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IT : Repenser les achats par le TCO pour allier maîtrise des coûts et adoption

Publié par Denica Tacheva le | Mis à jour le

La maîtrise du coût total de possession des équipements devient cruciale. Cyprien Barrancos, CEO de YüZKO, plaide pour une approche inspirée du leasing automobile et ainsi développer une approche du parc IT qui repose sur le pilotage du cycle de vie, l'écoute utilisateur, la performance mesurée et l'économie circulaire. Entretien.

Est-ce que le pilotage des achats IT avec une approche TCO est un sujet aujourd'hui ?

Cyprien Barrancos : Les enjeux IT se multiplient. Il faut sécuriser l'entreprise, bien entendu, mais il faut rappeler que là où l'informatique était auparavant un simple outil, elle est devenue aujourd'hui l'outil de production principal de l'entreprise. En conséquence, il est essentiel de piloter au plus près ces équipements, et de facto, le TCO (Total Cost of Ownership) s'impose comme un levier incontournable. Si l'on veut déployer une stratégie performante et durable, on ne peut pas faire l'économie de ce type de calcul.

À l'image de la gestion d'une flotte automobile, est-ce qu'on peut articuler la performance technique et la stratégie d'achat sur le long terme ?

C. B. : Il faut s'inspirer de ce que nous a montré la stratégie d'achat dans l'automobile, notamment via le leasing. Le marché automobile a su assainir ses pratiques pour permettre aux entreprises de fournir des véhicules performants aux collaborateurs, tout en lissant l'investissement. Et l'informatique a repris ce levier. C'est le fait de créer des rotations maîtrisées, fournir aux salariés des outils à la fois performants techniquement et optimisés en coût d'achat, mais aussi garantir un haut niveau de performance au quotidien.

Il y a trente ans, un commercial faisait 50 000 km par an dans une voiture basique et mal isolée. Aujourd'hui, c'est inconcevable de rouler autant sans un véhicule confortable et sûr. Cette exigence s'est renforcée grâce à la possibilité de financer ces voitures via le leasing et de les restituer tout en valorisant leur valeur résiduelle. Le résultat c'est que la qualité a augmenté et les investissements ont baissé. Pour l'informatique, on est sur la même logique. Il n'est plus envisageable d'acheter un équipement sans réfléchir à son cycle de vie, sans planifier sa sortie du parc ni anticiper sa seconde vie, que ce soit pour la revente ou le don.

En outre, deux enjeux majeurs apparaissent. D'une part, l'enjeu financier, car mieux gérer son TCO, c'est améliorer la rentabilité de l'entreprise. D'autre part, il s'agit d'un enjeu RSE. Il est question de fournir de bons outils tout en évitant de générer du déchet inutile. C'est une stratégie d'investissement maîtrisée, avec des rotations planifiées, qui permet au moment où la machine n'est plus productive de la remettre sur le marché dans le meilleur état possible.

Concrètement, quels sont les leviers pour optimiser le TCO en répondant aux besoins des utilisateurs ?

C. B. : Chez nous, on fonctionne avec une double analyse. La première est purement technique et objective. En effet, on analyse le comportement des machines face à l'usage réel, ainsi que l'ensemble des logiciels installés. Cela permet de savoir si les utilisateurs sur-sollicitent leurs équipements ou non. Une fois cette photographie technique établie, on engage un dialogue avec les utilisateurs, pas juste un utilisateur, mais un panel le plus large possible.

Il ne s'agit pas de leur demander si leur PC est rapide ou pas, on a déjà ces indicateurs, mais plutôt de comprendre leur métier et leurs contraintes. Par exemple, un commercial qui passe ses journées à faire des relevés en rayon sera bien plus efficace avec une tablette équipée d'une sangle, plutôt qu'avec un PC lourd à transporter. Cette solution réduit non seulement les risques de troubles musculosquelettiques, mais aussi les risques de casse du matériel, ce qui représente un gain important pour l'entreprise sur le long terme. C'est pourquoi nous testons énormément de produits, en permanence.

Comment abordez-vous la question du confort d'usage dans vos solutions ?

C. B. : J'ai un exemple spécifique dans la restauration rapide. Des tablettes à 700 € achetées cash par les restaurants pour gérer le drive. Lorsqu'on a analysé l'usage, on a vu que ces tablettes étaient sous-dimensionnées et ralentissaient le flux de véhicules, allant jusqu'à créer des embouteillages. Nous avons proposé une tablette durcie à plus de 2 000 €, mais financée en leasing, et fait un test in vivo pour mesurer le nombre de véhicules en plus que le drive pouvait accueillir grâce à la fiabilité de la solution. In fine, l'argent généré par l'amélioration du service a plus que compensé le coût mensuel de l'équipement.

À l'inverse, on voit aussi des investissements massifs dans des salles de réunion avec des solutions de projection sans fil très coûteuses, plusieurs dizaines de milliers d'euros, mais sans formation des utilisateurs. Au final, le besoin de base, projeter, n'est pas couvert parce que les gens ne savent pas utiliser l'équipement. Cela prouve qu'il ne faut pas confondre investissement élevé et pertinence réelle, et qu'il faut mesurer le coût d'usage et la capacité d'appropriation des outils.

Comment la gestion des mobilités va-t-elle évoluer dans les prochaines années ? Auriez-vous des bonnes pratiques à recommander ?

C. B. : Aujourd'hui, le rôle d'une DSI est extrêmement complexe. Il faut être un allié de la croissance en apportant les bons outils, mais aussi garantir la sécurité, ce qui conduit parfois à freiner certaines aspirations. Ma vision, c'est que la DSI devra de plus en plus équilibrer ces deux rôles, tout en restant proche de ses utilisateurs, et avec une veille permanente sur les usages réels.

Cela implique de renforcer l'écoute métier, de mieux anticiper les cycles de renouvellement, d'intégrer une logique d'économie circulaire pour prolonger la valeur des équipements, et surtout d'être pragmatique, donc, former les utilisateurs, mesurer l'usage réel, et piloter son budget sur l'ensemble de la durée de vie des outils, pas seulement à l'achat.