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Comment externaliser son parc applicatif

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Les grandes entreprises continuent de confier à un tiers leur maintenance applicative. Mais avant de choisir un infogérant, il est indispensable de définir le périmètre, les motivations d'un projet d'externalisation et son coût. Marche à suivre.

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En France, les projets de tierce maintenance applicative (TMA), qui consistent pour une entreprise à confier à une SSII la gestion d'une partie ou de la totalité de ses applications informatiques (ERP, CRM...), continuent de progresser. Selon le cabinet Pierre Audoin Consultants (PAC), le poids de la «TMA autonome», c'est-à-dire qui n'est pas incluse dans des prestations d'infogérance plus globale (on parle alors de «TMA enfouie»), a représenté 1,9 milliard d'euros en 2008 sur un marché des services informatiques estimé à 23,4 milliards d'euros. En ajoutant la «TMA enfouie» qui s'est élevée à 485 millions d'euros, le marché français de la TMA a totalisé 2,4 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2008. Pour Elisabeth de Maulde, présidente de PAC, l'un des principaux fers de lance du secteur est la TMA sur les progiciels (principalement SAP et Oracle), qui représente environ 37% du marché en 2008.

Externaliser son parc applicatif est une opération délicate car les enjeux financiers et les risques sont importants. Aussi il est nécessaire pour le donneur d'ordres d'afficher clairement ses motivations.

Témoignage
«Nous avons réalisé plus de 10% d'économies»

Dans le cadre de ses contrats d'infogérance, JCDecaux a choisi de confier une partie de la maintenance de son parc applicatif (Tierce maintenance applicative - TMA) à des prestataires extérieurs, «principalement pour obtenir un meilleur coût puisque nous avons pu réaliser une économie de plus de 10%, souligne Paul Braida, directeur des systèmes d'information de JCDecaux. Nous avons également mieux maîtrisé le volume des demandes liées à la maintenance de nos applications métiers». Ainsi, depuis 2005, la SSII Logica (ex-Unilog) prend en charge une partie des développements spécifiques réalisés sous Java (langage de programmation). D'autre part, depuis 2006, c'est Capgemini qui infogère les développements du progiciel SAP. Après avoir lancé, à chaque fois, des appels d'offres, le groupe français de communication extérieure a choisi ces deux prestataires car ils présentaient l'offre économiquement la plus compétitive. «Capgemini nous avait déjà aidés à mettre en place SAP, il connaissait donc bien nos processus métier», précise Paul Braida. Pour élaborer le contrat de la société Logica, JCDecaux a fait appel au cabinet de conseil informatique Nexsys. «Ce dernier nous a notamment aidés à bien définir la convention de service et la clause de réversibilité», explique Paul Braida. Au préalable, JCDecaux avait mis en place une équipe projet comprenant les équipes opérationnelles, le responsable achat de la DSI ainsi que la direction juridique. «Nous avons élaboré conjointement le cahier des charges portant sur nos deux projets d'externalisation», conclut Paul Braida.


JCDecaux
ACTIVITE
Communication extérieure
CHIFFRE D'AFFAIRES 2007
2,1 milliards d'euros
EFFECTIF GLOBAL
8 900
EFFECTIF ACHATS
12 collaborateurs

Paul Braida, directeur des systèmes d'information (DSI), JCDecaux

Paul Braida, directeur des systèmes d'information (DSI), JCDecaux

Réduire ses coûts grâce à la TMA

Dans la majorité des cas, l'acheteur cherche avant tout à faire des économies dans un projet de TMA en bénéficiant «de la capacité du prestataire à mutualiser ses infrastructures informatiques et ses locaux entre plusieurs clients», souligne Frédéric Giron, directeur des études chez PAC. Un contrat de TMA permet également à l'entreprise de disposer de compétences informatiques qu'elle ne possède pas en interne. En effet, l'externalisation a des conséquences sur la gestion et l'optimisation des ressources humaines. D'une part, les ressources internes peuvent se focaliser sur les nouveaux projets de l'entreprise. D'autre part, elles sont plus flexibles en fonction des périodes de surcharge ou de sous-charge de travail.

Une fois les enjeux connus, le donneur d'ordres doit identifier les principaux risques auxquels il s'expose. La perte du contrôle de la maintenance de l'applicatif figure au premier plan puisque les prestataires ont intérêt à conserver la maîtrise des applications de l'entreprise pour créer une situation de dépendance et pour garder une source de revenus. Autre élément à éviter: la perte de la maîtrise du système d'information. En effet, les prestataires reprennent l'ensemble des actions sur les applications informatiques de l'entreprise, il existe un risque de perdre la compétence fonctionnelle des équipes internes sur des progiciels qui peuvent être stratégiques pour la société. Pour éviter tous ces écueils, les donneurs d'ordres doivent prendre en compte de nombreux éléments.

Frédéric Giron, Pierre Audoin Consultants (PAC)

«Un contrat de TMA est souvent pluriannuel (engagement de trois à cinq ans) et intègre un engagement de résultats.»

Comment maîtriser les risques

Tout d'abord, avant de faire appel à une SSII, l'entreprise doit réaliser un audit de son parc applicatif pour déterminer si les éléments qu'elle compte externaliser sont «critiques», c'est-à-dire s'ils sont liés au coeur de métier de la société. «Si l'arrêt d'une application pendant une heure fait perdre de l'argent à une entreprise, mieux vaut ne pas la confier à un tiers», explique Frédéric Giron (PAC). Un avis partagé par Franck Lacombe, président du cabinet Pratiq, spécialisé en achats de prestations intellectuelles: «Bien des problèmes dans l'exécution du contrat découlent de périmètres applicatifs imparfaitement mentionnés au prestataire qui, après la phase de prise en charge, commencera légitimement à négocier des avenants remettant en cause l'équilibre économique du contrat .» Cette évaluation des applicatifs doit bien évidemment figurer dans le cahier des charges. Celui-ci est élaboré par l'équipe qui va super viser le projet de TM A: la direction des systèmes d'information (DSI) et la direction juridique. Quant à la direction achats, elle intervient dans les phases de négociation ou de renégociation des contrats avec les prestataires.

Si la TMA permet à l'entreprise de se décharger sur un prestataire et de se concentrer sur son coeur de métier, il est fondamental de mesurer le degré de maturité des équipes internes dans un projet d'externalisation, si besoin par des audits externes. Si ces collaborateurs ont toujours été en position de maîtrise d'oeuvre, avec un management direct des ressources (internes et externes) et des moyens, passer en mode externalisation de la responsabilité ne se fera pas sans heurts, ni immédiatement. En effet, pour Franck Lacombe (Pratiq), si la maturité est insuffisante, des solutions sont envisageables: formation, coaching et conseils externes en appui aux équipes de la DSI d'une part; adoption d'une stratégie comportant un morcellement des périmètres et sourcing privilégiant des prestataires plus souples dans leur gestion du contrat, d'autre part.

Une fois ces risques identifiés et maîtrisés, l'entreprise peut procéder à un appel d'offres pour déterminer le prestataire le mieux à même de répondre à ses besoins, notamment en termes d'expertise. Cette phase permet de valider entre autre sa connaissance métier et fonctionnelle sur certaines plateformes applicatives, les ressources dont il dispose et qu'il peut mobiliser, ainsi que ses références clients. Selon Franck Lacombe (Pratiq), les certifications constituent également un bon critère de choix. Elles permettent notamment de valider les compétences métier des infogérants. Il en existe deux principales sur le marché: la norme ISO et le label ITIL (Information Technology Infrastructure Library). Ce dernier rassemble les bonnes pratiques pour la gestion d'un système d'information édictées par l'OGC, the Office of Government Commerce (bureau public britannique du commerce).

En chiffres
L'évolution du marché en France

Le cabinet Pierre Audoin Consultants prévoit que le marché de la TMA devrait être de 2,3 milliards d'euros en 2010 et de plus de 2,5 milliards d'euros en 2011.

Soigner son contrat

Une fois le prestataire sélectionné, il faut bien veiller à la rédaction et à la structuration du contrat. «Dans le cadre de projet de TMA, il s'agit souvent de contrat d'une durée de trois à cinq ans qui intègrent un engagement de résultats», précise Frédéric Giron (PAC). Un contrat se déroule en plusieurs phases. Au cours de la première partie, la connaissance de l'application est transmise par l'entreprise au prestataire. Elle correspond à la phase d'initialisation pendant laquelle la TMA est lancée et où les équipes commencent à travailler sur le projet. Deuxième phase: celle de la maintenance de l'application par le prestataire qui permet de superviser les différentes étapes du cycle de vie du logiciel. Ce qui nécessite également de mettre en oeuvre des tests pour contrôler le bon fonctionnement du logiciel. Dernier point à surveiller dans le cahier des charges: la clause de réversibilité. Celle-ci doit être spécifiée dès la discussion du contrat et faire l'objet d'un plan détaillé, mis à jour régulièrement. Elle permet au client, en fin de contrat, de récupérer l'exploitation de son parc applicatif, voire de le transférer à un autre prestataire. Cette clause doit donc prévoir les modalités du transfert: obligation d'assistance de la SSII, accès aux sources du logiciel s'il a été développé par le prestataire, etc. Enfin, dans un contrat de TMA comme dans tout projet d'infogérance, il est important de jouer la transparence financière de part et d'autre. Le donneur d'ordres doit permettre au prestataire de calculer avec précision ses moyens et donc ses gains. Et Franck Lacombe (Pratiq), de rappeler que «les projets d'externalisation ne peuvent être des succès que s'ils sont profitables aux deux parties». L'acheteur doit être conscient que son fournisseur ne jouera le jeu que s'il tire profit de sa prestation, «c'est-à-dire s'il réalise une marge brute supérieure à 30% du chiffre d'affaires», estime Franck Lacombe (Pratiq). Pour cela, pas de miracle: le prestataire doit être suffisamment libre de ses décisions en termes de coûts (localisation, affectation des ressources...). «Faute de quoi, il lui sera nécessaire de compenser ce manque à gagner par une moindre tenue de ses engagements, que ce soit en termes de délais ou de qualité», rappelle l'expert. Un argument auquel, à n'en point douter, seront sensibles tous les acheteurs.

 
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Nathalie COSTA

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