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Litiges fournisseurs : anticiper en 4 points

Publié par Eve Mennesson le - mis à jour à

Un procès long, coûteux et à l'issue incertaine: non merci ! Pourtant, un litige avec ses fournisseurs peut vite arriver: facture perdue, qualité qui n'est pas au rendez-vous, erreur de livraison... Pour éviter de passer devant les tribunaux, le mot d'ordre est l'anticipation.

1 - Anticiper en choisissant judicieusement ses fournisseurs

La meilleure façon d'éviter un litige fournisseur est... de sélectionner au mieux ses fournisseurs. Des audits peuvent être réalisés par le service qualité, tandis que la direction financière doit anticiper toute défaillance financière. Me Franklin Brousse, avocat spécialisé dans les achats indirects, informatiques et télécoms, conseille d'éviter les situations à risque telles que la trop grande dépendance financière du fournisseur : dans ce cas, la sortie de la relation en cas de problème peut être plus difficile et le client peut être appelé en comblement de passif en cas de défaillance.

Au-delà de cette sélection rigoureuse, le client doit s'assurer que sa demande est bien comprise du fournisseur et que la réponse de ce dernier est adéquate. "Des litiges peuvent survenir à cause de besoins mal exprimés qui conduisent à des incompréhensions", avertit Cédric Guillouet, partner achats chez Althea. Un cahier des charges doit évidemment être rédigé et une réunion de lancement doit être organisée. "La réunion de lancement est essentielle pour s'assurer de la bonne compréhension des spécifications", insiste Cédric Guillouet.

C'est à l'acheteur de s'assurer qu'il n'y a aucune incompréhension. C'est également à lui de lutter contre les achats sauvages : à quoi cela sert-il de sélectionner ses fournisseurs avec soin si les opérationnels passent ensuite par des prestataires non validés ? Martial Gerardin, directeur général Europe de Perfect Commerce, fournisseur de solutions e-achat, conseille aux acheteurs de présenter les fournisseurs sélectionnés et leurs différentes prestations sous forme d'un catalogue, comme un site e-commerce. "Cela évitera des litiges : si les fournisseurs ont été validés par les achats, les conditions ont été négociées, il y a moins de flou", affirme Martial Gerardin.

2 - Anticiper en construisant un contrat solide

"Le meilleur moyen de gérer le risque de litiges est de disposer d'un contrat reflétant les particularités et la réalité de son achat", assure Me Franklin Brousse. À condition de ne pas se contenter de contrats types et, surtout, de les faire évoluer avec le temps ! "Les entreprises se reposent trop sur des modèles de contrats et ne les adaptent pas à la situation ; elles pensent donc être protégées mais ce n'est pas le cas", ­avertit-il. Ce n'est en effet pas la même chose d'acheter des boulons et des ordinateurs, ou même des ordinateurs et des logiciels : il ne faut pas se reposer sur des processus établis mais bien les adapter à chaque situation.

Le contrat signé doit donc clairement décrire ce qui est acheté et quelles sont les conditions commerciales. "La contractualisation relève du bon sens : qu'est-ce qu'on achète, pour combien de temps, sous quelle condition peut-on sortir de la relation, qu'est-ce qui est prévu en matière de propriété intellectuelle, quelles sont les garanties associées, à quel niveau va-t-on pouvoir engager la responsabilité du prestataire s'il est défaillant... ?", énumère Me Franklin Brousse. "Il est préférable de prévoir la manière de gérer les éventuelles évolutions de spécifications, qui peuvent nécessiter des négociations commerciales dédiées, afin d'éviter des litiges et des blocages", ajoute Cédric Guillouet.

Lire la suite en page 2 : Anticiper en adoptant les bons processus et Anticiper en dialoguant

3 - Anticiper en adoptant les bons processus

Les litiges peuvent également être administratifs : "Dans le cas de factures qui arrivent sans bon de commande, le rapprochement entre commande et facture ne se fait pas simplement, d'autant plus si les services ne communiquent pas et que le processus n'est pas outillé. Les achats sont alors confrontés à des litiges avec des fournisseurs non payés qu'ils doivent gérer en raison d'un processus déficient."

Pour éviter cela, Martial Gerardin conseille de mettre en place une politique de "pas de bon de commande, pas de paiement des factures" : "Le bon de commande est essentiel car c'est généralement lui qui précise ce qui est acheté et à quelles conditions. Il facilite également la comptabilité ­fournisseur". Le bon de commande, signé, est une preuve, une sorte de contrat : une pièce qui sera essentielle en cas de litige pour prouver sa bonne foi. Il ne faut donc vraiment pas le négliger !

Autre problème administratif relevé par Manuel Auguste-Dormeuil, consultant senior chez Synapscore : une facture émise qui comporte des erreurs. Ce peut-être un problème de montant - dû généralement à un problème de bon de commande - mais aussi tout simplement un problème de formes. Manuel Auguste-Dormeuil conseille donc d'émettre un cahier de consignes sur la façon de facturer. Et de se convertir à la dématérialisation : "La dématérialisation exige un certain formalisme qui fait que ces litiges de formes disparaissent car, sinon, la facture est rejetée", observe Manuel Auguste-Dormeuil.

La meilleure solution selon lui ? Proposer un portail fournisseurs où ils viennent déposer leur facture et peuvent voir l'avancement du traitement. "Cela limite les appels inutiles", indique-t-il. Cette dématérialisation peut être mise en place pour tout le processus d'achat, depuis la commande jusqu'au règlement : "Si le bon de commande correspond à la facture et que la livraison a bien eu lieu, le règlement se fait alors de manière automatique, plus besoin de validation", pointe Manuel Auguste-Dormeuil.

4 - Anticiper en dialoguant

Quel que soit le litige, lié à un problème de qualité ou à un problème administratif, il faut tout faire pour trouver une solution amiable : "Les procédures sont longues, coûteuses et aléatoires, souligne M e Franklin Brousse . Et si, au bout du compte, on passe quand même devant un juge, il sera sensible au fait qu'une solution amiable a été recherchée." Il rapporte qu'une loi va très prochainement aller dans ce sens. "Il faut privilégier le dialogue, trouver une solution alternative...", insiste Cédric Guillouet.

La meilleure des pratiques pour éviter un litige avec son fournisseur est donc d'entretenir de bonnes relations avec lui et de discuter avec lui du moindre problème rencontré. Me Franklin Brousse conseille quand même d'avertir par écrit, au moins par e-mail, pour conserver une trace. Des traces qui seront bien utiles en cas de procès. Quoi qu'il en soit, avant d'engager une procédure, il s'agit d'analyser les risques, de mesurer les chances qu'on a de gagner. "On peut ne rien récupérer, voire même devoir payer quelque chose", avertit l'avocat.


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