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«La performance RSE des fournisseurs est un critère de sélection décisif»

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Le développement durable est une priorité des acheteurs de Bouygues Telecom, particulièrement pour les prestations de services généraux. Selon son directeur adjoint des achats, Alain Chambon, c'est un critère déterminant de sélection des fournisseurs, à qualité et coût égaux. Explications.

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Début 2010, Bouygues Telecom emménagera dans un nouveau technopôle et dans un nouveau siège. Vous menez donc des appels d'offres dans l'univers des services généraux. Quelle est, pour vous, l'importance des critères environnementaux et sociaux?

ALAIN CHAMBON: La performance RSE (responsabilité sociale et environnementale) des fournisseurs est un critère de sélection décisif. Depuis 2003, le développement durable fait partie intégrante de notre politique d'achats. Les prestataires de services généraux ne sont pas uniquement évalués sur des questions de qualité et de coûts.

Bouygues Telecom

Activité
Opérateur téléphonique
Chiffre d'affaires 2008
5,1 milliards d'euros
Effectif
8 650 salariés
Volume d'achats 2008
1,84 milliard d'euros
Effectif achats
80 collaborateurs

Cela signifie-t-il que le critère RSE prime sur ceux de la qualité et des coûts?

Pas vraiment. Le travail effectué lors de la rédaction du cahier des charges nous permet d'avoir une idée très précise de nos exigences. Dès lors, la performance RSE devient un critère déterminant dans l'attribution d'un marché, départageant les prestataires égaux en termes de qualité et de coûts. Et, bien sûr, cela reste un critère éliminatoire en cas de très mauvaise note.

Un acheteur peut toujours être tenté de privilégier l'offre économique la plus basse...

C'est une erreur, particulièrement dans les services généraux où les prestations reposent bien souvent sur de la main-d'oeuvre. J'ai toujours travaillé dans les achats, mais je viens du secteur de l'industrie, où l'on apprend à bien comprendre ce qu'on achète sur un marché donné et à raisonner en coûts complets. L'évaluation de la performance sociale et environnementale des fournisseurs s'inscrit pleinement dans cette philosophie. Elle va de pair avec l'analyse de la qualité et des coûts.

Comment jugez-vous la performance RSE?

Nous avons recours à un cabinet extérieur, EcoVadis, parce qu'il est très difficile de disposer des ressources en interne pour le faire. De plus, l'examen des prestataires se fait dans une totale indépendance. Depuis 2007, nous avons évalué plus de 110 fournisseurs dans 18 familles d'achats différentes. Dans le cadre des appels d'offres liés aux services généraux de notre futur siège social, une telle évaluation nous a permis de présélectionner une cinquantaine de prestataires dans neuf familles d'achats différentes.

@ Arnaud Olszak

«Depuis 2007, nous avons évalué 110 fournisseurs dans 18 familles d'achats différentes.»

Sur quels critères est évaluée la performance RSE d'un prestataire de sécurité, de nettoyage, d'accueil, etc.?

La politique de recrutement, la formation, le turnover... D'une manière générale, nous sommes très attentifs à la qualité managériale et aux conditions de travail des salariés. Nous ne voulons pas d'équipes excessivement stressées. C'est pourquoi nous privilégions, par exemple, le nettoyage des locaux en début ou en fin de journée, et non à des horaires décalés. Par ailleurs, nous regardons si un prestataire de propreté utilise des produits d'entretien respectueux de l'environnement, si un fabricant de mobilier recourt à des matériaux recyclables, etc.

Un fournisseur historique peut-il être évincé d'un marché?

Tout à fait. Et d'ailleurs, par le passé, nous l'avons déjà fait avec des distributeurs d'objets promotionnels, dont il nous est apparu que l'origine des produits comportait un risque. Il ne faut jamais perdre de vue que c'est l'image de Bouygues Telecom qui est en jeu. Les relations avec les fournisseurs doivent être basées sur le respect des principes éthiques et durables auxquels l'entreprise adhère, au même titre que la recherche permanente d'innovation, d'expertise, de pérennité et de rentabilité. D'ailleurs, ces notions sont souvent intimement liées.

En quoi l'innovation et la pérennité sont-elles liées aux coûts?

Prenez les systèmes de stockage de données. En considérant le critère de consommation d'énergie comme structurant dans l'appel d'offres, nous avons non seulement économisé entre 15% et 20% d'énergie et augmenté la durée de vie des systèmes, mais aussi permis à un fournisseur de développer son chiffre d'affaires. Le tout pour un niveau de qualité équivalent, voire supérieur. Bref, tout le monde est gagnant.

D'autres initiatives ont-elles permis de réduire votre empreinte écologique?

Nous avons réduit de plus de 30% la consommation de papier bureautique en prenant des mesures simples telles que l'impression recto verso en standard. Nous avons fait évoluer notre flotte automobile, ce qui nous a permis d'économiser plus de 48 tonnes de CO2 par an. Nous avons également modernisé certaines climatisations, baissant de 6% notre consommation d'électricité dans les bâtiments.

Ces mesures sont-elles reproductibles dans d'autres entreprises, notamment dans les PME où certains affirment que les achats durables ne sont pas une priorité?

Je le pense. A partir du moment où un acheteur définit clairement dans un cahier des charges son besoin en termes de qualité et de coûts, rien ne l'empêche d'introduire des critères environnementaux et sociaux. L'erreur est de bouger le curseur de la qualité et de ne pas raisonner en coûts complets. Par exemple, si vous achetez un mobilier de bureau bon marché mais de mauvaise qualité, vous ne pourrez l'utiliser qu'une seule fois. En revanche, si vous privilégiez un mobilier démontable de qualité, le produit aura plusieurs vies. Résultat: non seulement vous faites une économie mais, en plus, vous respectez l'environnement en réduisant votre consommation.

Biographie

Alain Chambon, 44 ans, est directeur adjoint achats de Bouygues Telecom. Diplômé de Sciences-Po Grenoble, celui-ci a rejoint la filiale du groupe Bouygues en 2001. Il était auparavant responsable des achats de Télécom Développement, une filiale de SFR Cegetel et de la SNCF.

 
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Sébastien DE BOISFLEURY

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