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Les directions achats, moteur de la relocalisation

Publié par Véronique Méot avec Patrick Brébion le - mis à jour à

Globalisation ne rime plus forcément, aujourd'hui, avec "délocalisation", mais de plus en plus avec "relocalisation". Le directeur achats dispose en effet de sérieux atouts pour encourager, voire engager, une action qui relève de la stratégie de l'entreprise.

La relocalisation des achats peut résulter de deux types de choix : une décision proactive ou une décision réactive. " Dans le premier cas, l'entreprise relocalise pour créer de la valeur, parce que le "made in France" soigne son image de marque, notamment. Dans le second, la décision intervient parce que l'attrait des LCC (low cost countries) diminue et que les coûts inhérents augmentent ", explique Romain Daumont, directeur général France de Lowendalmasaï, cabinet de conseil en management global des coûts.

Après l'engouement pour la délocalisation, la relocalisation apparaît donc comme une réponse aux déséquilibres des coûts (transport, logistique, salaires), aux multiples barrières (douanière, monétaire, culturelle), aux questions liées au vieillissement de l'outil de production implanté dans un pays lointain, etc. " Au moment de réinvestir dans un outil stratégique, il peut être pertinent de s'interroger sur l'opportunité de le rapatrier et sous quelle forme (filiale, sous-traitance) ", ajoute Bertrand Maguet, administrateur de la fédération Syntec et associé du cabinet MLA Conseil, conseil en management.

Le directeur achats, acteur ou moteur ?

Dans les deux cas, le directeur achats a un rôle à jouer. Dans une perspective de stratégie de croissance ayant comme objectif le développement des ventes, " il peut avoir un rôle d'aiguillon, à condition de disposer d'une position stratégique dans l'entreprise - s'il fait partie du comité de direction -, car cette décision appartient au top management, voire au conseil d'administration ", précise Romain Daumont. Pour les autres, " c'est peut-être l'occasion de prendre leur courage à deux mains afin de proposer une étude sur le sujet ", ajoute l'expert. Il y a là une fenêtre de tir pour se montrer audacieux.

Dans le second cas, constatant que l'attractivité des LCC s'amenuise, le directeur achats peut réaliser une étude des coûts et voir si, à l'analyse du TCO, il est judicieux de rapatrier une partie de la sous-traitance à proximité de ses clients. S'il constate des dysfonctionnements - hausse des salaires dans les pays où les achats sont délocalisés, turnover qui met en péril la capacité de production voire la qualité, problèmes de corruption, etc. -, c'est à lui de tirer la sonnette d'alarme.

Dans l'industrie, le directeur achats dispose d'un périmètre d'action important. " Les achats d'approvisionnements de production ouvrent des perspectives hyper stratégiques, et le directeur achats peut être amené à reconstruire la chaîne d'approvisionnements ", commente Bertrand Maguet. Il doit donc faire accepter à sa direction un surcoût immédiat, "vendu" en contrepartie d'une meilleure qualité, d'une meilleure réactivité, d'économies ­ultérieures, etc.

Un cinquième des directeurs achats encouragés à relocaliser par l'interne
Selon la huitième édition de l'Observatoire des achats (1), dédiée à la transformation des filières des fournisseurs, qui sera dévoilée le 5 juin à Paris, seuls 21 % des sondés sont encouragés par leurs clients internes à relocaliser (20 % en France). Aucune famille de produits ou de services n'est particulièrement concernée par la relocalisation; les articles manufacturés et les matières premières arrivent en tête, mais ne dépassent pas la note de 2, dans un barème établi de 1 (très faiblement concerné) à 5 (très fortement concerné).
(1)
Source : Observatoire des achats 2014 de BearingPoint, Essec et Novamétrie (500 directeurs achats interrogés en Europe et en Asie, dont 150 en France, représentatifs de toutes les tailles d'entreprises).