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Le groupement achats d'HEC se penche sur le droit et les achats

Publié par Emmanuelle Serrano le - mis à jour à
Le droit et les achats au menu du dernier Afterwork de l'ACA
Le droit et les achats au menu du dernier Afterwork de l'ACA

Le dernier afterwork du groupement achats d'HEC et AgileBuyer était consacré au droit et aux achats. Un sujet stratégique abordé par Olivier Wajnsztok (AgileBuyer), Bertrand Rouzier, juriste et Isabelle Vaugon (Fidal). L'afterwork du 24 mai sera consacré aux achats dans le secteur du luxe.

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L'afterwork du 8 février organisé par le groupement achats d’HEC a réuni une soixantaine de participants. Au menu de cette réunion : le droit et les achats. Un sujet aussi stratégique que sensible pour les acheteurs et membres de l'association (qui vient de dépasser le cap des 200 adhérents).

Après l'introduction d'Olivier Wajnsztok, directeur associé d’AgileBuyer, Bertrand Rouzier, juriste au ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie (Médiation interentreprises) a passé en revue les pratiques abusives en matière d'achats et Isabelle Vaugon, avocate chez Fidal, a évoqué les pistes pour traiter différemment les conflits fournisseurs.

Dans son introduction, Olivier Wajnsztok, directeur associé d’AgileBuyer, a relevé que les relations entre les services des achats et le département juridique avaient tendance à se normaliser. Il a ensuite proposé une typologie de fournisseurs dont se dégageraient quatre profils principaux :
• Les “oui-oui”, qui sont les fournisseurs acceptant les contrats sans discuter ;
• Les “non-non” qui n’acceptent jamais les contrats clients. Et plus particulièrement, les fournisseurs américains de logiciels ;
• La troisième catégorie constituée de fournisseurs négociant les contrats pour la forme, c’est-à-dire pour montrer qu’ils ne disent pas oui tout de suite ;
• La quatrième catégorie regroupant les fournisseurs négociant les contrats sur le fond. Et ce sont souvent les plus gros contrats et les plus complexes.
Les discussions ont ensuite tourné autour de l'alternative entre soft law (1) et hard law. En d’autres termes, faut-il convaincre ou durcir la loi ? Pour Olivier Wajnsztok, « le choix qui sera pris par les politiques sur cette question risque de bouleverser le métier de l’achat ».

Après un rappel du cadre juridique de l’achat, Bertrand Rouzier, chargé de mission-juriste, Médiation interentreprises, a passé au crible l’ensemble des 36 mauvaises pratiques achats : « À chacune de ces mauvaises pratiques correspond un texte de loi, ce qui signifie que la loi n’est pas très bien appliquée. »

Parmi le top 10 des mauvaises pratiques : le non-respect des délais de paiement (paiement au-delà du délai légal, délocalisation des services achats à l'étranger, retard volontaire de facturation...), les pénalités de retards abusives, l’auto-facturation par le client avec ses risques de dérives (décalage de la date d'émission des factures...), les activités non rémunérées (frais de R&D, études, logiciels...), la pratique du stock de consignation où le donneur d’ordres exige du fournisseur un stock-tampon.

Près de 60 % des entreprises estiment que le retard moyen des paiements par leurs donneurs d’ordres est de 12 jours. Autres motifs de frustration : la rupture brutale de la relation commerciale, le détournement ou le non-respect de la propriété intellectuelle (interdiction de dépôt de brevet), imposition autoritaire des conditions générales d’achats (CGA) sans négociation aucune avec les fournisseurs, contrats passés à des prix fermes (scénario catastrophe pour des entreprises transformant des matières premières dont les cours peuvent être extrêmement volatiles), les modalités de commande (exclusion totale des CGV, annulation de commande non indemnisée, non-respect des prévisions de commandes...).

La liste est longue et, disons-le, pas trop à l’honneur des grands donneurs d’ordres. À bon entendeur salut. Travailler sur le respect des dispositions législatives, le paiement rapide des fournisseurs et l’établissement de relations partenariales harmonieuses dans un éco-système stable, voilà les recommandations de Bertrand Rouzier. « En asséchant les forces vives des PME, on ne garantit pas les conditions d’émergence des ETI dont la France manque pourtant cruellement », ajoute Bertrand Rouzier. Si les entreprises signataires de la charte des bonnes pratiques de la médiation des relations interentreprises industrielles et de la sous-traitance ont déjà fait un pas dans la bonne direction et ont nommé pour la plupart d’entre elles un médiateur interne, il reste beaucoup de travail et de bonnes volontés à massifier…« Notre rôle dans tout cela ? Rééquilibrer ces relations interentreprises. Car si certains donneurs d’ordres reprochent aux fournisseurs de ne pas vouloir négocier, beaucoup de témoignages recueillis au niveau de la médiation tendent à prouver le contraire », a martelé Bertrand Rouzier.

La médiation, un outil à la portée des entreprises

Formateur depuis un an à l'Institut de la gestion publique et du développement économique (IGPDE), le cabinet Fidal, à travers sa filiale Fidal Formation, propose une formation ad hoc agrée par le ministère de l’Économie et des Finances et la Cdaf visant à améliorer les relations entre les donneurs d’ordres et leurs sous-traitants ou fournisseurs.

« La médiation est un outil à la portée des entreprises pour une gestion optimisée des litiges après l’échec des négociations directes et avant ou dans le cadre d’un contentieux », a mentionné Isabelle Vaugon, avocate à la direction internationale du cabinet Fidal. Après avoir rappelé l’existence de modes alternatifs de règlement des litiges (médiation, arbitrage) et que la médiation se déclinait suivant plusieurs modes (conventionnelle, judiciaire ou médiation des relations interentreprises), elle en a souligné l’évident intérêt économique pour l’entreprise. Et il y a beaucoup d’économies à faire dans le domaine du règlement des litiges si l’on en croit Jean-Claude Volot qui, encore récemment, déclarait que l’ensemble des conflits entre donneurs d’ordres et PME représenterait environ 50 milliards d’euros, soit 2 % du PIB de la France.

Selon une enquête menée conjointement en 2009 par l’American Arbitration Association (AAA) et le cabinet Fidal “Vers un management optimisé des litiges”, 85 % des répondants considèrent que la médiation est une méthode de résolution des litiges plus rapide que la voie judiciaire (États-Unis : 80 %). L’avantage économique de la médiation est confirmé par 69 % des répondants français (États-Unis : 77 %). Les relations d’affaires sont préservées pour 85 % des utilisateurs de la médiation : par exécution du contrat (15 %), modification (31 %) ou création d’une nouvelle relation (38,5 %). 93 % des répondants considèrent que les médiateurs sont qualifiés (États-Unis : 99 %). Pourtant, seulement 39 % des entreprises interrogées utilisent la médiation (85 % des entreprises américaines). Pourquoi une telle disparité ? Parmi les explications données et dénotant toutes une vraie méconnaissance du sujet citons l’absence d’expérience dans la société, le manque de soutien du top management, le coût, l’aspect compliqué du processus, etc. 
Isabelle Vaugon a fait le point sur le rôle du correspondant PME ou médiateur interne en rappelant que le rôle du médiateur n’était naturellement pas neutre et indépendant mais qu’il devait néanmoins garantir une neutralité de principe et le respect de la confidentialité. Face à des parties dont les positions respectives peuvent être déséquilibrées, sa mission sera de rapprocher autant que possible des points de vue et de renouer le dialogue. Il ou elle doit aussi se poser en relais de communication en interne sur les problématiques posées et les solutions à apporter pour améliorer la relation en amont.

Pour aller plus loin :

> Interview avant le salon du Midest de Jean-Pierre Salaün, de la Médiation des relations interentreprises et de la sous-traitance sur l'état des rapports entre donneurs d'ordres et fournisseurs dans le secteur de la sous-traitance industrielle.

> Interview de John W. Henke, professeur américain expert de la mesure des relations collaboratives clients-fournisseurs et président de Perspectives Planning. Il est revenu sur la qualité des relations entre constructeurs automobiles et équipementiers de rang 1 en Amérique du Nord.

 La charte des relations interentreprises entre donneurs d’ordres et PME, qui établit dix engagements pour des achats responsables, participe à construire dans un cadre de confiance réciproque une relation équilibrée entre les fournisseurs et leurs clients, dans la connaissance et le respect de leurs droits et devoirs respectifs.

> La mission de médiation du crédit est ouverte à tout chef d’entreprise, artisan, commerçant, profession libérale, créateur ou repreneur d'entreprise, entrepreneur individuel qui rencontre avec sa ou ses banques des difficultés pour résoudre ses problèmes de financement ou de trésorerie.

> La démarche du groupe mediation-net consiste à faire primer les facteurs d’unité sur les facteurs de division.

(1) La soft law, kezako ?
Retrouvez l’explication de ce qu'est la soft law par Philippe Coen, diplômé de Paris I, Paris X, l’Académie de la Cour Internationale de justice de La Haye et de la Harvard Law School directeur juridique The Walt Disney Company (Europe, Moyen-Orient et Afrique) et chargé d’enseignements à l’Essec sur la télévision du droit et des affaires.

 
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