Négociation: Comment reprendre l'initiative par l'analyse du pricing power ?
Publié par Geoffroy Framery le - mis à jour à
Quatre profils fournisseurs, quatre leviers de négociation. C'est la grille d'analyse proposée par Denis Di Vito, fondateur du cabinet Ubac Advisors, dans une masterclass dédiée au sujet de la négociation. À travers cette typologie - market maker, product/service leader, cost leader et partenaire - l'expert décrypte les stratégies à adopter pour préserver ses marges, sécuriser ses approvisionnements et mieux répartir la valeur.
Face à un "market maker", sécuriser la relation prime sur la négociation prix
Quand le fournisseur détient un pouvoir de marché écrasant, il impose ses conditions. L'enjeu pour les acheteurs ? Miser sur la stabilité et bâtir une relation de long terme. Cela passe par des engagements stratégiques sur des développements communs, de l'innovation conjointe ou encore des accords pluriannuels sur les volumes. « Ce sont des leviers qui ne génèrent pas de concessions immédiates, mais qui ancrent la collaboration dans la durée », précise Denis Di Vito.
La qualité de son offre place l'avantage concurrentiel comme l'objet central de la négociation
Dans le cas d'un product ou service leader, maintenir l'accès à une solution différenciante devient critique. Il s'agit alors de s'assurer que cet avantage n'est pas réservé aux concurrents, tout en développant en parallèle des alternatives techniques crédibles avec les équipes internes (ingénierie, produit, marketing). « Même un fournisseur en position de force craint la perte de volume. Travailler sur des options crédibles envoie un signal fort », rappelle Denis Di Vito.
Fournisseur "cost leader", le terrain est favorable à des optimisations de prix
Ici, la négociation se joue sur la compétitivité. Enchères inversées, indexation des prix ou co-construction de plans de performance sont des leviers pertinents. « L'idée est de réduire le cost-to-serve, en aidant le fournisseur à optimiser ses coûts sans rogner ses marges », explique Denis Di Vito. Dans des secteurs comme l'automobile ou l'aéronautique, ces pratiques sont déjà bien rodées : logistique, achats, process industriels... tout est passé au crible dans une logique gagnant-gagnant.
Relation partenariale, un mot-clé: l'engagement réciproque
Ce modèle repose sur trois piliers : un temps long, un partage des risques et des bénéfices, et des objectifs communs formalisés contractuellement. Cela peut prendre la forme de mécanismes « take or pay », d'investissements croisés, de co-innovation ou de développement de marchés. Mais attention, « le mot partenariat est trop souvent galvaudé. Sans structure formelle, sponsors internes et pilotage régulier, on reste dans le transactionnel », tranche Denis Di Vito.
Vers un rééquilibrage des rapports de force
Au-delà des outils et des techniques, cette approche par le pricing power invite les directions achats à reprendre l'initiative stratégique. Comprendre les leviers du fournisseur, se projeter dans le temps long, bâtir une posture crédible face à l'inflation, autant d'étapes pour sortir d'une logique défensive et redevenir force de proposition. « Cette grille de lecture permet de mieux négocier, mais surtout de mieux collaborer. À condition d'en faire un réflexe partagé par les directions métiers », conclut Denis Di Vito.