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Quelle gestion des dépenses voyages dans le public ?

Publié par Camille George le - mis à jour à
Quelle gestion des dépenses voyages dans le public ?
© Nicolas Herrbach

A quel niveau sont gérées les dépenses voyages par les petits acteurs publics tels que les collectivités territoriales et quelles stratégies achats est-il possible de développer? Focus.

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Force est de constater que les travel managers se font plutôt rares dans le public, contrairement au secteur privé. Il n'empêche ! Cette catégorie d'achat mérite l'attention des acheteurs publics. En effet, les déplacements professionnels représentent non seulement un centre de coûts non négligeable, mais constituent également un vecteur important de notoriété. À la fois pour les collaborateurs internes, dont les conditions de voyage seront ou non génératrices de bien-être ou de frustration, mais aussi pour l'image externe de l'entité publique. Rappelons que les stratégies d'achat public ne sont autres que le reflet des politiques publiques en place et que, les acheteurs publics en ont bien conscience, chaque denier dépensé est celui du contribuable. Les déplacements des agents publics sont un sujet à ne pas traiter à la légère, donc. D'autant que la gestion des dépenses voyage est relativement complexe, avec une multitude d'acteurs et de marchés potentiels, ne serait-ce que pour gérer le transport, l'hébergement et les frais de bouche.

Pour gérer les déplacements des collaborateurs publics, les acheteurs suivent peu ou prou les mêmes logiques achats que dans le privé et utilisent les mêmes outils que leurs homologues du privé (compte logé, carte affaires, outils digitaux de gestions des frais...) Seuls les process varient quelque peu, ne serait-ce qu'en raison de différences dans les politiques de remboursement. Celles du secteur public sont particulièrement encadrées avec des grilles d'indemnités journalières pour les frais de mission des collaborateurs de la fonction publique (cf encadré ci-dessous).

Des achats non stratégiques... et pourtant !

Si la fonction de travel manager n'est pas ou est peu développée dans le public, c'est essentiellement parce qu'en fonction de la taille de la structure publique, les dépenses voyage représenteront des marchés trop peu stratégiques eu égard aux ressources et aux efforts nécessaires pour ouvrir de nouveaux marchés. À l'échelle d'une collectivité, par exemple, l'achat de voyages est loin d'être stratégique pour l'équipe achat souvent réduite.

Julien Chambert

"Même si l'acheteur avait la possibilité de réaliser une économie cash de 200 000 euros à l'année en achetant différemment, cela ne serait toujours pas suffisamment significatif comparé à des économies potentielles sur un gros poste de dépense tel que le nettoyage de l'espace public. Et ce, même à l'échelle d'une collectivité de 200 000 habitants !", illustre Julien Chambert, cofondateur de CBT Conseil. Avant de préciser que pour une grosse PME du secteur privé, la problématique de priorisation en regard des ressources disponibles et du gain généré serait la même.

Pour que les achats de voyages soient l'objet d'un suivi précis et de recherches d'optimisations constantes, une certaine volumétrie à l'année est nécessaire. C'est donc au niveau des achats de l'État ou des centrales d'achats publics que cela se joue. En effet, mener un appel d'offres public est une démarche coûteuse en temps-homme surtout, il faut donc que cela en vaille la peine. "Dans un contexte où l'Administration voit ses ressources de plus en plus limitées, il est logique que les acheteurs de petites structures s'intéressent au budget le plus stratégique pour elles avant tout. En revanche, les grands marchés publics d'État ou les groupements d'achats tels que l'UGAP ou encore l'AMUE (pour l'enseignement) sont plutôt bien organisés", estime Julien Chambert.

Ainsi, l'UGAP et l'AMUE ont fait le choix d'avoir un prestataire pour l'ensemble de leurs adhérents. L'UGAP, par exemple développe la catégorie voyage depuis 5 ans. La centrale met à disposition de ses adhérents un marché unique avec option. C'est-à-dire avec un certain nombre d'outils et de services sur étagère. Si vous n'avez pas le choix de la carte logée ni de l'agence (en l'occurrence FCM Travel solutions), vous avez la possibilité de prendre ou non la centrale de réservation hôtelière, par exemple. Quatre niveaux de services sont disponibles, de l'offre la plus simple à l'offre la plus complète et personnalisable possible. Pour une collectivité, avoir accès à une telle offre représente l'avantage énorme de s'économiser toute la partie appel d'offres et d'avoir un seul point d'entrée pour tous les services liés aux déplacements professionnels.

Lire la suite en page 2 : Stratégie d'achat et accords-cadres - Une longueur d'avance du public


Stratégie d'achat et accords-cadres

Du côté des achats de l'État, il existe au sein de la DAE un acheteur leader "déplacements professionnels " dont les principales missions sont d'être le référent interministériel sur cette catégorie d'achats et d'animer une équipe segment composée de correspondants au sein des ministères. "J'ai une fonction très transversale au sein des achats de l'État, explique Chrystel Verdier, acheteuse leader déplacements professionnels à la DAE. J'élabore avec les équipes segment les stratégies d'achat et la mise en place d'accords-cadres ou de marchés ministériels. J'effectue le suivi d'exécution de ces accords-cadres et m'assure de la performance des fournisseurs. Mais je m'occupe également du pilotage et de la consolidation des résultats financiers et qualitatifs des actions achats menées. Avec un volume de dépenses voyage annuelles de 400 M€ toutes catégories comprises, la DAE, qui gère les achats de l'ensemble des ministères et d'un certain nombre d'établissements publics, a opté pour une stratégie qui centralise auprès des agences de voyage les achats pour les segments train, avion, hôtel et location de véhicules. Nous avons également simplifié les processus de commande, facturation et paiement en systématisant le recours à un SBT, l'utilisation d'une carte logée et en dématérialisant les factures", détaille l'acheteuse. Le tout au travers de quatre supports contractuels définis pour couvrir l'ensemble des besoins des ministères et établissements publics, tout en jouant la carte de la mutualisation.

Une longueur d'avance du public

L'un des enjeux pour s'assurer une bonne gestion des achats de voyages est notamment d'arriver à réconcilier commandes et factures d'un point de vue comptable en assurant le respect de la chaîne de commande, autrement dit : ordre de mission, bon de commande, validation, facturation, paiement. "Un outil permet de dématérialiser la gestion des ordres de mission et des états de frais ; l'achat de prestations auprès des agences de voyage (billetterie, hôtellerie, etc.) online et offline ; ainsi que la facturation et le paiement de ces prestations. Au final, nous avons pu à la fois réaliser des économies d'achats, tout en simplifiant le traitement administratif d'un processus complexe", explique Chrystel Verdier, acheteuse leader déplacement professionnels au sein de la DAE. En cela, le public est en avance sur le secteur privé qui peine encore souvent à réconcilier comptablement commandes et factures. "Le ROP, le relevé d'opérations, de la carte logée, par exemple, fourni par votre agence de voyage, permet d'avoir l'ensemble des éléments de facturation à disposition. Et dans le secteur public, il peut faire valoir de justificatif de dépense, contrairement au privé qui a encore besoin d'un justificatif papier à fournir à la comptabilité", souligne Arnaud Bernet, directeur commercial B to B chez American Express.

Frais de missions dans la fonction publique

Pour les fonctionnaires, le remboursement des frais de mission est régi par décret (décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006, modifié par arrêté ministériel du 12 juillet 2018) qui fixe les taux d'indemnités de mission.

Un agent de la fonction publique d'État, de la fonction publique territoriale ou de la fonction publique hospitalière, peut prétendre à une prise en charge de ses frais de mission à hauteur des montants suivants :

- Frais de transport pris en charge dans la mesure où la solution choisie est le moyen de transport le plus adapté et le tarif le moins onéreux,

- 15,25 € par repas, quelle que soit la taille de la ville,

- 110 € par nuitée pour l'hébergement à Paris, 90 € pour les villes de plus de 200 000 habitants et 70 € pour les autres communes et Outre-Mer. Attention, le taux de prise en charge des indemnités de missions est réduit :

- de 17,5 % si le collaborateur est nourri gratuitement le midi ou le soir,

- de 35 % si le collaborateur est nourri gratuitement le midi et le soir,

- de 62 % si le collaborateur est logé gratuitement.


Focus - Marché unique ou lots multiples ?

"Faire plusieurs lots, ne serait-ce que trois : un pour l'hôtellerie, un pour le transport et un pour l'outil de réservation par exemple, sous-entend de très bien connaître ses besoins utilisateurs et implique d'avoir un niveau de maturité important", insiste Julien Chambert de CBT Conseil. Ainsi, si votre structure achats est bien dimensionnée en termes de ressources et de compétences, vous pouvez envisager de procéder en lots multiples. Dans le cas contraire, mieux vaut fonctionner en lot unique quitte à faire un lot unique avec option. "Il est tout à fait possible d'avoir un marché unique avec une seule agence de voyage, mais en spécifiant que vous vous réservez le droit de passer directement par une centrale de réservation pour l'hôtel par exemple, souvent source de frustration pour le voyageur", explique l'expert. C'est d'ailleurs ce qu'a fait la DAE avec un marché unique auprès d'une agence, mais en gérant les frais de bouche de façon dissociée. Pour Ziad Minkara, directeur général de CDS groupe, "en cas de lots multiples, utiliser une carte logée est essentiel ! Elle facilite le travail de réconciliation et assure un fil rouge des opérations comptables puisqu'elle permet de confirmer la transaction, de porter la trésorerie et de refacturer à l'opérateur. Il suffit de faire une carte logée par marché".



 
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