Achats responsables : ne pas choisir, c'est déjà choisir
Flou réglementaire, instabilité géopolitique, reculs politiques... La transition écologique patine. Certaines pistes sont pourtant gagnantes à tous les coups. Les achats responsables en font partie. Ils offrent une manière concrète pour les entreprises de se transformer, avec des résultats à court terme, favorisant ainsi leur pérennité économique.

Rendre ses achats plus durables est avant tout un gage de résilience. Qui dit achats, dit aussi trouver les matières premières indispensables à l'activité de l'entreprise. Le triptyque coût-qualité-délais demeure bien sûr déterminant. Mais le contexte géopolitique, l'inflation et les crises environnementales rebattent les cartes de l'approvisionnement et imposent de raisonner en coût global. Identifier les risques, les anticiper, diversifier ou relocaliser ses achats, créer des relations durables et réciproques avec ses fournisseurs atténuent ces turbulences. Prenons l'exemple de la flambée des prix du cacao, due avant tout aux événements climatiques, force est de constater que les acteurs qui s'en sortent le mieux sont ceux qui ont noué des partenariats de long terme avec leurs fournisseurs.
Durabilité : l'argument qui fait la différence auprès des investisseurs et clients
Plus de résilience et de maîtrise des risques sur sa chaîne d'approvisionnement, c'est aussi un argument valorisable auprès des investisseurs. De plus en plus souvent, les fonds d'investissement imposent des critères en matière de climat, de biodiversité, de lutte contre la déforestation, etc. Les clients adaptent également leurs cahiers des charges et référencent en priorité les fournisseurs qui répondent aux certifications et aux standards les plus exigeants en matière d'environnement ou de droits humains. Sachant que, dans de nombreux secteurs, les impacts se situent principalement en amont de la chaîne de valeur, renforcer la durabilité de ses approvisionnements est un moyen efficace pour gagner des parts de marché et consolider les liens avec ses partenaires financiers et commerciaux.
Achats : levier stratégique pour accélérer la transition
Alors que le passage à l'action est la prochaine marche à franchir en matière de RSE, les achats responsables offrent des leviers concrets encore trop souvent sous-estimés. Sur la question climatique, la plus scrutée, la réduction des émissions du scope 3 (émissions indirectes, en amont et en aval de la chaîne de valeur) représente un véritable défi pour de nombreux acteurs. Après avoir réalisé leur bilan carbone et défini des objectifs de réduction, il reste, comme dans un régime, à mettre en place les actions nécessaires pour "perdre" les émissions superflues... et éviter de les reprendre. Dans la mesure où les achats représentent jusqu'à 90 % des émissions de GES* dans le secteur agroalimentaire, les acheteurs disposent de leviers importants. Entre autres, privilégier les pratiques agricoles les moins émettrices, favoriser celles qui stockent le plus de carbone dans les sols, détecter les risques de déforestation, etc. Or, l'optimisation des achats offre des leviers sur bien d'autres domaines que le climat : impact sur la biodiversité, respect des droits humains, ou encore gestion des ressources comme l'eau.
Loin d'être de simples exécutants, les acheteurs peuvent devenir le véritable moteur de la transformation durable, en collaboration étroite avec tous les autres services (RSE, marketing, finance, R&D...). Cette dynamique collective permet de repenser en profondeur l'offre de produits, les services et même le modèle économique de l'entreprise. Face aux incertitudes, un engagement résolu en faveur de la durabilité des achats n'est pas une contrainte : c'est un atout majeur pour gagner en stabilité, en résilience économique, et prendre une longueur d'avance sur les mutations inévitables du marché.
Pour aller plus loin : Marlène Morin-Lallemand est directrice conseil pôle santé planétaire chez GreenFlex
*Gaz à effet de serre
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