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"Quand on achète 40 à 80% de son CA, les acheteurs devraient être aux premières loges. Ce n'est pas le cas!"

Publié par Geoffroy Framery le - mis à jour à

Pour ce nouvel épisode de "Ha Propos", la rédaction a le plaisir de recevoir Romaric ServaJean-Hilst, Directeur académique du MAI Executive Education Kedge, spécialiste de l'innovation BtoB.

Découvrez dans cette émission tournée sur le plateau de Décisions Achat TV, un entretien exclusif pour ce nouvel épisode de "Ha propos !" avec Romaric ServaJean-Hilst, professeur chez KEDGE Business School et aussi directeur académique du MAI, Exécutive Education de la même école. Ci-après, la rédaction vous propose un "Digest" des meilleurs verbatim.

Quelle est la place, justement, des achats dans l'innovation ?

La place des achats dans l'innovation est assez variable. Il n'y a pas de cas où cela est tout blanc, ou bien tout noir. Ce qu'on peut voir, c'est que vous avez à peu près la moitié des équipes achats qui sont impliquées régulièrement dans les projets d'innovation. Cela signifie que vous en avez une autre moitié qui n'est jamais impliquée dans l'innovation. Et de la même façon, on peut voir que vous avez des environnements plus ou moins favorables à l'innovation dans les achats. On a à peu près 29 %* des équipes achats qui sont hyperfavorables à l'innovation et qui sont moteurs de l'innovation. Puis, d'un autre côté, vous avez 15 % plutôt de crevards où là, ils n'y arriveront pas, ils n'y arriveront pas.

Est-ce qu'on peut parler d'innovation dans les achats ou au contraire changer de braquet et parler de la contribution des achats dans l'innovation de l'entreprise ?

C'est très intéressant comme question, puisqu'en fait, pour parler d'innovation au sens global de l'entreprise, il faut commencer par innover dans les achats. Le changement viendra de l'intérieur, puisqu'aujourd'hui, les acheteurs ne sont pas attendus particulièrement sur l'innovation, ce qui est assez surprenant, puisque la fonction achat est la plus légitime pour faire des relations entre l'interne et l'externe. Quand on achète 40 à 80 % de son chiffre d'affaires, de son budget, ça devrait être les acheteurs aux premières loges. Ce n'est toujours pas le cas.

Justement, vous produisez un baromètre qui traite de ce sujet. Quelle grande tendance, se dégage de ce baromètre cette année ?

Une grande tendance, observable dans d'autres baromètres, est celle de la réduction des coûts. La priorité des priorités pour 80 %. Rappelons que dans notre baromètre nous nous concentrons sur les cinq priorités du métier. Deuxième priorité, c'est la gestion des relations d'innovation. Et là, ça ne bouge pas non plus. Là où ça bouge, finalement, c'est la gestion des ruptures d'approvisionnement. Avec le Covid, c'est un sujet qui est venu sur le podium des cinq premières, puis qui est légèrement descendu en importance en 2021 et en 2022. En 2023 on voit que l'enjeu remonte. Assurer la compliance, est un sujet, on va dire, qui commence à stagner, qui est monté un peu de 2020 à 2021. En 2022, les entreprises ont fait de gros efforts.

D'accord, donc un petit plateau de maturité, finalement ?

Un petit plateau de maturité en termes de compliance. Je pense que cela allait de pair avec une digitalisation accélérée des achats pendant le Covid et les crises successives de ces trois dernières années.

Si on doit reparler innovation, quels sont les grands points communs entre les champions de cette discipline ?

Premier point commun, l'institution innove. En gros, si au niveau de votre entreprise, votre organisation, au sens large, il n'y a pas de volonté d'innover, ça ne marche pas aux achats. Deuxième point commun, l'acheteur a envie d'innover. Ça joue souvent au niveau de l'acheteur lui-même, mais l'acheteur, il n'y arrive que si son patron, si le directeur achat est également convaincu. Et puis, autre chose qu'on voit également sur notre baromètre, cette année, on a fait d'autres mesures, on a fait des analyses statistiques, on s'aperçoit également que le fait d'avoir un processus de sélection des fournisseurs innovant qui implique les achats, est aussi une condition de succès.

Est-ce qu'il y a un exemple qui vous a marqué particulièrement en termes d'innovation durant cette année, la construction de ce baromètre ?

Cette année, peut être comme exemple, c'est croisé finalement la directrice des achats de PLV de Chanel, qui, elle, a monté ses équipes et a impliqué ses équipes pour de la créativité, pour des temps, finalement, hors du temps, pour essayer de développer ses créativités personnelles et créativité en groupe, qui, finalement, réussit petit à petit à se diffuser à l'innovation. Souvent, ça tient sur des histoires d'hommes et de femmes.

Pour conclure un peu sur ce troisième baromètre, quel serait votre bilan ?

Petit à petit, l'innovation, qui n'est pas une priorité des services achats, est en train de grappiller 2 à 3 % par an depuis trois ans. On voit aussi repartir depuis 2022 la RSE. Parmi les cinq priorités absolues, on voit que ça reprend du poil de la bête en 2022. Ça, pour moi, c'est aussi une grande opportunité pour aller au-delà de la compliance, en formulant finalement une proposition de valeur de l'innovation : « Finalement, comment je vais apporter de la valeur à ma société et à la société dans son ensemble ? »

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