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« L'avenir appartient aux véhicules hybrides »

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Dans un contexte économique tendu, la gestion des parcs auto dans les entreprises est devenue plus rigoureuse selon Olivier Jouannic, président de l'Agora des responsables de flotte automobile.

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@ ARNAUD OLSZAK

Quel a été l'impact de la crise économique sur le quotidien des gestionnaires de flotte automobile dans les entreprises?

Olivier Jouannic: Nous avons assisté à un durcissement des contrôles et à un renforcement des suivis budgétaires. Auparavant, les entreprises faisaient preuve d'une certaine souplesse, par exemple dans l'utilisation exceptionnelle des cartes carburant le week-end. Ou encore au niveau de l'entretien, lorsqu'un collaborateur préférait passer par son propre réparateur plutôt que par le réseau référencé par l'entreprise. Désormais, les règles sont plus formelles et les salariés sont tenus de les respecter.

On a tout de même le sentiment que les gestionnaires de flotte ont été moins «touchés» par la crise que les gestionnaires de voyages par exemple...

C'est vrai, nous n'avons pas eu de coupes sombres dans les budgets. Mais vous ne pouvez pas redimensionner un parc automobile du jour au lendemain et, par exemple, remplacer des berlines ou des routières par des petites citadines. Le véhicule de fonction recouvre une dimension très affective et statutaire. La gestion d'un parc automobile est, en ce sens, intimement liée à la gestion des ressources humaines dans une entreprise. C'est une chose d'annuler un déplacement professionnel. C'en est une autre de retirer un véhicule à un collaborateur. De plus, vous n'avez pas véritablement de solutions alternatives comme la visioconférence pour les voyages. J'ajouterai que les responsables de flotte auto ont eu leur crise à eux et qu'ils n'ont pas été épargnés par les difficultés.

C'est-à-dire?

La fiscalité automobile, basée sur le taux d'émission de CO2 par km des véhicules, a complètement révolutionné les flottes des entreprises. Dans un laps de temps très court, les organisations ont dû revoir la composition de leur parc, avec toute la conduite du changement que cela implique, notamment d'un point de vue RH. Dans la plupart des cas, cela s'est traduit par une baisse des motorisations, voire par un changement de catégorie. Mais tous les acteurs concernés ont su trouver des solutions, de la DRH à la direction commerciale, en passant par les achats. Ces derniers, par exemple, nous ont appris à mieux intégrer des critères liés au coût total de possession d'un véhicule, tels que l'entretien ou la prévention.

Selon vous, les stages d'éco-conduite sont-ils vraiment efficaces pour faire baisser les coûts à long terme?

Tout dépend de quels coûts on parle. Les stages d'éco-conduite ont souvent été présentés comme un moyen de réduire sa consommation de carburant, à l'heure où le prix du baril de pétrole flambait. Puis, celui-ci est retombé mais reste, quoiqu'il arrive, très fluctuant. Ainsi, les bénéfices de l'éco-conduite en la matière sont très difficiles à appréhender. En revanche, il est certain que ces stages permettent de réduire le taux de sinistralité de votre entreprise, donc tous les coûts directs et indirects qui y sont liés, à commencer par votre prime d'assurance.

Quel regard portez-vous sur l'avènement annoncé du véhicule électrique dans les flottes d'entreprise?

Effectivement, on en parle beaucoup. Les intentions sont bonnes mais je crois qu'il faut rester prudent. D'abord, l'offre des constructeurs en la matière est encore limitée. Ensuite, je pense que les véhicules électriques, notamment pour des questions d'autonomie, ne pourront répondre que partiellement aux besoins de mobilité des entreprises, principalement pour les trajets urbains. Enfin, se posent tout un tas de problèmes pratiques. Par exemple, la plupart des locaux ne sont pas encore équipés de bornes... Et si le salarié recharge sa batterie chez lui, comment calculer la part due par l'entreprise sur sa facture d'électricité personnelle? EDF dit travailler sur le sujet. Mais pour l'instant, il n'y a rien de concret. Je pense que l'avenir appartient plus aux véhicules hybrides, comme c'est déjà le cas dans de nombreuses flottes d'entreprise.

Face à la crise du marché de l'occasion, les loueurs longue durée ont proposé de rallonger la durée des contrats. Pour certains, ces offres commerciales n'étaient pas aussi avantageuses qu'elles en avaient l'air, avec à la clé un parc vieillissant et coûteux à l'usage. Qu'en pensez-vous?

C'est du cas par cas. Pour certaines entreprises, ces propositions pouvaient se révéler intéressantes. Pour d'autres, non. Nous en avons beaucoup parlé au cours de nos réunions à l'Arfa, sans dégager une position ferme et définitive sur le sujet. Je pense que le métier de responsable de parc auto s'est beaucoup professionnalisé ces dernières années. Nous avons une meilleure lecture des offres proposées par les loueurs.

Comment expliquez-vous que votre métier soit peu, voire pas du tout, reconnu dans les organisations?

Nous sommes rarement positionnés dans les organigrammes. Les gestionnaires de flotte sont tantôt rattachés à la direction financière, tantôt à la direction achats, voire à la DRH ou à la direction commerciale. D'autre part, c'est une fonction sur laquelle les entreprises n'aiment guère communiquer. Enfin, ce type de poste était souvent confié à une personne plutôt en fin de carrière, qui connaissait bien son entreprise, mais qui avait peu de connaissances techniques. Aujourd'hui, vous avez de vrais professionnels même si le métier va sans doute évoluer et changer de périmètre.

De quelle nature est ce changement de périmètre?

Aujourd'hui, la gestion de flotte est relativement séparée de la gestion des voyages. Or, à l'avenir, je pense que ces deux univers vont se rapprocher. Les gestionnaires vont devoir acquérir de nouvelles compétences et se préparer à d'autres enjeux autour de la mobilité durable dans les organisations.

«La fiscalité automobile, basée sur le taux d'émission de CO2, a complètement révolutionné les flottes des entreprises. »

@ ARNAUD OLSZAK

«La fiscalité automobile, basée sur le taux d'émission de CO2, a complètement révolutionné les flottes des entreprises. »

Biographie

Olivier Jouannic (38 ans) est le responsable du service automobile du groupe OGF depuis 2009. Titulaire d'une maîtrise de gestion de l'Université Louis Pasteur de Strasbourg, il démarre sa carrière chez Arval en tant que gestionnaire de comptes spéciaux (1998-2000). Il rejoint ensuite le groupe SFR en tant que responsable du parc automobile (2000-2004), avant d'occuper cette même fonction chez Johnson & Johnson (2004-2009).

L'ARFA

Créée en 2008, l'Agora des responsables de flottes automobiles (Arfa) est une association appartenant au réseau des Agora Fonctions. Elle s'adresse à une communauté professionnelle, mais aussi à toute personne dont la gestion de parc auto fait partie du portefeuille d'activités. L'Arfa compte actuellement 85 membres.

 
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Sébastien de Boisfeury

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