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Multitechnique : un marché sous tension

Publié par Jean-Philippe Arrouet le - mis à jour à

Sous l'effet de la crise économique mais aussi de nouvelles demandes de la part des donneurs d'ordres, le marché du multitechnique traverse une période de tension. Entre pression à la baisse sur les prix et exigences de qualité en hausse, les acteurs du marché sont en quête d'un nouvel équilibre.


C'est une sorte d'effet domino : quand les entreprises toussent, leurs prestataires s'enrhument. Avec le ralentissement économique amorcé en 2008, nombre d'entreprises ont réorganisé leur production, parfois en abandonnant des sites ou en les regroupant. Un mouvement qui n'est pas sans conséquence pour les prestataires multitechniques qui en assuraient l'exploitation. Second effet domino : une recherche d'économies sur tous les postes. Aux discussions engagées lors des renouvellements de contrats s'ajoutent désormais des renégociations de plus en plus fréquentes en cours de contrat.

Or la nature même de ces échanges se modifie. Parmi les directeurs de services généraux ou de l'environnement de travail, disposant d'une expérience de ces marchés, toute une génération est en passe de faire valoir ses droits à la retraite. Parfois, leurs entreprises en profitent pour supprimer cette fonction en interne et pour l'externaliser. Dès lors, le marché des prestations multitechniques est en train de changer de mains au profit de la fonction achat. Mais, comme l'observe Denis Szkobel, président du Sypemi (Syndicat professionnel des entreprises de multiservice immobilier et de facilities management), "Nous contractualisions avec des prescripteurs qui étaient avant tout attentifs aux règles de l'art du métier et à la bonne exécution de la prestation. Désormais, la priorité est la recherche d'économies drastiques, ce qui peut déséquilibrer la relation commerciale en faveur des donneurs d'ordres."

Une relation plus formalisée

Si le Sypemi tire le signal d'alarme c'est d'abord parce que cette pression se traduit par une érosion des marges. En l'espace de quelques années le résultat courant des prestataires mutitechniques, qui était en moyenne de 5 %, a fondu à moins 1 %. Conséquence : là où un prestataire pouvait prendre à sa charge certaines dépenses imprévues, ou les deux parties pouvaient discuter de leur répartition le moment venu, il n'y a plus de possibilité. Avec la tension sur les prix, cette marge de manoeuvre disparaît, remplacée par un plus grand formalisme des contrats. Tout doit être prévu au détriment d'une certaine souplesse dans la gouvernance des contrats qui existait jusqu'alors.

Autre répercussion : une difficulté à atteindre un niveau de qualité exigé qui n'a pas diminué, bien au contraire, dans un contexte de guerre des prix, donc de réduction de moyens. Les demandes des entreprises couvrent désormais des champs plus larges, du pilotage de la performance énergétique à l'intégration d'installations pour les véhicules électriques. "Pour gérer des bâtiments de plus en plus complexes, nous avons besoin d'une main d'oeuvre qualifiée" , souligne Denis Szkobel. "Il faut donc pouvoir former et rémunérer ces techniciens, or, aujourd'hui, il existe un risque de dumping social." Là où un contrat prévoyait dix personnes pour une prestation, sa nouvelle mouture n'en prévoit plus que cinq par exemple.

Dernière conséquence, une dégradation des conditions de travail des équipes de maintenance et parfois des risques pour la sécurité. Absence de douches (pourtant obligatoires pour les personnels permanents), de local pour stocker le matériel et parfois de bureau pour travailler, voire de connexion à Internet (paradoxal à un moment où l'exigence de reporting en temps réel n'a jamais été aussi forte).

Enfin, certaines économies ont été recherchées sur le rythme d'entretien des installations (réduction des cycles de maintenance), ce qui se traduit par une vétusté plus rapide des matériels et leur moindre fiabilité. Quant au respect des normes, il devient parfois un enjeu de sécurité pouvant conduire à l'exercice du droit de retrait du prestataire. Intervenir sur une toiture de nuit, par exemple, nécessite un cheminement éclairé et sécurisé. Une telle dépense, à la charge du donneur d'ordres, n'est pas toujours effectuée.

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