements.

Je suis membre du comité climat qui travaille sous l'égide du Secrétariat Général du Groupe DRH , en charge notamment de la RSE. Au sein de ce comité climat, nous travaillons activement sur la partie transport et sur le SAV, sur la réparabilité des produits que nous commercialisons et sur la gestion des déchets. Nous essayons de donner toutes les informations possibles aux clients pour les éclairer dans leurs choix d'achats. C'est dans ce cadre que nous éditons un baromètre du SAV (nous allons en septembre prochain sortir la troisième édition) mettant l'accent notamment sur la réparabilité des produits. Nous testons régulièrement des produits en laboratoire, répertorions les pièces de rechange et leur durée de vie sur le marché pour faire ce classement des produits plus ou moins réparables.

Sur la partie gestion des déchets, au titre de la RSE et au titre des achats, nous avons lancé une démarche au niveau du groupe, à la fois en magasin et sur les 80 plateformes de livraison. Une démarche qui porte sur la gestion des déchets (cartons, polystyrènes, etc) et sur la récupération des équipements DEEE.

Sur la partie DEEE : Quand le client commande une machine à laver, par exemple, qui est livrée à domicile, nous lui proposons de récupérer l'ancienne machine à laver mais nous allons aussi bien au-delà puisqu'on lui propose également de récupérer d'autres matériels, sans surcoût. C'est vertueux. C'est la garantie que le matériel va être trié, recyclé et revalorisé. Ces matériels sont confiés à des filières de recyclage comme Envie ou Emmaüs qui assurent la recyclabilité des produits.

Sur la partie déchets, nous remettons le sujet à plat en France, sur le groupe, au titre de l'ensemble des magasins et des plateformes, pour Fnac et pour Darty. C'est un élément clairement différenciant car le consommateur final est de plus en plus sensible à cette question.

Et sur la partie transport, comment limitez-vous votre empreinte ?

Nous cherchons à affiner, optimiser le schéma de transport et limiter le nombre de kilomètres parcourus. En ce qui concerne les véhicules, nous avons regardé en termes de parc ce qui pouvait être fait en interne ainsi qu'avec nos sous-traitants. Nous avons investi dans des véhicules plus propres et incitons nos fournisseurs à faire évoluer leur parc de véhicules pour aller vers des véhicules moins polluants. Nous les incitons aussi à revoir leurs schémas de déplacement. Nous avons formé nos chauffeurs et livreurs à l'éco-conduite.



 
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