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« Nos acheteurs doivent savoir manager l'entreprise étendue »

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A la tête de la direction achats de Sanofi-Aventis depuis plus d'un an, Jean-Philippe Collin, a choisi d'investir dans l'expertise de ses acheteurs pour davantage professionnaliser cette fonction au sein du groupe. Interview exclusive avec l'une des figures incontournables de la profession.

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«Les acheteurs, auparavant multifamilles et monoclient, sont désormais monofamille mais multiclients. »

@ ARNAUD OLSZAK

«Les acheteurs, auparavant multifamilles et monoclient, sont désormais monofamille mais multiclients. »

Vous êtes à la tête de la direction achats de Sanofi-Aventis depuis avril 2010. Quelle stratégie avez-vous mise en place ?

PHILIPPE COLLIN: En un an, un panel de leviers a été actionné pour renforcer notre performance achats. Afin d'atteindre cet objectif, nous avons opté pour une refonte totale de notre organisation. Auparavant, la fonction achats était disséminée au sein des différentes entités de l'entreprise. Aujourd'hui, elle est plus cohérente et s'articule autour de trois pôles : une direction centrale - regroupant les fonctions analyse et contrôle de la performance, procurement engineering, projets spéciaux et RH - une direction globale divisée en cinq domaines d'achats (marketing/ventes, frais généraux, achats directs, investissements et scientifiques/cliniques) et une direction régionale fractionnée en huit zones géographiques regroupant les acheteurs pays.

Biographie

Diplômé de l'Ecole supérieure d'électricité (Supélec), Jean-Philippe Collin a exercé de nombreuses responsabilités managériales dans le domaine des achats, en particulier chez Tomson, Valeo et IBM. En 2004, il devient directeur achats du groupe PSA Peugeot Citroën, avant d'être nommé, en 2008, directeur général de Peugeot. Depuis 2010, il est directeur achats de Sanofi-Aventis.

Quelle est la valeur ajoutée de cette nouvelle organisation ?

Cette configuration, matricielle et 100 % homothétique, favorise une vraie continuité de nos actions. Chaque domaine est décliné dans chaque pays (une direction frais généraux au Brésil, une autre en Amérique du Nord, etc.) Chaque champ est piloté par un directeur local - d'un pays ou groupe de pays - lui-même placé sous l'autorité du patron de chaque domaine d'achat global. Grâce à cette nouvelle configuration, les différents acteurs travaillent de manière complémentaire. Le volet stratégique étant davantage traité en central et les problématiques de terrain en région. Cette organisation confère une plus grande fluidité et efficacité dans nos processus.

En quoi cette restructuration impacte le travail quotidien des acheteurs ?

Le changement est de taille puisque les équipes achats ne sont plus structurées par fonction client de l'entreprise (un acheteur dédié au service R & D, un autre aux affaires industrielles, etc.), mais par grandes familles d'achats. Les acheteurs, auparavant multifamilles et monoclient, sont désormais monofamille mais multiclients. Dorénavant, ils se consacrent à une seule famille d'achats tout en achetant pour le compte de plusieurs fonctions. Cette réorganisation renforce l'expertise de nos acheteurs en augmentant leur niveau de technicité sur une catégorie de dépenses en particulier. Ce qui leur permet d'établir une plus grande proximité avec les clients internes. Une logique également appliquée vis-à-vis des fournisseurs. Sans oublier que ce remaniement offre aux acheteurs une plus grande marge de manoeuvre pour globaliser et concentrer les achats avec nos partenaires stratégiques.

Autrement dit, miser sur la massification...

Pas nécessairement. Car nos acheteurs travaillent pour le compte de plusieurs clients aux besoins souvent différents. Une hétérogénéité d'autant plus flagrante que Sanofi-Aventis s'est progressivement diversifié sur plusieurs activités (santé grand public, vaccins, santé animale ou génériques, etc.).

Notre objectif n est pas de réduire coûte que coûte notre base fournisseurs, mais de l'optimiser. Si, pour certaines activités, nous pouvons diminuer le nombre de nos partenaires, pour d'autres, au contraire, nous cherchons à les diversifier et ce, pour ne pas être dépendant d'une seule entreprise. Et c'est justement en favorisant la montée en expertise de nos acheteurs, que ces derniers seront aptes à bien dimensionner leur panel.

Comment favorisez-vous la montée en compétences de vos acheteurs ?

Il s agit d un axe structurant de notre stratégie. Nous investissons largement dans l'expertise de nos équipes par la formation interne et externe. Les acheteurs peuvent donc suivre des modules sur la négociation, l'analyse de la valeur, le category management, la stratégie de sourcing, etc. Aspects fondamentaux pour développer leur leadership au sein de leur famille. Preuve du caractère prioritaire de la montée en expertise de nos acheteurs, notre direction s'est dotée d'un département «Procurement Engineering» qui concentre notamment processus et systèmes indispensables à la mise en oeuvre d'une démarche de sourcing réussie. Nous voulons que nos acheteurs s'imposent aussi bien au niveau stratégique qu'opérationnel. Nous leur demandons de construire une «road map», c'est-à-dire une vision marché à long terme, plus précisément sur trois ans.

Quels outils et/ou processus développez-vous pour tendre à un tel résultat ?

Afin de mieux maîtriser notre masse achats, notre direction «Procurement Engineering» travaille sur l'extension de notre outil «purchase-to-pay». Pour l'heure, elle est exploitée par 30 000 collaborateurs dans le monde. Cette direction planche également sur la mise en place d'un portail fournisseur, qui fait aujourd'hui défaut à notre organisation. Enfin, nos outils de sourcing vont être rénovés. Cette initiative s'inscrit dans le projet «Prima», dont l'objectif est de professionnaliser notre démarche de «Strategic sourcing et category management». Aussi, après une année 2010 dédiée à la refonte de notre organisation, 2011 est consacrée au déploiement de ces outils pour qu'ils soient accessibles à tous nos acheteurs et qu'ils contribuent à renforcer leur efficacité.

Dans cette stratégie globale, quelle place occupe l'impératif de réduction des coûts ?

Il s'avère incontournable même si nous privilégions avant tout une stratégie structurante et constructive dans le temps. En 2010, nous avons amélioré notre productivité achats de + 27 % par rapport à 2009. Cette année comme l'an prochain, nous prévoyons une amélioration supplémentaire de + 15 % (sur un taux de couverture équivalant à 80 %). Cela étant, notre performance achats va bien au-delà de ces chiffres. Et pour cause : la mission principale de nos acheteurs consiste d'abord à savoir manager l'entreprise «étendue», de l'interne à l'externe. Et ce, en jouant le rôle d'interface privilégiée avec les fournisseurs. Une démarche indispensable pour capter des solutions toujours plus innovantes, tout en les faisant adhérer aux orientations stratégiques de l'entreprise. C'est pourquoi, notre priorité consiste avant tout à nous doter d'une base fournisseurs performante et pérenne.

Sanofi-Aventis France

ACTIVITE Industrie pharmaceutique
CHIFFRE D AFFAIRES 2010 30,4 milliards d'euros
VOLUME DACHATS 2010 11 milliards d'euros
EFFECTIF TOTAL 100 000 personnes
EFFECTIF ACHATS 1 000 personnes

 
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Charles Cohen

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